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Société - Reportage

Trêve précaire au Liban-Sud, des habitants inspectent les dégâts : « Où est l’État ? »

Des voitures brûlées, des fenêtres brisées et des champs d'oliviers parsemés d'obus. C'est ce qu'ont trouvé certaines familles déplacées de retour dans les villages de Dhaïra, Aïta el-Chaab et Aïn Ebel.

Trêve précaire au Liban-Sud, des habitants inspectent les dégâts :  « Où est l’État ? »

Wafika et Hassan Jawad devant un mur qui a été frappé par un obus israélien à Aïta el-Chaab, le 27 novembre 2023. Photo Olivia Le Poidevin

Depuis 50 jours, le sud du Liban est le théâtre d'échanges de tirs quotidiens entre le Hezbollah et l'armée israélienne. Samedi et dimanche, certains habitants, parmi les dizaines de milliers qui ont dû fuir leurs domiciles en raison des combats à la frontière avec Israël, sont cependant rentrés chez eux. Pendant les trois premiers jours de la trêve de quatre jours entre Israël et le Hamas, L'Orient Le Jour a visité certains villages du Sud.

« Tous les deux ans, nous sommes attaqués »
À Dhaïra, il y a des habitations sans le moindre signe de vie. Les volets métalliques de la plupart des magasins étaient fermés. Depuis des semaines, la majorité des habitants sont partis. Ils sont parmi les quelque 50 000 personnes déplacées du Sud, selon les Nations unies. Mais tout le monde n'a pas réussi à s'échapper. Au moins 13 civils ont été tués au Liban, selon l'agence Reuters.

Dans ce village sunnite, les dégâts causés par les frappes israéliennes sont palpables. Des oliviers ont été brûlés, des murs percés et une route présentait une crevasse peu profonde à l'endroit où un obus l'avait frappée. Trois soldats de l'armée libanaise se trouvaient au milieu de la route. Ils ont affirmé que les restes d'un obus métallique, observés dans l'herbe au bord de la route, provenaient d'une bombe au phosphore. L'Orient Le Jour n'était pas à même de vérifier cette information, bien que de nombreux rapports de notre journal, d'Amnesty International et de Human Rights Watch accusent Israël d'avoir utilisé du phosphore blanc au Liban-Sud. 

Dans la place du village, le domicile d'une famille a été gravement endommagé par l'explosion d'un obus israélien le 9 octobre. « J'étais arrivé chez moi 10 minutes avant que ma voiture ne soit touchée par un obus. Il n'y a pas de combattants dans cette maison, et il s'agit d'une voiture civile », a regretté un membre de la famille âgé d'une vingtaine d'années, qui a requis l'anonymat pour des raisons de sécurité. À l'extérieur se trouvent les restes de la voiture et de la cendre noire sur le sol et les murs de la maison.

Après le bombardement du 9 octobre, la famille a fui immédiatement et a trouvé refuge dans une école de Tyr. Le samedi 25 novembre, ils sont retournés chez eux pour la première fois afin d'évaluer les dégâts, en essayant de profiter de la trêve. Leur maison a été partiellement endommagée, de même que les panneaux solaires. « Lorsque nous sommes revenus dans notre village, tout avait changé. Certains habitants sont revenus et ont trouvé leurs maisons inhabitables... Nous repartirons si le cessez-le-feu n'est pas prolongé », a ajouté le membre de la famille.

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Ce village n'est pas étranger aux conflits. « La situation à Dhaïra fait pleurer. Nous ne sommes pas satisfaits de la façon dont les choses se passent ici. Tous les deux ans, nous sommes attaqués. Avant 2000, lorsque nous étions enfants, Dhaïra (à l'époque dans la zone occupée par Israël) était bombardé tous les jours. Puis, en 2006, nous avons de nouveau été attaqués », a ajouté le jeune homme. « Il est difficile de voir son village natal, où l'on est né et où l'on a grandi, attaqué de cette façon », a-t-il conclu.

Vers 13h, samedi, le calme précaire qui avait tenu pendant les dernières 24 heures de la trêve a été interrompu par le bruit des sirènes d'alarme qui a été rapidement suivi d'une détonation. Soudain, les habitants du village se sont précipités vers leurs voitures et ont pris hâtivement la route vers Tyr. Un porte-parole de l'armée israélienne, cité par le Haaretz, a déclaré qu'une « cible suspecte » en provenance du Liban s'était infiltrée en territoire israélien et avait été interceptée par l'armée de l'État hébreu. Le Hezbollah a déclaré à notre publication qu'il n'avait pas tiré de missiles contre Israël. Ce moment a servi de rappel aux habitants des villages frontaliers que la guerre est loin d'être terminée et que peu d'entre eux sauront quand ils pourront rentrer chez eux pour de bon.

« Personne ne nous aide »
Wafika et Hassan Jawad sont arrivés ce matin à Aïta el-Chaab, un village chiite, mais ils ne comptent pas rester : leur maison a été touchée par une frappe,  une partie du mur s'est effondrée et plusieurs vitres était brisées.  « Personne ne nous aide. Nous sommes livrés à nous-mêmes et nous vivons dans les écoles (ouvertes près de Tyr pour abriter les déplacés du Sud). Seuls les scouts de l'association al-Rissala al-Islamiya sont là pour nous. Où est l’État ? » lâche Hassan Jawad, à côté de la façade de sa maison fissurée par le bombardement. « Tout ce que je veux, c’est que cette trêve perdure », lance sa femme, qui rassemble les habits d'automne à emporter. 

