Il a attendu la fin de son discours pour entrer dans le vif du sujet. Dans sa prise de parole de lundi, seulement trois jours après son discours à l'occasion de la journée de Jérusalem, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a commenté l'affaire de l'enlèvement, la veille, de Pascal Sleiman, responsable du caza de Jbeil au sein des Forces libanaises, un parti farouchement opposé au parti chiite et son arsenal. « Ce qui pousse le Liban vers la guerre civile, ce sont les accusations erronées », a-t-il mis en garde. Dimanche soir, quand les FL ont perdu tout contact avec M. Sleiman, le Hezbollah a tout de suite été pointé du doigt, indirectement par les responsables du parti, mais directement par ses partisans, notamment sur les réseaux sociaux.
« Cette affaire n'a rien à voir avec la politique ni avec le Hezbollah, il s'est avéré que c'est un gang, composé de Syriens et de Libanais, qui en est responsable », a déclaré Hassan Nasrallah. Il a rappelé l'affaire de l'enlèvement en février 2023 du cheikh Ahmad Rifaï, opposé au Hezbollah, dans le Akkar. « Après le rapt de ce cheikh, des accusations avaient été portées, notamment par les FL, contre le Hezbollah. Nous avons gardé le silence et attendu pendant quatre jours que l'enquête révèle que le crime était motivé par un différend familial », a-t-il déclaré. « Dimanche aussi, les FL et les Kataëb, ainsi que les chaînes télévisées hypocrites, ont décidé que c'est le Hezbollah qui a enlevé le responsable partisan à Jbeil et nous avons entendu un discours sectaire nauséabond qui rappelle la guerre civile et même des menaces à l'encontre des habitants de certains villages de la région, a dénoncé Nasrallah. Leurs partisans sont descendus dans la rue et nous les avons entendus appeler à sortir les armes, alors qu'ils prétendent être des partis démocratiques et “propres”. » Et de lancer : « La levée du voile sur le sort de la personne enlevée est un véritable scandale pour les FL et les Kataëb, et prouve que ces deux partis ne cherchent pas la vérité ni la justice, mais la discorde et la guerre civile. » Selon lui, « Dieu a protégé le Liban d'une discorde motivée par les rancunes, les idioties mais aussi les liens à des projets externes ».
« Ce qui s'est passé (dimanche) est très dangereux et doit servir de leçon à tous les Libanais, et particulièrement aux chrétiens : ceux qui empêchent la sédition sont justement ceux qui en sont accusés », a ajouté Hassan Nasrallah, en référence au tandem Amal-Hezbollah. « Nous, même quand on nous tue, nous restons prudents pour préserver le pays », a-t-il ajouté, rappelant les événements d'octobre 2021. À l'époque, le tandem chiite avait organisé une manifestation à Tayouné pour réclamer la mise à l’écart du juge Tarek Bitar (chargé de l’enquête concernant l’explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020). Des hommes armés proches des FL avaient alors empêché les manifestants d'accéder à ce quartier chrétien de la banlieue de Beyrouth, donnant lieu à des affrontements qui avaient fait plusieurs morts. Le chef du Hezbollah a estimé que « ce qui s'est passé est d'autant plus grave à l'approche de la commémoration de la guerre civile » (le 13 avril 1975), accusant ces mêmes partis chrétiens d'en avoir été les instigateurs. « Vous nous demandez aujourd'hui de laisser la décision de la guerre et de la paix aux mains de l'État. En avril 1975, avez-vous interrogé le Parlement avant de provoquer la guerre civile ? » a-t-il lancé.
Franchir les lignes rouges
Outre ce dossier, Hassan Nasrallah est revenu sur les affrontements qui opposent depuis six mois son mouvement aux Israéliens, en soutien au Hamas. Il a notamment vanté la destruction samedi au Liban-Sud d'un drone israélien de type Hermes 900. « C'est une étape importante, commente Hassan Nasrallah. Israël dit que nous franchissons les lignes rouges. Mais qui a dit que nous ne le ferions pas ? C'est aussi ce qu'ils font ! » En guise de riposte, Israël a frappé la Békaa, à une centaine de kilomètres de la frontière. À son tour, le Hezbollah a répondu en frappant le Golan syrien occupé.
Mais l'essentiel du discours de Nasrallah a été alloué à Mohammad Reza Zahedi, haut gradé des gardiens de la révolution iraniens, tué dans la frappe israélienne du 1er avril ayant visé le consulat iranien à Damas. «Il était un général solide, fiable, présent avec force. Et ce y compris dans les moments difficiles, a dit le chef du Hezbollah. C'était un ami, humble, honnête, vrai. » Le général iranien « a passé un total de quatorze ans au Liban », entre 1996 et 2000, puis de 2008 à 2014 et, enfin, de 2020 jusqu'à sa mort en 2024, a-t-il encore dit. « Nous avons ressenti une grande perte, tout comme lorsque (le général iranien) Kassem Soleimani est tombé en martyr en 2020 (dans une frappe US en Irak, NDR) », a-t-il ajouté. Après la frappe israélienne à Damas, L'Orient-Le Jour a révélé la longue histoire entre le Hezbollah et le général Zahedi, qui siégeait d'ailleurs dans le conseil consultatif (Choura) du parti jaune.
Hassan Nasrallah a qualifié cette attaque israélienne comme « la plus importante depuis des années ». « D'abord, parce qu'elle a visé une cible pas comme les autres : le général Zahedi est le chef de tous les conseillers iraniens présents dans la région. Ensuite, parce qu'elle a frappé le consulat de l'Iran, un territoire considéré par les standards internationaux comme étant iranien. » Et d'ajouter : « Dans le passé, les Iraniens considéraient qu'étant donné que les attaques israéliennes ne frappent pas le territoire de la République islamique, ils peuvent répondre en frappant Israël en territoire étranger. Cette considération ne s'applique plus aujourd'hui. » Comprendre que la riposte iranienne « inéluctable » pourrait cibler le territoire israélien.
Mais la grande question, surtout pour les Libanais, c'est de savoir d'où elle va partir.
Le Hezbollah a commis une erreur stratégique d'entrer en guerre sans le soutient du peuple. La bataille de Gaza est presque terminé et Israël déplace ses troupes vers le Nord. Le Hezbollah se doit de trouver un moyen pour sauver les meubles alors il se tourne vers l’intérieur comme il l'avait fait en 2008 après sa défaite de 2006. A présent la situation est encore plus grave puisque 80% du peuple Libanais lui en veut et son existence immédiate est en jeu d'ou le meurtre du responsable FL. HN a oublié l'histoire qui montre que qui se frotte aux FL s'y pique. un homme avertit en vaut deux!
09 h 18, le 10 avril 2024