
Renforcer le système de soins en vue de faire face à des vagues de chaleur de plus en plus sévères est devenu une nécessité. Ici, une soignante dans un hôpital de Beyrouth. Photo d'archives João Sousa
Une conférence organisée le 20 mai dernier par le ministère de l’Environnement, en coordination avec la Fondation Hanns Seidel, a mis en lumière les conséquences sanitaires des vagues de chaleur à laquelle le Liban et de nombreux autres pays vont faire face cet été. Ces canicules, de plus en plus sévères et fréquentes dans un contexte de changement climatique, sont des périodes lors desquelles les températures grimpent au-delà de 35 degrés et entraînent des risques pour la santé.
Selon Léa Kaï, experte sur le changement climatique au sein du Programme des Nations unies pour le développement, le Liban aurait atteint 1,6 degré de plus en 2024 qu’en 1950, avec notamment des records de sécheresse dans la Békaa. En quelques questions, et alors que le pays s'approche déjà de ces températures, L'Orient-Le Jour livre les points essentiels tirés de cette conférence.
Quelles conséquences sanitaires ?
Lors de la conférence, le Dr Tharwat Zahrane, médecin urgentiste et toxicologue à l’AUBMC, a expliqué que les cas de maladies respiratoires, infectieuses (typhoïdes, influenza…), bactériennes dans certains pays comme la malaria, etc., se multiplient lors de ces épisodes climatiques. Les maux les plus directement liés à la chaleur sont les cas de fatigue extrême ou de coups de chaleur. Ces derniers sont plus graves, étant accompagnés d’une température de 42° et plus, avec des symptômes neurologiques comme les changements de comportements ou des hallucinations – qui nécessitent une hospitalisation immédiate et un traitement rapide. En attendant l’intervention d’un spécialiste, on peut plonger le malade dans de l’eau froide en vue de faire baisser la fièvre.
En sus de la santé, ces changements ont également des répercussions sur le secteur médical (pression sur les hôpitaux), sur l’infrastructure (notamment l’énergie), sur l’agriculture (sécheresse), sur l’économie (jours chômés à cause des absences), etc.
Combien de décès peuvent être imputés aux vagues de chaleur ?
La mortalité liée aux canicules est à la hausse, bien qu'il reste difficile d’avoir des chiffres exacts, selon Habib Maalouf, conseiller au ministère de l'Environnement, car il existe toujours un problème de classification, les causes annoncées des décès pouvant ne pas inclure la chaleur comme l'origine du malaise. Selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre de décès imputables aux vagues de chaleur entre 1998 et 2017 a dépassé les 166 000 personnes. L’étude de l’OMS avait estimé en 2018 que ce chiffre pourrait quadrupler entre 2018 et 2030, or cette projection a été atteinte dès 2020.
Quelles institutions sont chargées de l’alerte précoce et de l’intervention rapide ?
L’Unité de gestion des crises, affiliée au bureau du Premier ministre, est chargée de déterminer les risques et de lancer les directives aux ministères concernés et aux autorités locales, qui devront agir en conséquence. Cette unité dépend beaucoup de certaines techniques qui permettent de prévoir les risques d’événements climatiques tels que les inondations, les vagues de chaleur ou les grands incendies. Celles-ci sont utilisées par une plateforme de détection précoce d’une rare qualité (« National Early Warning System Platform »), peu connue du grand public, produite par le Conseil national de la recherche scientifique. D'autres organisations comme la Défense civile et la Croix-Rouge libanaise préparent, elles, leurs plans d’intervention dans les cas d’urgence. Une meilleure communication entre toutes ces entités favoriserait grandement la lutte contre les catastrophes, selon les experts présents durant la conférence.
Quelles recommandations ?
Les populations les plus vulnérables sont les personnes âgées, les femmes enceintes et les enfants. En plus de s’hydrater continuellement et de se protéger du soleil lors des journées très chaudes, les experts présents lors de cette conférence ont indiqué la nécessité de doter les bulletins météo de consignes précises sur les vagues de chaleur, de dynamiser le rôle des chambres d’opération dans les mohafazats (gouvernorats) et les municipalités pour une meilleure diffusion des informations. Il faut aussi renforcer les infrastructures des hôpitaux, notamment des urgences (avec une augmentation du nombre des médecins), ainsi que les centres de secouristes, en vue de mieux absorber les cas résultant des vagues de chaleur et traiter les symptômes sévères avec la rapidité nécessaire.
À plus long terme, il faudra aménager plus de jardins dans les espaces citadins, qui accueilleront les habitants dans les journées chaudes, prendre en compte le changement climatique dans les constructions – exposition au soleil, isolation… –, instaurer une gestion rationnelle des ressources hydrauliques en privilégiant le stockage naturel sous terre au stockage artificiel en surface (exposé à l’évaporation et la pollution), protéger les cimes avec leurs sources d’eau et soutenir les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le cadre d’une stratégie nationale durable.
En tout cas, si le changement climatique ose affecter Israel, ils diront que ça sera la preuve que la nature est anti-ces-mites… qui prend les paris?
11 h 05, le 04 juin 2024