Rechercher
Rechercher

Société - Liban

Le ministre de la Justice défère le Club des juges devant l’Inspection judiciaire

La démarche d'Henri Khoury, qui avait interdit en avril aux magistrats de s’exprimer en public sans autorisation préalable, est vivement critiquée par les défenseurs d’une justice indépendante.


Le ministre de la Justice défère le Club des juges devant l’Inspection judiciaire

Le Palais de justice de Beyrouth. Photo d'archives ANI

Le ministre libanais sortant de la Justice, Henri Khoury, a déféré mercredi devant l’Inspection judiciaire (IJ) quelque 114 magistrats, membres du Club des juges, pour n'avoir pas respecté une décision du ministre relative aux médias. Cette association se consacre à la lutte contre la corruption, en défendant les droits du corps de la magistrature et son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique.

L’information a suscité un énorme tollé dans les milieux de la justice, d’autant que le Club des juges, fondé en 2018, et membre de l’Union internationale des magistrats (94 associations à travers le monde), est considéré par certains comme « une voix libre » indispensable dans le contexte actuel de justice déliquescente qui nécessite des réformes urgentes.

Pour mémoire

Le Club des juges, pour faire face à la violation des droits des magistrats et à la corruption

En avril dernier, M. Khoury avait publié une circulaire dans laquelle il interdisait aux magistrats d’« apparaître dans les médias et (d’)y donner leur avis sans avoir obtenu une autorisation préalable ». Le Club des juges ne s’est pas conformé à cette instruction, poursuivant, à travers des communiqués diffusés sur les réseaux sociaux et dans les supports médiatiques, l’affichage de ses positions critiques contre une justice sclérosée par l’ingérence de la politique.

La décision de déférer quelque 114 magistrats devant l’Inspection judiciaire avait été précédée il y a quelques mois par au moins deux convocations du président du Club des juges, Fayçal Makki. Selon nos informations, aucune mesure n’a été prise à ce jour contre lui.

« Obligation de réserve »

ll y a une semaine, l’ensemble de l’association a été ciblée par le ministre Khoury, qui aurait soumis à l’IJ tous les communiqués publiés par le Club des juges, récents et anciens. En tant que représentante de ces membres, la commission administrative du Club des juges a comparu mercredi, quelques jours après avoir été notifiée de l’audience. Outre Fayçal Makki, Paula Haykal (vice-présidente), Nadine Rizk, Marianne Anani, Joseph Tamer, Tarek Bou Nassar, Fatmé Majed et Noureddine Sadek ont été entendus par un inspecteur judiciaire chargé par la chef de l’IJ par intérim, Samar Sawah, de se pencher sur l’affaire. Aucun résultat n’a filtré de l’audience, et aucune nouvelle date n’a été fixée pour une nouvelle séance d’enquête.

La démarche du ministre de la Justice a été vivement critiquée sur un grand groupe WhatsApp composé, outre de membres du Club des juges, de nombreux magistrats, qui ont exprimé leur solidarité à l’association.

L’Orient-Le Jour a tenté sans succès de joindre Henri Khoury. Une source qui lui est proche affirme que les magistrats mis en cause « violent leur obligation de réserve ».

« Une voix libre »

Plusieurs magistrats contactés par L’OLJ affirment que l’attitude du ministre contredit le droit à la liberté d’expression. « Il est dérangé par la voix d’une justice libre », tonne l’un d’eux, notant que « plutôt que de défendre la justice contre l’immixtion des hommes politiques, il veut sanctionner les juges qui se battent contre cette ingérence ».

Un magistrat s’attarde plus particulièrement sur « des confrères qui ont commis des violations dans des dossiers sensibles, comme celui de la double explosion au port de Beyrouth » le 4 août 2020. « Le ministre Khoury ne les a pas déférés devant l’IJ », constate-t-il. Et d’expliciter : « Le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, avait libéré en janvier dernier 17 détenus dans l’affaire, alors que la loi édicte que seul le magistrat (en l’occurrence Tarek Bitar) qui ordonne leur arrestation peut les relâcher. »

« De même, M. Khoury n’a pas déféré l’avocat général près la Cour de cassation, Imad Kabalan (actuellement à la retraite), qui avait autorisé un peu plus tôt un média à interroger, de l’intérieur de la prison, des détenus mis en cause, notamment des fonctionnaires du port », ajoute-t-il.

L'enquête sur la tragédie du 4 août est paralysée par les innombrables entraves à caractère politique ou administratif mises devant l'action du juge Bitar.


Le ministre libanais sortant de la Justice, Henri Khoury, a déféré mercredi devant l’Inspection judiciaire (IJ) quelque 114 magistrats, membres du Club des juges, pour n'avoir pas respecté une décision du ministre relative aux médias. Cette association se consacre à la lutte contre la corruption, en défendant les droits du corps de la magistrature et son indépendance...

commentaires (2)

Dis%20dinc%20l'IlJ%0AVous%20avez%20trouve%20le%20moyen%20de%20rendre%20nos%20messages%20illisibles%20%3F%3F%3F%3F%3F%3F%3F%3F

Michel Trad

20 h 08, le 05 octobre 2023

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • Dis%20dinc%20l'IlJ%0AVous%20avez%20trouve%20le%20moyen%20de%20rendre%20nos%20messages%20illisibles%20%3F%3F%3F%3F%3F%3F%3F%3F

    Michel Trad

    20 h 08, le 05 octobre 2023

  • Il%20reste%20encore%20quelques%20(tres)%20rares%20juges%20integres.%0A%0AIl%20faut%20absolument%20les%20museler.%0A%0ALa%20canaille%20politichienne%20mafieuse%20sait%20s'y%20prendre%20pour%20les%20reduire%20au%20silence.%0A%0AMais%2C%20ne%20vous%20trompez%20pas.%20Faute%20d'avoir%20refuge%20en%20justice%2C%20les%20citoyens%20humilies%20tous%20les%20jours%20finiront%20par%20se%20rendre%20justice%20eux-meme.%20La%20violence%20n'est%20pas%20loin....

    Michel Trad

    18 h 50, le 05 octobre 2023

Retour en haut