Qu’ont en commun les Pokemon, Louis de Funès (la Soupe aux choux) et les jeux olympiques de Paris ? C’est à un maître de l’upcycling ou surcyclage, Kevin Germanier, qu’a été confiée la réalisation des 120 costumes de « Records », le show de clôture des JO de Paris 2024.
Ce passionné de jeux vidéo qui dit avoir toujours voulu « faire de la mode », se passionne pour le surcyclage après un voyage en Chine. Diplômé de Central Saint Martins, il réalise sous son label, Germanier, des vêtements à base de tricotage, de déchets textiles et d’ornements parfois improbables. En perles, plumes et couleurs il glorifie le kitsch et séduit les stars de la pop. Björk, Beyoncé, Lady Gaga, Taylor Swift confient à ce créateur inspiré la création de leurs costumes de scène. Finaliste du prix LVMH 2019, Kevin Germanier, qui a commencé sa carrière dans un minuscule studio de la rue du Sentier, à Paris, voit sa maison inscrite au calendrier officiel de la Semaine de la mode de Paris en 2020.
Cassettes vidéo et Voyageur interstellaire
Pokemon et La Soupe aux Choux ? Des rubans de cassettes VHS récupérés par sa mère en Suisse. Ces chutes de films vouées à la déchetterie vont entrer dans la confection des costumes futuristes de la cérémonie de clôture. C’est également à Kevin Germanier que le conglomérat français du luxe, LVMH, signataire du plus gros chèque des JO (150 millions d’euros), va faire appel pour la réalisation du costume doré du « Voyageur interstellaire », du show final, « Records ». Ce tableau de 30 minutes raconte l'histoire de ce personnage qui découvre les vestiges des Jeux olympiques dans un futur lointain et entreprend de les ramener à la vie.
C’est en collaboration avec la journaliste Daphné Bürki, également directrice stylisme et costumes des cérémonies des Jeux Olympiques et Paralympiques, que Kevin Germanier a accepté le « pari fou » d’interpréter la vision de Thomas Jolly, le directeur artistique des cérémonies d'ouverture et de clôture des Jeux. Acteur et metteur en scène, Thomas Jolly a insufflé à ces cérémonies une audace sans précédent.
« Un sac de patates » ?
Sans surprise, les marques LVMH sont omniprésentes à la clôture, comme elles l’ont été à l’ouverture. Dans ce final très musical, la chanteuse française Zaho de Sagazan, interprétant « Sous le ciel de Paris » d’Édith Piaf, était habillé en Louis Vuitton d’une robe à corsage noir et jupon de tulle noir transparent sur une bouillonnante doublure blanche, œuvre du directeur artistique de la marque, Nicolas Ghesquière. Elle était également chaussée du modèle Jazz, une nouvelle icône LV, en cuir noir. Le quadruple médaillé d’or français Léon Marchand, qui a également remporté une médaille de bronze, chargé de porter le flambeau de la vasque des Tuileries au Stade de France, portait pour sa part un smoking noir Louis Vuitton sur une chemise en soie monogrammée, cravate de soie noire. Il était chaussé des mocassins Major, autre classique LV en cuir noir. Très controversée auprès des internautes, la robe de Zaho de Sagazan a même été comparée à un « sac de patates », à quoi la chanteuse a répliqué que c’était plutôt un « sac de princesse ». La maison Celine, qui a rejoint le groupe LVMH en 1996, n’était pas en reste, habillant avec élégance, en noir, le groupe versaillais Phoenix, symbole de la French Touch, qui a joué au milieu des 400 athlètes au départ supposés leur laisser la scène, mais se sont spontanément rassemblés autour des musiciens devant un public de 80000 spectateurs.
Chant apollinien et pianiste suspendu
Côté Dior, autre maison LVMH, c’est Benjamin Bernheim, le célèbre ténor franco-suisse de 39 ans, qui a pris la scène à l’intérieur d’un anneau olympique, vêtu d’un costume noir et d’une cape transparente et brodée. Accompagné par le pianiste suisse Alain Roche, suspendu et jouant à la verticale, il a notamment offert au public L’Hymne à Apollon de Gabriel Fauré. Ce chant, réécrit par Fauré dont on célèbre cette année le centenaire de la mort, est issu des Hymnes Delphiques interprétés au sanctuaire d’Apollon au pied du mont Parnasse, en Phocide. Dior a également habillé l'auteure-compositeur-interprète française Yseult d’un tailleur noir inspiré du modèle iconique « Bar » créé par le fondateur Christian Dior. Veste étole et jupe droite, chapeau galette penché, gants de cuir noir et boucles d’oreilles en forme de cœur, Yseult a notamment interprété « My Way » , à l’origine un tube français composé par Claude François.
Polos et logo Polo
À la veille de passer le flambeau à Los Angeles, le vestiaire de Paris n’était évidemment pas exclusivement « made in France ». Les Américains avaient eux aussi leur idée de l’’élégance. Tom Cruise qui a atterri au milieu de la cérémonie de clôture, saisissant au vol le drapeau olympique pour ensuite s’enfuir à moto vers la Cité des Anges, a exécuté cette cascade hollywoodienne en Ralph Lauren. Sur la plage de Venice Beach où l’attendaient les stars américaines comme Snoop Dog, Billie Eilish, les Red Hot Chili Peppers et Dr. Dree, le style était yankee avec une touche preppy. Billie Eilish portait un polo blanc Ralph Lauren démesuré, barré d’une bande rouge-blanc-bleu, un drapeau américain sur la manche et fameux joueur de polo à cheval, logo de la marque, sur la poitrine. Le maître des élégances à L.A. s’annonce sans bruit : ce sera Ralph Lauren, l’inventeur du classicisme vestimentaire américain chic et lisse, le fameux « preppy » qui renvoie aux uniformes des étudiants et diplômés des écoles préparatoires traditionnelles.