Une trentaine de membres et de proches des familles des victimes de l’explosion qui a dévasté le port de Beyrouth et une partie de la capitale le 4 août 2020, se sont rassemblées ce lundi en fin d'après-midi devant la statue de l'Émigré à Beyrouth comme ils le font depuis plus de trois ans. Il n’ont manqué jusqu’ici aucun rendez-vous malgré les débordements au Liban-Sud de la guerre qui a éclaté le 7 octobre dernier entre le Hamas et Israël et qui a transformé la bande de Gaza en champ de bataille.
Selon notre journaliste sur place à Beyrouth, Mohammad Yassine, les personnes présentes se sont rassemblées vers 17h pour une mobilisation désormais rituelle visant à dénoncer cette catastrophe qui a provoqué la mort d’au moins 235 personnes et blessé plus de 6.500 autres. Plusieurs d’entre eux tenaient des portraits des victimes, souvent des photographies, parfois des dessins.
« Aujourd’hui, nous sommes le 4 du mois. Et comme chaque mois au même moment depuis trois ans, nous venons ici allumer des bougies pour réconforter les âmes des victimes car nous sommes sûrs que ceux (qui sont décédés) nous entendent mieux que (les vivants) » ont déclaré les participants selon un communiqué publié en marge du rassemblement.
« Vous avez détruit Beyrouth et tué un peuple sans sourciller, et vous avez ignoré tous les mandats d'arrêt et les citations à comparaître. Vous utilisez tout le système judiciaire pour servir vos intérêts et vous l’empêchez aussi de fonctionner aussi pour (la même raison) » ont également déploré les familles des victimes, en s’adressant à la classe politique libanaise.
Rappelant que la déflagration qui a soufflé la capitale le 4 août 2020 était l'une des pires explosions non nucléaires de l'Histoire, les familles des victimes ont notamment enjoint le juge Habib Rizkallah, premier président de la Cour d'appel de Beyrouth, à « ouvrir une enquête sans délai, car les vacances judiciaires ont pris fin il y a des mois et les prochaines vacances approchent ». Ce magistrat a été chargé début juin par Souheil Abboud, le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), d'enquêter sur une action en justice intentée par le procureur de la République Ghassan Oueidate contre Tarek Bitar, juge d'instruction chargé de l'enquête sur le drame du 4 août. Mais il n’a jusqu’à présent ni convoqué le juge d’instruction ni rendu de décision.
Les familles des victimes ont également critiqué la « communauté internationale » et les « institutions qui défendent les droits de l’Homme ». « Comment pouvons-nous (leur) faire confiance pour nous aider à obtenir justice ? » ont encore déploré les auteurs du communiqué, soulignant que les images satellite de la catastrophe du 4 août détenues par des pays étrangers n’avaient toujours pas été remises à la justice libanaise.
Les proches des victimes dénoncent l'obstruction de l'enquête, bloquée par de multiples interférences politiques. Fin août, le groupe principal des familles a annoncé qu'une pétition en faveur d'une commission internationale d'établissement des faits a été signée par une majorité non précisée de députés libanais et sera bientôt présentée au Conseil de sécurité de l'ONU.