À Baalbeck dans la Békaa, ou dans les rues touristiques de Batroun au Liban-Nord, un jeune homme, A.H., se pavane avec un lionceau qui a l’air en piteux état, postant ses photos sur le réseau social TikTok. Les incidents de ce type se multiplient au Liban, alors même que la loi sur la protection des animaux de 2017 interdit la possession d’animaux sauvages en danger d’extinction par des particuliers. Sur base de plaintes formulées par des activistes, le procureur en charge des affaires environnementales à Baalbeck, Iyad Bardan, s’est saisi de l’affaire, mais le lionceau reste introuvable à ce jour.
« Le 8 août, Animals Lebanon a été informé qu'un homme originaire de Baalbeck se photographiait sur son compte TikTok en compagnie d'un lionceau dont il dit s'occuper », raconte Lana el-Khalil, présidente d’Animals Lebanon (AL) à L’OLJ. « Cet animal est de toute évidence détenu illégalement et semble en très mauvaise santé. Nous avons reçu des images inquiétantes de cet homme qui partage des vidéos de lui sur les médias sociaux avec des lionceaux, dont l'un très jeune, manifestement en détresse, enchaîné, avec des marques autour des yeux. »
La militante ajoute que le 17 août, AL a reçu d'autres photos du même homme et du même lionceau dans la région de Batroun, alors qu’il l’exhibait au milieu de la ville, parmi les gens. « Sur les images, le lionceau paraît très émacié et, selon les experts, il aurait besoin de soins immédiats », précise-t-elle. Elle souligne qu’un autre signalement de la présence de la paire dans une voiture jaune sur l'autoroute est venu de témoins différents.
Pour Lana el-Khalil, « il s'agit d'une violation flagrante de la loi nationale 47 sur la protection et le bien-être des animaux et du décret sur les grands félins » publié par le ministère de l’Environnement. La militante s’insurge contre le fait que « dans la vidéo, l'homme mentionne que le lion s'est blessé dans une cage métallique, or il s'agit là d'une conséquence inévitable lorsqu’on enferme un animal sauvage en cage et qu’on le maltraite ! ».
De 5 000 à 9 000 dollars
AL affirme avoir signalé l’incident aux autorités, notamment au ministère de l’Agriculture. Élias Ibrahim, directeur des ressources animales au ministère, confirme à L’OLJ suivre de près cette affaire. « Suite à l’enquête lancée par le procureur de Baalbeck après le premier signalement de photos du suspect avec le lionceau, celui-ci a été interpellé par la police et a signé un engagement de ne plus commettre d’actes illégaux », souligne-t-il.
Interrogé sur le lionceau, le Dr Ibrahim indique « qu’il n’a pas encore été retrouvé ». « Le suspect qui s’est photographié avec l’animal assure qu’il n’en est pas le propriétaire et qu’il l’a rendu à ses propriétaires initiaux », dit-il. Pour autant, au regard des nouveaux signalements, le ministère poursuit ses recherches, affirme-t-il.
L’intérêt de posséder un animal sauvage, qui plus est un grand félin, est souvent financier. Lana el-Khalil souligne que dans l’une de ses vidéos, l’homme en question s’enorgueillit de pouvoir en procurer. « Si vous voulez un lion, il suffit de m'en parler... Le coût d'un lionceau est compris entre 5 000 et 9 000 dollars », lance-t-il ainsi.
AL a déjà contribué à sauver plusieurs lionceaux, dont trois ces derniers mois, Issam et Kelly à l’automne dernier, des frère et sœur arrivés par voie de contrebande, et Pi, un jeune mâle retrouvé à Tripoli au printemps. Tous les trois ont été confisqués à des propriétaires abusifs et envoyés à des sanctuaires en Afrique du Sud. Le Liban est d’ailleurs souvent considéré comme une plaque tournante du trafic d’espèces sauvages, en raison de sa localisation entre l’Afrique et l’Europe.