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Société - Repère

Deux mois après la mort d’Élias Hasrouni, où en est l’enquête ?

« L’Orient-Le Jour » revient sur la chronologie des faits.

Deux mois après la mort d’Élias Hasrouni, où en est l’enquête ?

Un panneau à la sortie du village de Aïn Ebel, Liban-Sud. Photo L.A.

Retrouvé le 2 août août au bord d’une route de son village, à Aïn Ebel (Liban-Sud), Élias Hasrouni, un ancien responsable des Forces libanaises (FL), y aurait eu un accident de voiture mortel. Très vite, des éléments émergent rendant l’affaire suspecte.

Pourquoi Élias Hasrouni a-t-il emprunté cette route sortant de son itinéraire habituel ? Y suivait-il quelqu’un ? Des questions restées sans réponse avant qu’une vidéo, découverte quelques jours plus tard, ne change la donne. Le 9 août, une enquête est ouverte par les Forces de sécurité intérieure (FSI). Que sait-on sur ce décès suspect ? L’Orient-Le Jour reprend la chronologie des faits et fait le point sur l’enquête

Chronologie des faits

2 août : découverte du corps

Vers 21h45, le corps d’Élias Hasrouni est retrouvé sur une colline, près de sa voiture. Son 4x4 semble avoir glissé de la route, qui mène aux villages voisins. Le septuagénaire est transporté par ambulance vers l’hôpital Salah Ghandour, à Bint Jbeil.

Selon le premier rapport du médecin légiste, que L’OLJ a pu consulter, Élias Hasrouni est arrivé « mort ». L’équipe médicale tente de le réanimer. « Vers 22h30, on m’informe de la mort de mon père », explique le fils de la victime, Charbel Hasrouni, qui s’était rendu sur place.

En parallèle, la police arrive sur le lieu de l’accident pour retirer la voiture, dont les airbags ont été déclenchés, mais Imad Lallous, président de la municipalité de Aïn Ebel, insiste pour qu’une brigade criminelle inspecte la scène.

L’armée finit par sécuriser la zone jusqu’au lendemain, le temps que la brigade arrive, pour trouver des indices et relever des empreintes. La voiture est alors envoyée au commissariat de Aïn Ebel, puis aux services de renseignements de Saïda.

Dans un ravin, sous cette route, près de Aïn Ebel, a été découvert le corps d'Élias Hasrouni. Photo L.A.

3 août : première autopsie

Un médecin légiste examine le corps. Il conclut qu’Élias Hasrouni est mort d'étouffement suite au choc de l’accident, qui a mené à de multiples fractures des côtes et du thorax gauche. Le médecin indique également qu’il n’a décelé aucune trace de violence, notant seulement une « égratignure superficielle qui saignait au niveau de l’arrière du crâne ».

5 août : découverte d’une vidéo de surveillance

Depuis sa mort, les interrogations fusent. Certains tentent de comprendre pourquoi Élias Hasrouni a emprunté cette route en pleine nuit. Son neveu et sa nièce font le tour des caméras de surveillance.

À la veille de l’enterrement, ils montrent à Imad Lallous une vidéo prise par la caméra d’une maison voisine. Sur les images (une vidéo d’environ 40 secondes fuite dans les médias le 9 août), on aperçoit un tout-terrain s'arrêtant brusquement devant la voiture d’Élias Hasrouni, alors qu’une seconde le suit pour l’empêcher de faire marche arrière, à 400 mètres de chez les Hasrouni. Soudain, des hommes sortent du véhicule, ouvrent la porte de la voiture prise en embuscade, et l’un d’entre eux prend le volant, alors que les autres s'apprêtent à déguerpir. Le corps est retrouvé 1,8 kilomètre plus loin. « L’enlèvement a eu lieu à 9h06, soit 40 minutes avant que le corps de mon père ait été retrouvé », raconte Charbel Hasrouni.

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9 août : ouverture de l’enquête, réactions politiques

Charbel Hasrouni porte plainte contre X pour l’enlèvement et la mort de son père au commissariat du village, le 7 août. Deux jours plus tard, une enquête est ouverte par la police.

Dans un communiqué publié le même jour, le chef des FL, Samir Geagea, appelle les FSI à faire rapidement la lumière sur cette affaire « étant donné la sensibilité de la situation à Aïn Ebel et dans les villages voisins, et des conséquences potentielles de ce crime si les auteurs ne sont pas identifiés ».

Le chef du parti Kataëb, Samy Gemayel, réagit pour sa part dans un tweet : « Que Dieu ait pitié du martyr héroïque Élias Hasrouni qui a été victime d'une opération perfide des milices dans sa ville natale de Aïn Ebel, un endroit qu'il aimait et où il était aimé. » Avant d’ajouter : « La vérité est limpide, dans une zone sécurisée bien connue », en allusion à la forte présence armée du Hezbollah dans la région.

Ce même jour, la séquence de Kahalé — lorsqu’un camion de munitions du Hezbollah se renverse dans la localité entraînant des affrontements entre ses miliciens et des résidents - éclipse l’affaire Hasrouni.


Le ravin où a été retrouvé le corps et la voiture d'Élias Hasrouni, près de Aïn Ebel.

