Des membres de factions palestiniennes posent avec le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi (c) à Pékin, le 23 juillet 2024. Photo AFP/PEDRO PARDO
Le Hamas et le Fateh ont signé lundi un accord prévoyant la mise en place d'un « gouvernement intérimaire d'union nationale » pour gouverner « l'ensemble du territoire palestinien » comprenant aussi bien Gaza que la Cisjordanie occupée, selon un communiqué consulté par L'Orient-Le Jour. Ce document de quatre pages est signé par les deux formations rivales, ainsi que 12 autres factions réunies ces derniers jours à Pékin dans le cadre d'une nouvelle tentative parrainée par la Chine, aux fins de trouver des compromis entre les différentes composantes de la scène politique palestinienne. La guerre entre le Hamas et Israël continue de faire rage depuis le 7 octobre dernier, rappelle-t-on.
Le gouvernement d'union nationale devrait s'atteler à « unifier les institutions palestiniennes (...), lancer la reconstruction de Gaza et préparer des élections au plus vite », indique le texte, qui assure qu'un « agenda » sera mis en place pour l'application de ces décisions.
Parmi les signataires de cet accord, le Jihad islamique, très présent sur le terrain depuis le début de la guerre à Gaza, ainsi que le Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP) et le Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP), deux mouvements affiliés à l'Organisation pour la libération de la Palestine (OLP) du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.
« Aujourd'hui, nous signons un accord d'union nationale et nous déclarons que la voie à suivre pour achever ce processus est l'unité nationale », a indiqué Moussa Abou Marzouk, un haut responsable du Hamas, selon l'AFP.
L'annonce intervient plus de neuf mois après le début de la guerre à Gaza. Le 7 octobre 2023, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël ont mené une attaque sanglante qui a entraîné la mort de 1.197 personnes, en majorité des civils, selon un décompte établi à partir de données officielles israéliennes. En riposte à l'attaque du 7 octobre, Israël a lancé une offensive de grande envergure dans Gaza, qui a fait plus de 39 000 morts, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du Hamas. Les combats incessants ont plongé Gaza dans une grave crise humanitaire.
Le chef de la diplomatie chinoise, Wang Yi, a déclaré que l'accord prévoit notamment la création d'un « gouvernement intérimaire de réconciliation nationale » et prévoit une gouvernance commune après la guerre à Gaza.
Des répercussions « positives » au Liban
Quelles retombées possibles au Liban, où le Fateh et des groupes islamistes s'étaient livrés à des combats violents à Aïn el-Héloué en septembre 2023, faisant une dizaine de morts et des dégâts matériels importants ? Un responsable du Hamas à Beyrouth souligne que « cet accord, s'il est appliqué, devrait avoir des répercussions positives sur les camps palestiniens au Liban ». « Nous sommes pour une unité nationale et un redressement de la scène palestinienne, qui se répercutera sur les Palestiniens à l'étranger », a ajouté ce responsable qui a requis l'anonymat. « Nous avons besoin d'une entente politique pour l'appliquer et faire en sorte que ce ne soit pas une réunion de plus. Mais les autres parties seront-elles capables de respecter ce texte si elles sont soumises à des pressions américaines par exemple ? », s'est-il demandé.
« Au Liban, la division inter-palestinienne est à la fois horizontale et verticale entre les différentes factions, mais les civils, eux, sont unis. Cet accord devrait avoir des retombées positives sur les camps palestiniens, dans le sens où il pourrait permettre de renforcer la coopération sécuritaire et mettre un terme aux divisions. Nous espérons que cela pourrait freiner l'utilisation des camps palestiniens par des acteurs étrangers », analyse pour sa part Ahmad Sakhnini, responsable au sein du FDLP au camp de Bourj Brajné.
Si cet accord « n'est pas le premier accord du genre, son importance réside dans le fait qu’il intervient dans un contexte de guerre et qu'il regroupe plusieurs factions », souligne-t-il. L'application de cet accord pourrait également avoir des « retombées sur l'amélioration des conditions de vie des Palestiniens vivant dans les camps de réfugiés, ainsi que leur accès à plus de droits humains au Liban », ajoute-t-il.
« Aucune excuse »
Quant au rôle joué par la Chine dans la conclusion de cet accord, le responsable du Hamas contacté par L'OLJ insiste sur le fait que cette médiation « montre qu'il y a d'autres acteurs que les États-Unis ou l'Union européenne au niveau international ».
La Chine, qui entend jouer un rôle de médiateur dans le conflit, entretient de bonnes relations avec Israël mais soutient depuis des décennies la cause palestinienne, reconnaît un État de Palestine et milite pour une solution à deux Etats. Wang Yi a ainsi réitéré mardi son appel à un « cessez-le-feu général, durable et viable dans la bande de Gaza au plus vite, afin de garantir un accès sans heurts à l'aide humanitaire et aux secours ». « Aucune excuse ne peut justifier que des civils soient blessés et que la guerre soit encore prolongée », a-t-il martelé.
« La réconciliation est une question interne aux factions palestiniennes, mais en même temps, elle ne peut être réalisée sans le soutien de la communauté internationale », a déclaré le chef de la diplomatie chinoise. Il a appelé les autres pays à soutenir ce potentiel nouveau gouvernement palestinien afin qu'il puisse « contrôler effectivement Gaza et la Cisjordanie ». Tout en soulignant: ce sont « les Palestiniens eux-mêmes qui doivent administrer la Palestine », sous-entendu pas des puissances étrangères, a souligné M. Wang.
La Chine a renforcé ces dernières années ses relations commerciales et diplomatiques avec le Moyen-Orient, dont une grande partie est traditionnellement sous influence américaine. Elle a ainsi supervisé et facilité le spectaculaire rapprochement diplomatique l'an passé entre deux grandes puissances régionales, l'Iran et l'Arabie saoudite. Le géant asiatique avait déjà accueilli en avril des discussions entre représentants du Hamas et du Fateh. La Chine souhaite continuer à « jouer un rôle constructif dans le maintien de la paix et la stabilité au Moyen-Orient », a souligné mardi Wang Yi.
Le Hamas a provoqué la mort de dizaines de milliers de palestiniens et il veut continuer à gouverner Gaza comme si de rien n'était... tfeh
22 h 08, le 23 juillet 2024