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Politique - Décryptage

La vacance présidentielle s’installe... et le dialogue attend un déclic

Les espoirs, même modestes, placés dans la visite de l’envoyé présidentiel français Jean-Yves Le Drian à Beyrouth se sont évaporés. Même la possibilité de son retour au cours des prochaines semaines n’est plus considérée comme étant en mesure de provoquer un progrès déterminant dans le dossier présidentiel.

En effet, le seul point sur lequel toutes les parties libanaises sont actuellement d’accord, c’est le fait que la vacance présidentielle est appelée à se prolonger et que les Libanais devraient composer avec cette réalité. Bien entendu, chaque partie défend sa propre version des faits et explique à sa manière les raisons de cette incapacité à élire un président, mais quels que soient les arguments avancés, ils ne changent rien à la réalité qui se résume en un terrible constat d’échec à la fois du système en place et des parties politiques.

D’ailleurs, selon des sources diplomatiques européennes, la principale conclusion à laquelle aurait abouti Jean-Yves Le Drian, après ses entretiens avec les représentants de toutes les parties concernées, est le fait qu’à part de rares exceptions, la plupart de ses interlocuteurs ne sont pas prêts à se lancer dans un dialogue interne. Les conditions posées par un grand nombre de parties pour accepter l’idée du dialogue montrent en effet un refus caché de discuter pour aboutir à une solution. Selon les sources précitées, les arguments avancés expriment en réalité des positions rigides qui ne ressemblent pas aux changements qui se succèdent dans la région et il n’y a ainsi chez les Libanais aucune volonté d’avancer, de faire un pas vers l’autre ou de sortir des clivages traditionnels. Soit les parties concernées attendent des encouragements extérieurs pour changer d’attitude, soit elles veulent pousser les choses vers un changement en profondeur qui ne peut pas être décidé par les Libanais seuls. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’envoyé présidentiel français compte entreprendre une série de contacts avec les autres membres de la commission dite des 5 (France, États-Unis, Égypte, Qatar et Arabie saoudite) pour créer un climat favorable à un dialogue interne libanais, qui reste à ses yeux, la seule issue possible pour le dossier présidentiel.

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, la séance électorale du 14 juin a en effet compliqué la situation au lieu de faire avancer les choses. Dans l’esprit d’une partie de ceux qui y avaient participé, cette séance devait aboutir à l’élimination des deux principaux candidats, Sleiman Frangié (soutenu par le camp du Hezbollah) et Jihad Azour (soutenu par le camp adverse), pour ouvrir la voie à ce qu’on appelle « un troisième choix », alors que pour d’autres, elle devait plutôt éliminer un des deux candidats et montrer ainsi que l’autre est avantagé, ce qui changerait la donne politique à l’intérieur du pays.

Tous ces pronostics sont tombés à l’eau, car la séance électorale n’a apporté aucun changement significatif. Jihad Azour a certes obtenu plus de voix que son rival (59), mais il n’a pas passé le cap crucial des 65 voix, qui aurait fait de lui un président élu attendant la reconnaissance officielle, et Sleiman Frangié n’a pas été éliminé de la course. Selon ceux qui l’appuient, le chef des Marada n’a certes obtenu que 51 voix, mais il n’a pas fait le plein de ses appuis. Par exemple, le bloc de la Modération nationale (8 députés proches du courant du Futur) a voté pour « Le Liban nouveau ». Ce qui signifie que ce bloc n’a pas encore fait réellement son choix présidentiel et il pourrait, dans certaines circonstances, donner ses voix à Sleiman Frangié. De même, Neemat Frem qui a voté en faveur de l’ancien ministre des Finances s’est entendu avec son allié Jamil Abboud qui a voté pour « Le Liban nouveau », laissant ainsi la porte ouverte à un autre choix le cas échéant. Même chose pour les trois députés de Saïda, Abderrahmane Bizri, Oussama Saad et Charbel Massad qui ont voté pour Ziyad Baroud, mais qui pourraient changer de choix si les circonstances les poussent à le faire. C’est aussi le cas des députés de la contestation Halima Kaakour et Élias Jaradé qui ont aussi voté en faveur de l’ancien ministre de l’Intérieur. Cette interprétation est d’ailleurs aussi valable pour le candidat du camp opposé, Jihad Azour. Autrement dit, certains de ceux qui ont voté en dehors des deux principaux candidats ont voulu en quelque sorte laisser la porte ouverte à un autre choix, le moment venu. Ce qui confirme l’idée selon laquelle aucun des deux principaux candidats n’est sorti de la course et pourrait donc, si les contextes interne et externe changent, être élu à la tête de l’État.

Le décryptage de Scarlett Haddad

Face à l’impasse à l’intérieur, place aux négociations à l’extérieur

Toutefois, l’élément le plus important dans les résultats de la séance du 14 juin, selon les sources précitées, reste le fait que les alliés traditionnels des deux formations chiites leur ont fait défaut. Le bloc de la Rencontre démocratique (8 voix) mené par Taymour Joumblatt n’a pas tenu compte de la volonté de l’allié traditionnel de Walid Joumblatt, Nabih Berry, en donnant ses voix à Jihad Azour plutôt qu’à Sleiman Frangié. De même, le bloc du Liban fort de Gebran Bassil a donné au moins 15 de ses 18 voix (le bloc parle de 17 voix) à Jihad Azour, contrairement à la volonté de son allié le Hezbollah. Ce qui pousse les mêmes sources à affirmer que c’est là le principal message de la séance : les alliances si soigneusement tissées par le tandem chiite sont en train de se défaire et ni le Hezbollah ni le président de la Chambre ne peuvent demander à leurs alliés respectifs de se ranger à leurs côtés dans une question aussi cruciale que la présidence de la République. Le message a-t-il été reçu ? S’il faut en croire les nouveaux pronostics, le tandem chiite a quelques mois pour tirer les leçons qui s’imposent. Sinon, il faudra attendre que le Liban devienne une priorité sur l’agenda régional et international.

Les espoirs, même modestes, placés dans la visite de l’envoyé présidentiel français Jean-Yves Le Drian à Beyrouth se sont évaporés. Même la possibilité de son retour au cours des prochaines semaines n’est plus considérée comme étant en mesure de provoquer un progrès déterminant dans le dossier présidentiel. En effet, le seul point sur lequel toutes les parties libanaises sont...

commentaires (2)

Malheureusement le temps joue en faveur du Hezbollah, contrairement à la communauté chrétienne qui a le plus a perdre de la vacance présidentielle et du délitement de l:Etat

Tabet Ibrahim

10 h 05, le 05 juillet 2023

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Commentaires (2)

  • Malheureusement le temps joue en faveur du Hezbollah, contrairement à la communauté chrétienne qui a le plus a perdre de la vacance présidentielle et du délitement de l:Etat

    Tabet Ibrahim

    10 h 05, le 05 juillet 2023

  • Cette impasse et le délitement de l État joue malheureusement en faveur du Hezbollah, contrairement à la communauté chrétienne qui a tout a perdre de la vacance présidentielle. Disposant déjà d'un État dans l'Etat il peut se payer le luxe de temporiser en espérant l emporter sur ses adversaires politiques a l'usure , ou mieux encore réaliser son but de changer le système et l'équilibree du pouvoir

    Tabet Ibrahim

    10 h 01, le 05 juillet 2023

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