La bourgade chrétienne de Aïn Ebel a vu partir environ 70 % de ses 4 000 habitants, selon son maire, Imad Lallous. Les rues y sont particulièrement calmes le dimanche. Seuls le son des cloches et le bruit des voitures se dirigeant vers l'église pour la messe dominicale se font entendre. Cet endroit n’a pas été directement visé par les frappes israéliennes. Pour autant, huit roquettes sont tombées sur la localité, probablement le résultat de tirs ratés du Hezbollah, explique le maire à L'OLJ. « Les dernières semaines ont été très difficiles. Nous avons vu des roquettes toucher deux maisons », ajoute-t-il.

Quelques habitants sont en train de réparer les dégâts dus aux tirs. Il y a quelques semaines, Wadih Diab était sorti de chez lui dix minutes avant qu’une roquette ne s’abatte sur sa maison. « Grâce à Dieu, quand la roquette est tombée, il n'y avait personne, on l'a échappé belle », raconte-t-il. Wadih explique que six roquettes sont tombées chez lui, parmi lesquelles trois n'ont pas explosé. Ce week-end, il a réparé un des murs endommagés. « C'est le Hezbollah... Qui d'autre fait la guerre ? Ou alors les factions palestiniennes, ou le mouvement Amal... Qui d'autre ? Ces roquettes provenaient du Liban, » assure-t-il. Maintenant, les questions commencent : qu'est-ce qui se passera si la trêve ne continue pas ? Déjà, il y a des craintes, quant à l'impact à long terme, que ce village ne sera peut-être pas le même qu'avant.

« C'était horrible. Presque tout le monde est parti et je crains que si la guerre continue, les gens ne reviennent pas, » affirme le maire, en soupirant. « Ceux qui sont restés sont des personnes âgées. Ils n’ont pas les moyens d’aller à Beyrouth. D'autres familles ont perdu leurs revenus. C'est la saison de la récolte des olives et nous en avons perdu les deux tiers. Les gens n’ont donc pas d’argent pour acheter de la nourriture, » ajoute-t-il.  Imad Lallous affirme toutefois qu'un plan d'urgence a été mis en place si la guerre continue : « Nous espérons obtenir davantage d’aide. Nous n’avons pas d’abris, alors nous tentons d’élaborer un plan pour utiliser certains sous-sols. »

Depuis 50 jours, le sud du Liban est le théâtre d'échanges de tirs quotidiens entre le Hezbollah et l'armée israélienne. Samedi et dimanche, certains habitants, parmi les dizaines de milliers qui ont dû fuir leurs domiciles en raison des combats à la frontière avec Israël, sont cependant rentrés chez eux. Pendant les trois premiers jours de la trêve de quatre jours entre Israël et le...

commentaires (5)

HN ne cesse de le répéter à qui veut l’entendre: L’Etat c’est moi, la république c’est moi, et j’ajouterai Dieu le père c’est moi aussi, puisqu’il arrive à décider de la vie et de la mort de millions de têtes de pipes sans que cela ne choque ses alliés et partenaires de toujours qui représentent le pouvoir usurpé de notre pays, impotents et lâches mais surtout fiers de l’être. Ils ne comptent s’arrêter en si bon chemin, regardez-le à se démener pour achever la seule institution qui tient encore à peine debout et vous comprendrez si vous décidez de comprendre qu’ils sont là pour vous achever

Sissi zayyat

11 h 14, le 27 novembre 2023

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Commentaires (5)

  • HN ne cesse de le répéter à qui veut l’entendre: L’Etat c’est moi, la république c’est moi, et j’ajouterai Dieu le père c’est moi aussi, puisqu’il arrive à décider de la vie et de la mort de millions de têtes de pipes sans que cela ne choque ses alliés et partenaires de toujours qui représentent le pouvoir usurpé de notre pays, impotents et lâches mais surtout fiers de l’être. Ils ne comptent s’arrêter en si bon chemin, regardez-le à se démener pour achever la seule institution qui tient encore à peine debout et vous comprendrez si vous décidez de comprendre qu’ils sont là pour vous achever

    Sissi zayyat

    11 h 14, le 27 novembre 2023

  • Il y en a qui ne manquent pas de culot avec leurs questions

    Zampano

    08 h 22, le 27 novembre 2023

  • « Où est l’État ? » Bonne question!. En fait, c’est celle que tout le monde se pose. A Aïn Ebel "huit roquettes sont tombées sur la localité, probablement le résultat de tirs ratés du Hezbollah \". Tirs du Hezbollah? Sans doute. Ratés? Pas sûr! Aïn Ebel est un village chrétien dont less habitamts ne dont pas tous des adorateurs de Hassan Nasrallah!

    Yves Prevost

    07 h 28, le 27 novembre 2023

  • " Où est l’État ? " Faut aller voir du côté de Hassouna, sur la route vers Jerusalem...

    Fadi Chami

    07 h 02, le 27 novembre 2023

  • Ou est l’état? Réponse qui le phagocyte? Tout les 2 ans on est attaqué? Réponse Pourquoi et à cause de qui ??? celui qui sème le vent ne peut que récolter la tempête. A l’heure d’internet et de la communication continue il est dur de constater combien la masse de la population ne parvient pas à un minimum de logique .. et cela est valable partout dans le monde

    Liban Libre

    00 h 09, le 27 novembre 2023

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