Rien de nouveau sous le soleil

Le peuple libanais est divisé sur la cause palestinienne. Rien de nouveau.

D’une part, rien de nouveau dans le langage nauséabond de certains Libanais sur le massacre des civils palestiniens.

Rien de nouveau dans un « bon débarras » ! « ils le méritent bien» ! inhumains.

Rien de nouveau dans le silence qui pue la peur d’être rejeté par sa propre communauté.

D’autre part, rien de nouveau dans la dérision crachée par les pseudo-gauchistes sur ceux qui craignent une nouvelle guerre.

Rien de nouveau dans leur banalisation des traumas de la guerre civile libanaise.

Rien de nouveau dans leur refus d’aller au fond des choses.

Aux premiers, je dis sans aucune réserve : si Dieu vous a créés à son image, vous ne la reflétez plus, votre foi n’est qu’un vernis et votre identité religieuse n’est qu’une excuse pour justifier votre haine envers vos concitoyens qui vous ressemblent bien plus que les Occidentaux que vous adulez par autodétestation.

Aux seconds, votre ouverture d’esprit et votre progressisme ne sont que des prétentions tant que vous êtes incapables de prendre en considération les blessures profondes qui font dire aux premiers ces propos inhumains, non pas pour les excuser mais pour changer votre rhétorique qui, elle aussi, comme la leur, contribue à notre division.

C’est facile (et au passage, insensible) de demander au gens d’arrêter de « jouer aux traumatisés », d’oublier les horreurs de la guerre civile, de mettre de côté leur ressentiment, de ravaler leur peur, de nier leur douleur.

Qu’est-ce qu’on a fait depuis les accords de Taëf pour guérir en tant que peuple ? Pour réconcilier les différentes communautés ? Pour réconcilier les Libanais et les Palestiniens ? Pour reconnaître la douleur des Libanais musulmans, des Libanais chrétiens et des Palestiniens ?

Tour à tour, victimes et bourreaux.

Quelle éducation conciliatrice a-t-elle regroupé les témoignages des uns et des autres, d’un camp et des autres, afin que les jeunes puissent surmonter l’amertume de leurs parents, afin qu’ils ne régurgitent pas aveuglément leur rancœur ?

Quel discours a-t-il rendu justice aux blessures des uns et des autres ? Quelle parole les a-t-elle reconnues ?

Quel seigneur de guerre a-t-il été condamné ?

Si les soulèvements du 17 octobre 2019 ont délié les langues et enclenché des discussions sur la guerre civile, les circonstances adverses qui ont suivi n’ont pas permis aux acteurs de la paix de mener à bon terme leur mission.

Encore une fois, on tombe dans le piège de l’affrontement entre citoyens, et c’est une stratégie que la classe politique a tellement bien mise en place qu’elle n’a plus besoin de se prononcer pour la déclencher.

Au lieu de demander des comptes aux hommes politiques pour leur laxisme, leur silence, l’absence d’une condamnation des horreurs infligées par l’État israélien, l’absence d’un positionnement intransigeant sur la scène politique mondiale, nous ressortons les boucs émissaires de leurs camps de misère pour les flageller sur les agoras numériques, nous allons chercher la petite bête pour justifier notre haine et masquer la douleur qui creuse nos entrailles. Quand est-ce que nous allons comprendre que l’enfer du peuple libanais ne vient pas d’un autre peuple ?

L’enfer du peuple libanais a été créé et maintenu par les seigneurs de la guerre civile. Par le leader de ta confession religieuse, cher lecteur, ce leader qui accuse la classe politique tout en en faisant partie !

Le silence des seigneurs de la guerre civile libanaise et leur inaction ne sont plus surprenants, mais n’oublions pas qu’ils sont toujours condamnables et que la destruction résultant des manifestations récentes leur incombe, elle se rajoute à la liste interminable de leurs crimes contre nous.

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