
L'ancien chef du Parti socialiste progressiste (PSP) Walid Joumblatt, et l'ancien patriarche maronite Nasrallah Sfeir, célébrant la "Réconciliation de la Montagne" à Moukhtara, le 2 août 2001. Photo d'archives L'OLJ
Vendredi, le patriarche maronite Béchara Raï a effectué une tournée symbolique dans la Montagne, une des seules régions libanaises à avoir mis en place un processus de « réconciliation » officiel entre ses habitants, au lendemain de la guerre civile (1975-1990). Cette région druzo-chrétienne, qui a connu plusieurs événements sanglants au cours de l'histoire et lors de la guerre libanaise, dont la fameuse Guerre de la Montagne, en septembre 1983, a été le théâtre d'une réconciliation historique en août 2001, venue couronner le processus de retour progressif de nombreux déplacés chrétiens qui avaient fui leurs villages à la suite de massacres en série perpétrés lors de ce conflit. Celui-ci avait opposé des miliciens chrétiens des Forces libanaises à une coalition de partis soutenus à l'époque par la Syrie, dont le Parti socialiste progressiste (PSP) du leader druze Walid Joumblatt. M. Joumblatt avait ensuite parrainé la réconciliation de 2001 aux côtés du patriarche maronite de l'époque, Nasrallah Sfeir.
Voici les dates clé des principaux événements qui ont marqué la région de la Montagne du conflit de 1983 à nos jours :
- 3 septembre 1983
Début de la Guerre de la Montagne, après le retrait de l’armée israélienne, qui avait envahi le Liban en 1982, entre notamment des miliciens druzes du Parti socialiste progressiste et des chrétiens des Forces libanaises. Plusieurs massacres sont perpétrés au cours de ce conflit dans diverses localités de la région, notamment à Bhamdoun, Brih ou encore à Kfarmatta.
Les chiffres officiels concernant les victimes des massacres ne sont pas connus, mais, selon certaines estimations, cet épisode aurait fait 2 500 morts des deux côtés.
La « guerre de la Montagne » a également provoqué le déplacement massif des populations chrétiennes du Chouf, de Aley et du Haut-Metn (caza de Baabda). Le nombre de personnes déplacées lors de cet épisode de la guerre civile est estimé à quelque 100.000.
L'ancien chef du Parti socialiste progressiste (PSP) Walid Joumblatt, et l'ancien patriarche maronite Nasrallah Sfeir, entourés d'élus de la région et de religieux chrétiens et druzes, lors de la "Réconciliation de la Montagne", le 2 août 2001 à Moukhtara. Photo d'archives L'OLJ
- 7 juillet 1992
Création du ministère des Déplacés, qui est chargé d'œuvrer au retour de tous les déplacés libanais de la guerre civile dans leurs régions d’origine et à des réconciliations entre ex-communautés rivales dans les localités ayant connu des violences.
- 2 août 2001
Après des années de retours progressifs, « la réconciliation de la Montagne », entre habitants druzes et chrétiens, est officiellement déclarée lors d'une grande célébration marquée par une visite historique du patriarche maronite Nasrallah Sfeir à Moukhtara, fief de Walid Joumblatt dans le Chouf. Cet événement marque un tournant dans les relations entre druzes et chrétiens et témoigne d'une volonté de tourner définitivement la page de la guerre. La réconciliation de 2001 a englobé la plupart des localités druzo-chrétiennes, sauf quelques villages mixtes « retardataires », comme Brih, Abey et Kfarmatta.
- 8 septembre 2007
À Kfarmatta, dans la région dite du Chahar el-Gharbi (caza de Aley) où de nombreux chrétiens avaient vu leurs habitations occupées par des druzes, la réconciliation a lieu le 8 septembre 2007, au Grand Sérail à Beyrouth, après une première tentative infructueuse en 2006, menée par Walid Joumblatt à Moukhtara.
Interrogés en 2018 par L'Orient-Le Jour, soit onze ans après la réconciliation, des habitants de Kfarmatta affirmaient que de nombreuses familles chrétiennes n'étaient toujours pas rentrées au village. Selon les habitants, tous les chrétiens avaient fini par récupérer leurs maisons, mais la mixité entre les deux communautés n'était toujours pas au rendez-vous. Selon certaines estimations, il y aurait eu 142 morts dans cette localité lors de la Guerre de la Montagne.
- 12 octobre 2010
Egalement dans la région du Chahar el-Gharbi, la localité de Abey, qui a connu de féroces batailles, signe enfin un accord de réconciliation, le 12 octobre 2010, au Grand sérail, parrainé par le ministère des Déplacés.
Les villages de Binnay et Aïn Drafil sont également inclus dans cet accord.
- 17 mai 2014
Dans le Chouf, Brih est la dernière localité druzo-chrétienne à signer un accord de réconciliation, le 17 mai 2014, au palais de Beiteddine, en présence du président de la République de l'époque, Michel Sleiman, et du leader druze Walid Joumblatt. Cette réconciliation avait été précédée par une série de réunions parrainées par le ministre des Déplacés Akram Chehayeb, un proche de M. Joumblatt.
- 30 juin 2019
Des propos du chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil, sur la Guerre de la Montagne et les affrontements de 1983, lors d'une visite à Kahalé (Aley), sont considérés comme visant à attiser les tensions confessionnelles.
Le lendemain, Gebran Bassil, qui effectue une tournée dans le caza de Aley, fait face à une violente contestation druze dans les villages où le PSP de Walid Joumblatt domine. Des blocages de route sont organisés à Kfarmatta et le convoi du ministre d’État pour les Affaires des réfugiés, Saleh Gharib, un proche du Parti démocrate de Talal Arslane qui venait de se réunir avec M. Bassil à Chemlane, est la cible de tirs mortels à son passage au niveau de la localité de Qabr Chmoun.
Deux gardes du corps de Saleh Gharib trouveront la mort lors de cet affrontement avec des partisans armés de Walid Joumblatt.
commentaires (1)
Ont ils seulement tiré des leçons les leaders de toutes les confessions? Nous sommes forcés à vivre ensembles en toute intelligence et civilité si nous voulons que notre pays survive à tous les assauts de tous les côtés qui viennent à chaque fois semer la zizanie en se servant de la religion comme d’une arme alors que le message des religions qui qu’elle soit est la paix et la fraternité. Tous ceux qui prêchent le contraire pour vous rapprocher de Dieu sont des diables en personne. Alors on se réveille et on lâche les leaders politiques véreux pour sauver notre pays, unis sous le même drapeau et dans un seul but, celui de faire revivre notre vieux Liban qu’ils nous ont volé avec notre argent.
Sissi zayyat
16 h 49, le 08 septembre 2023