« Certains savent que je ne devrais pas perdre, mais il ne faut pas que je gagne autant. » À travers cette publication postée sur son compte X le 15 décembre dernier, le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, prédisait (peut-être sans le savoir) l’issue de sa bataille contre le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, dont le mandat était prorogé par le Parlement quelques heures plus tard. Réunis mercredi, les dix membres du Conseil constitutionnel ne sont pas parvenus à trancher – ou plutôt ont soigneusement évité de le faire – la question du recours en invalidation, présenté par le bloc du Liban fort, de la loi prorogeant d’un an le mandat du général Aoun et du reste des chefs d’appareils sécuritaires. Pratiquement, la « non-décision » signifie que la loi demeure en vigueur, et que le général restera à la tête de l’institution militaire. Il reste que la démarche semble être le fruit de minutieux calculs effectués dans le but d'épargner à M. Bassil une défaite aussi cuisante que celle subie au moment du vote de la législation. Ainsi, au lieu de rejeter le recours, le CC a opté (comme il l’avait fait pour d’autres recours présentés par la formation aouniste en 2021 concernant les législatives) pour le non-accord.
Selon les informations de L’Orient-Le Jour, le CC s’est concerté à plusieurs reprises au grand complet pour examiner la requête aouniste. Lors de la réunion de mercredi, les dix membres de l’instance étaient divisés entre ceux qui soutenaient la nécessité de maintenir la loi au vu des circonstances actuelles de guerre et ceux qui ont mis en avant la nécessité pour toute loi de respecter le principe de généralité. Un point mis en exergue par le CPL qui avait fait valoir que le texte adopté à la Chambre a été « taillé à la mesure de quelques personnes », en allusion au chef de l’armée.
S’exprimant à l’issue de la réunion, le président du CC, Tannous Mechleb (perçu comme proche de l'ancien président Michel Aoun), a confirmé ces informations. « Les magistrats ont été divisés presque à moitié entre les deux points de vue », a-t-il dit, rappelant que l’instance qu’il préside a déjà accordé son feu vert à la notion de législation de nécessité, mise en avant par le président de la Chambre, Nabih Berry, pour justifier la tenue de séances plénières en pleine vacance présidentielle. C’est d’ailleurs pour cette raison que le CC avait rejeté, en mai dernier, le recours en invalidation de la loi prorogeant le mandat des conseils municipaux.
« Institutions en pleine dérive »
Les propos de M. Mechleb déconstruisent ainsi un des principaux arguments du CPL pour demander l’invalidation de la loi du 15 décembre. Contacté par L’OLJ, Salim Jreissati, ancien ministre proche du CPL et un des auteurs du recours, se dit « désolé » de constater que « le CC rejoint aujourd’hui les institutions en pleine dérive ». Selon lui, « la décision laisse planer le doute sur la légalité de la prorogation du mandat de Joseph Aoun ». « Si j’étais à la place du général, je me serais posé la question de savoir pourquoi le Conseil n’a pas rejeté le recours en le fond », dit-il, avant de poursuivre : « Je ne me sens pas en état d’échec. »
Cette dernière phrase résume bien l’état d’esprit des aounistes. Après avoir mené une bataille sans merci pour en finir avec – le présidentiable non déclaré – Joseph Aoun, le CPL s’efforce ainsi de minimiser la portée du revers qu'il vient de subir. « Nous avons fait notre devoir visant à préserver la Constitution et les prérogatives du président de la République », commente Martine Najm Koteily, vice-présidente du parti pour les affaires politiques. Commentant la thèse selon laquelle le maintien du chef de l’armée à son poste est à même de le garder dans la course pour Baabda, Mme Koteily déclare : « C’est peut-être un des points positifs du résultat de cette bataille. Car tant qu’il est à Yarzé, le général n’a pas de chances d’accéder à Baabda. » Le CPL maintient donc son veto contre toute démarche visant à amender la Constitution pour paver la voie de Baabda devant son grand adversaire. De son côté, Ghassan Atallah, député aouniste, affirme que son parti « n’a pas mené cette bataille pour des calculs présidentiels ». « Il s’agit d’un combat de principe, duquel nous ne sommes pas sortis perdants », affirme-t-il. Il déplore toutefois le fait que « le CC a opté pour une démarche qui convient à ceux qui veulent le voir incapable de prendre une décision ». Une pique évidente aux principaux adversaires des aounistes, en l’occurrence, Nabih Berry et, surtout, les Forces libanaises, sans lesquelles la réunion parlementaire consacrée à la prorogation du mandat de Joseph Aoun n’aurait pas pu avoir lieu. Et de lancer : « Le grand perdant dans tout ça ? C’est bien évidemment celui qui accepte de rester sur un siège vacillant. »
Le général Aoun a fait preuve de lucidité en acceptant sa prorogation à la tête de l’armée. Il n’aura pas de vacance tant qu’un président n’est pas élu, Dans d’autres pays, dans pareil cas, le général Aoun fort de l’appui de ses fidèles aurait déclenché un coup d’état soit pour y rester président, soit pour paver la route à une présidentielle dans la semaine. Le Liban est le seul pays au monde ou pendant quinze mois, il n’y a pas de président. Les institutions sont bafoués, piétinés, chaque partie ou groupe veut imposer son président, et le seul valable est Jihad Achour, économiste renommé, qu
13 h 06, le 01 février 2024