Plus d’une semaine après la frappe qui a touché l’hôpital al-Ahli Arab dans la ville de Gaza le mardi 17 octobre au soir, différentes analyses continuent d’apporter chacune son lot de nouveaux éléments. Le Washington Post révèle ainsi que la salve de roquettes lancées depuis la bande de Gaza contre Israël avait été tirée dans la direction de l’établissement 44 secondes avant l’explosion survenue dans le parking d’al-Ahli, pouvant « étayer l'affirmation d'Israël et du gouvernement américain selon laquelle une roquette lancée par un groupe armé palestinien serait à l’origine de l’explosion ». Sur la base des éléments vérifiés et faute de preuve visuelle qu’une roquette a touché la zone de l’hôpital, le quotidien n’exclut pas cependant qu’« un projectile qui n’aurait pas été vu, tiré d’un autre endroit », soit en cause.
Une vidéo diffusée par la chaîne de télévision israélienne Keshet 12 News a permis au quotidien américain de localiser l’origine du lancement des roquettes à près de 5 kilomètres au sud-ouest de l’hôpital, confirmant l’origine évoquée par l’armée israélienne de l’engin dysfonctionnel mis en cause dans l’explosion, précise le Washington Post. Deux experts interrogés par le journal indiquent en outre qu’une ou plusieurs de la douzaine de roquettes tirées en salve pendant 14 secondes, aurait eu le temps d’atteindre l’hôpital, estimant le délai entre le lancement et l’impact entre 25 et 45 secondes. Le média ne précise pas si les calculs de cette trajectoire ont été faits en considérant l’établissement comme cible des roquettes ou en prenant en compte un dysfonctionnement, et si oui, à quel moment. Il reconnaît cependant qu’« il n’y a pas de preuve visuelle qu’une d’entre elles ait défailli et se soit écrasée ».
Encore aucune certitude
Si aucun de ces spécialistes ne peut affirmer avec certitude quel projectile a été utilisé ou qui l’a lancé, il ressort de leur analyse du lieu de l’impact et de ses dégâts qu’une frappe aérienne est exclue, tandis qu’une frappe de roquette correspondrait. Se basant sur les vidéos disponibles, un des experts interrogés a affirmé que la fréquence croissante du son produit par le projectile arrivant sur l’hôpital indiquait qu’il accélérait, suggérant qu’il tombait verticalement. Une trajectoire qui correspondrait à celle d’une roquette dysfonctionnelle tombant du ciel. Contrairement à l’analyse de Forensic Architecture, qui s’est servi des traces de fragmentation laissées par l’impact du projectile sur le parking de l’hôpital pour situer sa provenance au nord-est de l’établissement, les experts consultés par le Washington Post ne sont pas tombés d’accord sur l’importance de cet élément de preuve. Interrogé par le journal, un porte-parole de l’armée israélienne a refusé de commenter l’utilisation par l’État hébreu de munitions classifiées comme roquettes depuis le début de la guerre.
Au vu de l’incendie instantané provoqué par l’impact et des dégâts structurels limités, un expert consulté par le média américain pointe du doigt une munition chargée de fuel qui serait tombée prématurément au sol, soulignant les similitudes avec les impacts des obus d’artillerie de 155 mm de l’arsenal israélien, tout en précisant que d’autres armes pouvaient avoir le même effet et que la boule de feu observée dans les vidéos n’aurait pas pu être causée par ces munitions. Trois jours avant le drame, des représentants de l’hôpital avaient fait état d’un projectile ayant atterri dans une salle réservée aux examens par ultrasons, qui était un obus d’éclairage de 155 mm, rappelle le Washington Post. Un porte-parole militaire israélien, Jonathan Conricus, s’est justifié au quotidien : « Si un obus d’artillerie a atterri là, c’était probablement le résultat d’une défaillance ou d’un atterrissage après son lancement, mais il ne visait certainement pas l'hôpital. »
Le quotidien cite par ailleurs le bilan d’« au moins 100 morts », fourchette basse des estimations américaines des victimes de la frappe, tandis que le ministère de la Santé du Hamas avait donné le chiffre de 471 personnes tuées dès le lendemain de l’explosion. Il appuie en outre les révélations du New York Times, qui a affirmé que le projectile désigné sur les vidéos par Israël et les États-Unis comme ayant provoqué le drame avait en réalité été tiré depuis l’État hébreu. Le Washington Post précise que l’engin en question aurait été lancé d’une localisation proche d’une batterie du système de défense aérien du Dôme de fer, suggérant d’après certains experts un missile d’interception Tamir, qui aurait détruit une roquette en plein vol au-dessus d’Israël, à moins de 2 kilomètres de la frontières avec Gaza, sans aucun lien avec l’explosion d’al-Ahli. Jonathan Conricus, porte-parole militaire israélien, a déclaré au journal qu’aucune interception n’avait été conduite à ce moment-là, tandis que les renseignement américains ont refusé de commenter, réitérant leur conclusions basées entre autres sur des conversations téléphoniques non divulguées. Selon un des experts interrogés par le Washington Post, le projectile aperçu sur la vidéo est « un propulseur de roquette qui montre un changement de trajectoire soudain et assez violent, qui correspondrait à une défaillance de la surface de commande, suivi d'une pluie d'étincelles quelques secondes plus tard, correspondant à une désintégration structurelle en vol ».
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Les analyses des vidéos et de l'impact tendent fortement à accréditer la thèse israélienne. Mais l'argument le plus convaincant dans ce sens est d'un autre ordre. Un missile. une bombe ou une roquette explosent (ou non), mais ne se désintègrent pas. il reste toujours des débris facilement identifiables. Si les palestiniens ont refusé de les laisser voir, c'est que leur examen aurait prouvé leur mensonge.
Yves Prevost
07 h 48, le 28 octobre 2023