10 août : contre-autopsie, à la demande de la famille

Le corps d’Élias Hasrouni est déterré et transporté vers l’hôpital gouvernemental de Saïda, selon le rapport du médecin légiste (daté du 17/08 et qui démontre l’absence de trace de drogues ou de poison). Une patrouille des services de renseignements de Nabatiyé était présente lors de l’autopsie.

Si le premier rapport indique que l’étouffement est du au choc à l’intérieur de la voiture, le second évoque lui la « présence de contusions liées à un coup très fort porté par un objet solide ». L'égratignure à la tête aurait elle aussi été causée par un coup.

14 août : les FL accusent le Hezbollah

Le même jour, le ministre sortant de l’Intérieur, Bassam Maoulaoui, avance que certaines informations suggèrent que les partis politiques ne sont pas impliqués dans le crime, mais que l’enquête est toujours en cours.

Samir Geagea, lui, accuse le Hezbollah d’être impliqué dans la mort d’Élias Hasrouni, utilisant le terme de « crime prémédité ». Contactée, la porte-parole du Hezbollah, Rana Sahili, a affirmé que cette affaire ne les concernait « ni de près ni de loin ».

« C’est un assassinat politique, c’est pour cela que personne n’a été arrêté, comme dans le cas de Lokman Slim », estime auprès de L’OLJ Charles Jabbour, porte-parole FL, soulignant le rôle influent de la victime dans sa localité.

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Où en est l’enquête ?

Qui est chargé de l’investigation ?

Ce sont les services de renseignements des FSI qui en sont chargés. Selon Éliane Fakhry, avocate de la famille Hasrouni, l’affaire est entre les mains de la procureure générale de Nabatiyé, sous la supervision de la juge Ghada Abou Alouan.

L’enquête est-elle à l’arrêt ?

Le 22 septembre, Samir Geagea a annoncé que les autorités avaient informé son parti qu’elles n’étaient « plus en mesure de poursuivre l'enquête… parce qu'elles en sont empêchées ». « Les FSI ne sont pas autorisées à se rendre dans les villages d’où sont parties les voitures (que l’on voit dans la vidéo) et elles ont peur d’y aller », avance Charles Jabbour ajoutant que « toute cette région est au Hezbollah ». Le ministère de l’Intérieur a lui démenti, en assurant que « l’enquête se poursuit ». Même son de cloche auprès d’une source judiciaire.

Qui a été interrogé ?

Imad Lallous rapporte que des résidents et des membres de la famille ont été interrogés. Le 24 septembre, c’était au tour d’Yvette Hasrouni d’être entendue par les services de renseignements à Saïda. « Ils m’ont posé des questions de routine, tout ce que je leur ai dit était déjà connu », partageait-elle à L’OLJ, avant d’elle-même trouver la mort dans un accident de voiture, le 3 octobre. Du côté de Bint Jbeil, le président de la municipalité, Afif Bazzi, a rapporté ne pas avoir eu vent d’interrogatoires menés dans sa localité ou d’envois de vidéos de surveillance.

Et maintenant ?

La semaine dernière, l’avocate de la famille Hasrouni a demandé à ce que le dossier soit transféré à Beyrouth « pour des raisons sécuritaires et parce que l’investigation n’avance pas ». Le ministre sortant de la Justice, Henri Khoury, aurait accepté la requête, qui doit également être approuvée par le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate. 

Retrouvé le 2 août août au bord d’une route de son village, à Aïn Ebel (Liban-Sud), Élias Hasrouni, un ancien responsable des Forces libanaises (FL), y aurait eu un accident de voiture mortel. Très vite, des éléments émergent rendant l’affaire suspecte.Pourquoi Élias Hasrouni a-t-il emprunté cette route sortant de son itinéraire habituel ? Y suivait-il quelqu’un ?...

commentaires (3)

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K1000

10 h 29, le 08 octobre 2023

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Commentaires (3)

  • Le%20nom%20de%20Ghassan%20Oueidate%20appara%C3%AEt%20partout.%20Cet%20homme%20a%20un%20r%C3%B4le%20cl%C3%A9%20au%20sein%20de%20la%20justice%20libanaise.%20Nous%20n%E2%80%99oublions%20pas%20le%20r%C3%B4le%20n%C3%A9faste%20qu%E2%80%99il%20joue%20dans%20de%20nombreuses%20affaires.

    K1000

    10 h 29, le 08 octobre 2023

  • Comme d'habitude, il n'y aura ni vraie enquête ni justice car ce sont les mêmes qui opèrent pour assassiner ceux qui s'opposent à leur hégémonie ...

    Zeidan

    09 h 27, le 08 octobre 2023

  • Ce sont les neveu et nièce de la victime qui ont - malheureusement pour les miliciens criminels - recherché les vidéos des caméras de surveillance, pas les "enquêteurs" dont la cinsigne était ... de ne pas enquêter! Depuis, les "enquêteurs" ont poursuivi leur mission en se gardant d'interroger tous les éventuels témoins. Il est, évidemment plus sensé de croire Geagea qui affirme que "Les FSI ne sont pas autorisées à se rendre dans les villages d’où sont parties les voitures" plutôt que Maoulaoui qui prétend que l'emquête se poursuit!

    Yves Prevost

    07 h 56, le 08 octobre 2023

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