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Nos Lecteurs ont la Parole

Le métier d’homme


Sacré métier d’homme ! Joyeux et austère, il réclame un périlleux investissement de tous les instants. On ne peut le cerner en quelques lignes. Semblable tentative procéderait d’une belle naïveté. Cependant, essayons à tâtons de trouver les armes de nos combats.

L’existence et ses revers n’attendent guère. Le combat et la joie qui surgissent d’une blessure assumée au quotidien invitent à recommencer sans cesse, à renouveler l’effort, à se remettre en marche et à bâtir sur la faiblesse, la peur ou la déception. Bien des fois, on les espère vaincues. On veut se hâter et tourner la page. Mais les plaies, les souffrances reparaissent et traversent l’existence. Et on doit se battre contre l’esprit de pesanteur. Cette gangrène intérieure voudrait suivre des modèles, se cramponner aux fausses certitudes, prétendre tout maîtriser pour éviter la crainte qu’inspire cet éternel combat.

Sacré métier d’homme, nous devons être capables de combattre joyeusement sans jamais perdre de vue nos vulnérabilités, ni l’extrême précarité de notre condition. On doit inventer chacun de nos pas, et, forts de nos faiblesses, tout mettre en œuvre pour trouver les ressources d’une lutte qui nous dépasse sans toutefois nous anéantir.

« Les esprits valent selon ce qu’ils exigent. Je vaux ce que je veux. » Paul Valéry vient ici à la rescousse en rappelant l’importance de la volonté. La volonté maintient le cap, elle donne la force pour développer de nouvelles stratégies, bref, elle interdit d’abdiquer. Sans elle, ni combat ni victoire, l’affaire est entendue. Pourtant, les difficultés ne disparaissent guère, loin s’en faut. Les blessures accumulées épuisent, et nous nous trouvons souvent désemparés et désarmés. Sollicitée à l’extrême, la volonté s’étiole, risque de mourir. Vorace, elle cesse, sans nourriture, d’être motrice. Exigence redoutable, pénible routine, il faut lutter toujours.

Le tragique de l’existence rappelle qu’il faut célébrer les occasions de jubiler et de faire jubiler. Offrir la joie là où s’imposent d’aventure la pitié et la tristesse. Lutter pour la vie, ne pas macérer dans le mépris. S’appuyer sur les mille petites joies de notre condition. Le métier d’homme, sujet grave, austère parfois, réclame donc un engagement constant, une légèreté qui veut jeter un regard neuf sur le monde. Regard dépouillé de tout artifice, de toute règle, sauf, peut-être, en tenat compte du précepte de Chamfort : « La plus perdue de toutes les journées est celle où l’on n’a pas ri. » Le rire devient ici, avec la joie, l’arme que l’on oppose au découragement. À la différence de la moquerie, le rire rassemble, réunit, rend plus fort. Ultime audace, le rire brise la routine et met à distance l’épreuve. La vie devient douce grâce à l’humour.

Devant l’effort, lorsque tout réclame un labeur insensé, une seule certitude persiste donc : contre tout, avec humour, l’appel du métier d’homme se fait insistant. Au combat donc, car tout est à bâtir avec légèreté et joie.

Parlons en termes nietzschéens : une absence de haine, pas de traces de ressentiment, nulle colère, mais une immense, une incroyable adhésion à la vie, une coïncidence viscérale avec ce qui est. La malédiction d’une faiblesse infligée devient la chance d’une force créée.

Loin d’être haïssable, laissons notre « je » devenir la matière du monde et le moyen d’un salut éternel...

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Sacré métier d’homme ! Joyeux et austère, il réclame un périlleux investissement de tous les instants. On ne peut le cerner en quelques lignes. Semblable tentative procéderait d’une belle naïveté. Cependant, essayons à tâtons de trouver les armes de nos combats.L’existence et ses revers n’attendent guère. Le combat et la joie qui surgissent d’une blessure assumée au...

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