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Culture - 7e art

Daniel Auteuil et Emmanuelle Devos dans un film sur le silence et la pédopornographie

Daniel Auteuil et Emmanuelle Devos dans un film sur le silence et la pédopornographie

Une famille toxique : Daniel Auteuil, Matthieu Galoux et Emmanuelle Devos dans « Un silence » de Joachim Lafosse. Photo DR

Un silence, avec Daniel Auteuil et Emmanuelle Devos, retrace l’histoire d’un avocat engagé contre la pédophilie qui cache un terrible secret : son réalisateur s’inspire d’une histoire vraie pour dénoncer le tabou qui enferme les victimes.

Joachim Lafosse a toujours abordé des sujets qui dérangent, de la maladie mentale (Les Intranquilles, présenté en 2021 à Cannes) à l’infanticide (À perdre la raison, 2012). Mais ce dixième film, en salle mercredi, occupe une place à part pour le réalisateur belge de 48 ans, à l’œuvre empreinte de noirceur.

Il y fait écho à un fait divers qui a marqué la Belgique : la condamnation en 2010 d’un avocat, Victor Hissel, pour détention d’images pédopornographiques.

L’homme était considéré comme l’un des fers de lance de la lutte contre la pédophilie dans le royaume, pour avoir défendu les parents de deux fillettes retrouvées mortes en 1996 chez Marc Dutroux, l’un des pires pédocriminels de l’histoire. Ne supportant pas la situation, son propre fils avait tenté de l’assassiner en le poignardant.

« C’est presque comme si j’avais eu envie d’être, d’une certaine manière, l’avocat de cet adolescent », a expliqué le réalisateur.Le climat dans lequel il a grandi, la façon dont la Loi fondamentale n’était pas soutenue par son père et (...) la manière dont ça amène à la psychose m’ont donné envie de faire ce film. » Tourner ce film obéissait aussi à un autre ressort, très personnel.

Il y a 15 ans, Joachim Lafosse tournait un film « très autobiographique », Élève libre, qui racontait l’emprise d’un groupe d’adultes sur un adolescent, « qui le prenaient comme un objet de jouissance ».

Il espère alors briser le silence qui l’entoure, mais c’est « l’effet inverse » qui se produit : « Personne n’est jamais venu me parler de ça. Au contraire, j’ai commencé à voir les gens s’éloigner. Moi, je commençais a longer les murs. »

« Honte et silence »

Quinze ans plus tard, « honte, silence et culpabilité » sont au cœur de ce nouveau film. Notamment autour du personnage incarné par Emmanuelle Devos, épouse dévouée qui s’interdit de voir et de dénoncer les agissements de son mari, quitte à sacrifier sa famille.

« Je ne suis pas procureur, je ne suis pas juge mais, en tout cas, moi, j’ai l’impression (qu’elle) n’est pas coupable. Elle n’a pas demandé à ce que ce crime sexuel arrive dans cette maison, elle pose la question du venin, de ce que secrète le crime. Elle pose la question du comment on peut en arriver à se taire comme ça », résume-t-il.

Face à elle, indéchiffrable, un Daniel Auteuil glaçant. « Il y a énormément d’acteurs fameux qui peuvent incarner cette bourgeoisie et qui m’ont dit que le scénario était super mais qui avaient peur de jouer le rôle. Daniel, au bout de cinq ou six acteurs, est le premier qui m’a appelé tout de suite et m’a dit « J’adore » », retrace Joachim Lafosse.

Au-delà de son film, le cinéaste salue les « femmes magnifiques » qui ont brisé le silence ces dernières années dans le milieu du cinéma sur les agressions qu’elles sont pu subir, et espère voir des hommes victimes s’exprimer à leur tour.

« Elles ont pu parler grâce à la sororité, à la communauté, à leur solidarité. Alors que, quand tu es un homme et que tu racontes ce qu’il s’est passé, il y a une solitude qui accompagne les mots. » « Le patriarcat n’invite pas à l’échange des mots entre hommes, il faut être costaud », souligne-t-il.

Lui-même dit avoir trouvé la force d’écrire Élève libre, après la lecture de L’Inceste, de Christine Angot, dont il admire le courage.

« Il y a des histoires d’emprise, d’abus dans le cinéma, avec des garçons, (...) des hommes âgés, qui adorent les très, très jeunes hommes et jeunes acteurs », poursuit-il, estimant apporter sa « pierre à l’édifice » en évoquant dans son film la question du silence.

Francois BECKER/AFP

Un silence, avec Daniel Auteuil et Emmanuelle Devos, retrace l’histoire d’un avocat engagé contre la pédophilie qui cache un terrible secret : son réalisateur s’inspire d’une histoire vraie pour dénoncer le tabou qui enferme les victimes.Joachim Lafosse a toujours abordé des sujets qui dérangent, de la maladie mentale (Les Intranquilles, présenté en 2021 à Cannes) à...

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