Fin du suspense dans l'affaire Pascal Sleiman ? Il semble que cela soit le cas à en croire les milieux officiels. L'armée libanaise a en effet confirmé lundi soir sur la plateforme X les informations selon lesquelles le coordinateur des Forces libanaises pour la région de Jbeil a été tué lors d'une tentative de vol de sa voiture, dans le secteur de Kharbé. Son corps a alors été transféré par ses assaillants vers la Syrie. Toutefois, le parti de Samir Geagea ne l'entend pas de cette oreille. En fin de soirée, il publiait un communiqué affirmant que la mort de son cadre était le résultat d'un « meurtre prémédité » que les FL « considèrent comme un assassinat politique jusqu'à preuve du contraire ».
L'affaire avait dès dimanche soir pris une teneur hautement politique, notamment après que le chef des FL s'est déplacé en personne sur le terrain. Quelques heures après l’enlèvement de Pascal Sleiman, M. Geagea a décidé de passer outre ce qu’il présente depuis plusieurs années comme des « menaces sécuritaires » contre sa personne pour quitter sa forteresse de Meerab et se rendre à Jbeil aux côtés de ses partisans en colère. Il s’agissait de son tout premier déplacement public depuis sa participation à la fête nationale de l’Arabie saoudite (en septembre 2023), dont il est un grand allié local. La démarche du leader chrétien, qui se veut le fer de lance de l’opposition, semble lui avoir permis de faire d’une pierre plusieurs coups. D’abord, il a voulu adresser un message politique à ses détracteurs, à commencer par le Hezbollah que le parti accuse de se tenir derrière l’assassinat d’Élias Hasrouni, cadre FL retrouvé mort dans son village natal de Aïn Ebel (Liban-Sud) en août 2023. De même, Samir Geagea a joué sur la fibre chrétienne, se montrant comme le fédérateur de la communauté, ne serait-ce que pour quelques heures, l’affaire Sleiman ayant rassemblé autour du chef des FL d'autres partis chrétiens, dont son rival, le Courant patriotique libre.
Pascal Sleiman, originaire de Mayfouk, avait été attaqué vers 18h15 dimanche par des hommes qui lui avaient bloqué la route alors qu’il se trouvait à Kharbé. Quelques heures plus tard, des partisans FL en colère bloquaient l’autoroute de Jbeil, en guise de pression. Une affaire dont se sont aussitôt saisis les services de renseignements de l'armée. L’institution militaire a ainsi arrêté lundi neuf suspects syriens, dont l’un serait directement impliqué dans l’incident, confie à L’Orient-Le Jour une source sécuritaire. Tard dans la soirée de lundi, l'armée a déclaré, sur son compte X, que lors de l'interrogatoire, les Syriens détenus ont avoué avoir tué le cadre FL, alors qu'ils tentaient de lui voler sa voiture. Ils ont également reconnu avoir transporté son corps en Syrie. « L'armée collabore avec les autorités syriennes pour récupérer la dépouille mortelle et poursuivre l'enquête sous la supervision du parquet militaire », ajoute la troupe. Quelques minutes plus tard, le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, a publié un communiqué appelant à la retenue et incitant à la poursuite de l'enquête.
« Cela ne passera pas »
« Cette affaire rappelle le traumatisme de l’enlèvement de Ramzi Irani (cadre FL retrouvé mort en mai 2002, quelques semaines après avoir été porté disparu) et de plusieurs autres crimes. Samir Geagea est conscient de cette charge émotionnelle très forte », estimait Karim Bitar, politologue, avant les développements de la soirée.
« Le chef des FL a pris le risque de se déplacer pour faire comprendre à qui veut l’entendre que ce n’est pas de cette manière que notre parti peut être intimidé », déclarait pour sa part à L’Orient-Le Jour le porte-parole des FL, Charles Jabbour. Il a été rejoint sur ce point par Ghayath Yazbeck, député de Batroun. « Que personne n’essaie de nous mettre à l’épreuve », affirmait-il, se faisant ainsi l’écho de la campagne lancée par les FL sur les réseaux sociaux et intitulée « Ça ne passera pas ».
L'affaire avait dès le début créé un climat de haute tension et une polarisation politique, comme l’ont montré les réactions en série des ténors de l’opposition. Ces derniers avaient affirmé, quelques heures seulement après l’incident, que celui-ci ne restera pas sans conséquences. « Surtout que ce qui s’est passé dimanche est symptomatique de l’effritement de l’État alors qu’il devrait être responsable de la sécurité de ses citoyens », avait déclaré à L’OLJ Ziad Hawat, député FL de Jbeil, sans cacher ses craintes de voir « l’incident se reproduire avec quelqu’un d’autre ». « Si l’État ne peut pas nous protéger, qu’il nous le dise une fois pour toutes », a-t-il ajouté dans une déclaration accordée à notre journaliste sur place, Stéphanie Béchara.
M. Hawat rejoint ainsi son collègue Kataëb, Élias Hankache, qui avait été dépêché par le chef du parti, Samy Gemayel, à Jbeil. « Nous continuons de miser sur l’État et les forces de l’ordre. Mais aucun blâme ne devrait nous être adressé (pour des décisions qui pourraient être prises ultérieurement, NDLR). Nous n’allons pas (rester les bras croisés) et pleurer nos cadres tous les quelques mois », a-t-il lancé à la presse, insistant sur « l’unité entre les FL et les Kataëb face à ce genre d’incidents ».
Le CPL aussi…
À cette image d’unité chrétienne s’est rapidement joint le CPL, dont le député jbeiliote, Simon Abi Ramia, a participé au sit-in. « Devant ce genre de choses, il est très normal de prendre une telle position. D’autant plus que Pascal Sleiman est un ami personnel », avait-il dit à L’OLJ.
« Par sa démarche, le parti aouniste a adhéré à l’humeur populaire chrétienne, en dépit du fait que nous (les FL) étions le moteur de cette mobilisation », décryptait Ghayath Yazbeck. « Nous voulons dire à l’État que nous en avons assez de ses défaillances, ajoutait-il. Ce ne sont pas les FL qui mènent le pays vers l’inconnu, mais ceux qui doutent de l’armée et entravent l’action du pouvoir judiciaire. » Une allusion évidente au Hezbollah, accusé par les FL de bloquer l’enquête sur la double explosion de 2020 au port de Beyrouth et de mener le pays vers la guerre.
Certaines personnes ont commenté contre les Chrétiens qu'ils veulent la guerre civile. Voici ma réponse, si votre satisfaction de voir le Liban tel qu'il est en ce moment, vous n'êtes que des esclaves pour avoir la paix. Thomas Jefferson a dit ceci: "I prefer dangerous freedom, over peaceful slavery." Et Arrêtez de tout mettre sur le dos d'Israel, et de "Protéger" Le Hezbollah, qui est pour moi, Responsable de la mort de Pascal sleiman et de la guerre avec Israel. Les victimes libanaises, sont la responsabilité du Hezbollah.
23 h 03, le 10 avril 2024