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Économie - Marchés publics

Services postaux : LibanPost obligé de tenir la barre encore quelque temps

Le gouvernement a décidé de reporter sa décision au sujet du contrat de gestion des services postaux ; le ministre des Télécoms s'interroge sur la position de Ghana Post sur ce dossier.

Services postaux : LibanPost obligé de tenir la barre encore quelque temps

Un couloir dans le bâtiment de la direction générale des services postaux au Liban. Photo : P.H.B.

Le dossier était bien inscrit à l'ordre du jour, mais le Conseil des ministres, réuni mercredi, n’a toujours pas décidé s’il allait annuler ou confirmer le contrat de gestion des services postaux remporté par Merit Invest - la holding libanaise de la famille Saadé qui détient le géant français du transport et de la logistique CMA CGM - et sa filiale Colis Privé.

La question a été examinée par les ministres, en présence notamment du président de l’Autorité de régulation des marchés publics, Jean Ellié, et du président de la Cour des comptes, Mohammed Badran. Cependant, à l’issue d’une séance houleuse pendant laquelle le ministre de Télécoms et le juge ont affiché des positions totalement antagonistes, l’exécutif a décidé de reporter sa décision à la prochaine réunion.

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Avenir incertain

Le contrat entre l’État et le successeur de LibanPost n’est donc pas signé et son avenir est même devenu incertain depuis la publication, en septembre dernier, d’un rapport de la Cour des comptes épinglant la façon dont le ministère des Télécoms a attribué le marché. Saisie après la proclamation des résultats de l’appel d’offres, l’Autorité de régulation des marchés publics avait, elle aussi, rendu un avis défavorable.

Contacté par L’Orient-Le Jour, le ministre sortant des Télécoms, Johnny Corm, a confirmé le report, indiquant qu’entretemps ce serait toujours la société LibanPost, détenue par le groupe Saradar et la holding M1 de la famille du Premier ministre sortant Nagib Mikati, qui tiendrait la barre.

Selon une source proche de la société qui souhaite rester anonyme, les effectifs de LibanPost ont été divisés par deux depuis le début de la crise économique en 2019. Merit Invest n’a pas fait de déclaration publique sur ce dossier, et le groupe Saradar que nous avons contacté, n’a pas souhaité faire de commentaire.

Les services postaux sont gérés depuis 1998 par la société LibanPost, dont le contrat a été renouvelé plusieurs fois. Depuis fin 2019, période à laquelle le Liban commençait à s’enfoncer dans la crise, le dernier contrat signé entre l’État et la société a été prolongé à vue.

En mai 2022, l’exécutif a fini par approuver le lancement d’un nouvel appel d’offres afin de remettre le marché en jeu. Depuis, trois appels d’offres ont été lancés, l'un n’a attiré aucune candidature, un second a été remporté par Merit Invest et Colis Privé qui a finalement été annulé, et la troisième procédure vacille depuis la proclamation des résultats. Parmi les autres particularités de ce dossier, revient le nom de Ghana Post, une société qui a retiré le cahier des charges à chacune des procédures lancées, n’a jamais présenté d’offre et a même déposé un recours, rejeté, contre le résultat de la troisième procédure devant le Conseil d’État pour contester le délai accordé pour le dépôt des offres.

Lettre de Wissam Achour 

Ghana Post Company est présidée par l'homme d'affaires libanais Wissam Achour, qui possède également le groupe hôtelier Lancaster et la société Nevada S.A.L., qui gère depuis cette année les espaces restauration de l’Aéroport international de Beyrouth. Or le ministre des Télécoms, cité par le journal Nidaa el-Watan dans son édition de jeudi, s'était dit « convaincu » que certaines parties cherchent à « détruire » le secteur des services postaux pour permettre à Wissam Achour de remporter ce marché « gratuitement ».

Toujours selon Nida' el-Watan, l’homme d’affaires serait entré en contact avec le ministre après l’ouverture des plis de la deuxième procédure d’attribution, soit au début du printemps dernier. Il lui aurait alors demandé de modifier le cahier des charges de façon à fixer à 7 %, au lieu de 10 % la part minimum des revenus tirés de la gestion des services postaux (calculées selon certains critères) que les opérateurs intéressés devaient s’engager à verser à l’État.

Wissam Achour a finalement réagi dans une lettre rédigée par son avocat, Fady Jamaleddine, et envoyée aux médias jeudi soir. Il affirme qu’après « l’échec des deux premières procédures d’attribution en raison de l’absence de candidats (…) , un des proches du ministre des Télécoms, qui est aussi conseiller d’un autre ministre du gouvernement sortant », lui a demandé « d’envoyer par téléphone les suggestions que Ghana Post jugeait adaptées pour renforcer l’attractivité de la procédure ».

Wissam Achour a envoyé les suggestions demandées au ministre des Télécoms « via WhatsApp ». Le courrier ajoute que Wissam Achour a ensuite rendu visite au même ministre en compagnie du conseiller – qu’il n’a pas nommé -, avant que la troisième procédure n’arrive à son terme, et ce pour les « exposer de vive voix ». Il conclut en assurant qu’il n’y a eu aucun autre contact avec le ministre.

Johnny Corm confirme avoir tenu les propos que lui attribue Nida' el-Watan et ne conteste pas le contenue de la lettre de Wissam Achour. « Après l’échec des deux premiers appels d’offres, nous avons demandé l’avis de toutes les sociétés qui s’étaient porté candidates, en accord avec Jean Ellié », explique-t-il. « Le problème, c’est que Ghana Post a retiré le cahier des charges à chaque procédure lancée mais n’a jamais déposé d’offre. Ce qui devrait vouloir dire qu’elle n’était pas intéressée par ce marché même aux conditions que nous avions fixées lors de la troisième tentative », poursuit le ministre.

Il conclut : « la question que je me pose face à ces éléments est pourquoi Ghana Post a ensuite demandé à prolonger le délai accordé pour le dépôt des offres lors de la troisième procédure si les conditions fixées ne lui convenaient pas ? » Il conclut en indiquant que Jean Ellié lui-même a considéré dans son rapport final que la prolongation demandée par Ghana Post n'était pas justifiée. 

Le dossier était bien inscrit à l'ordre du jour, mais le Conseil des ministres, réuni mercredi, n’a toujours pas décidé s’il allait annuler ou confirmer le contrat de gestion des services postaux remporté par Merit Invest - la holding libanaise de la famille Saadé qui détient le géant français du transport et de la logistique CMA CGM - et sa filiale Colis Privé.La question a été...

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