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Économie - Conjoncture

Pour l’IFI, la classe politique libanaise reste le plus grand obstacle aux réformes économiques

En fonction des scénarios, le PIB libanais pourrait atteindre 53,7 milliards de dollars en 2026 ou rester inférieur à 23 milliards.

Pour l’IFI, la classe politique libanaise reste le plus grand obstacle aux réformes économiques

Selon l’IFI, la classe politique actuelle, « avec ses divisions sectaires enracinées, reste un obstacle important aux réformes économiques ». Photo João Sousa

Si l’Institut de la finance internationale (IFI) estimait il y a près de deux mois que la possibilité que les réformes nécessaires pour enclencher une amélioration socio-économique au Liban relevaient d’un « miracle », son constat de la situation actuelle est encore plus cinglant.

Reprenant une description faite du Liban en 2020 par l›ancien ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, pour qui « le Liban, c’est le Titanic sans l’orchestre », l’IFI, une organisation qui regroupe près de 400 banques et sociétés financières dans le monde, a intitulé sa dernière note « Liban : les risques du naufrage du Titanic ».

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Publiée en fin de semaine à la suite d’une conférence virtuelle qui a réuni plus de 80 participants regroupant des experts libanais et internationaux, dont notamment le vice-Premier ministre libanais sortant Saadé Chami, l’IFI épingle les responsables libanais. La classe politique, « avec ses divisions sectaires enracinées, reste un obstacle important aux réformes économiques », notent les auteurs du rapport en ajoutant que « le système politique actuel du Liban ne se prêtait pas à la résolution d'une crise de cette ampleur ».

Un état de déni

Par conséquent, et bien que la crise libanaise dure déjà depuis près de quatre ans, « aucune réforme significative n›a été entreprise. Au lieu de cela, des politiques contre-productives ont été introduites, amplifiant la crise économique et financière dans des proportions gigantesques et avec des conséquences humanitaires tragiques », précise le rapport. Allant encore plus loin, les auteurs soulignent que la majorité de cette classe politique « est dans un état de déni » et « reste principalement préoccupée par ses propres intérêts plutôt que par le bien-être du peuple libanais ».

En plus de cela, les auteurs du rapport indiquent que la mise en œuvre des réformes requises par le Fonds monétaire international, pour espérer débloquer une aide de 3 milliards de dollars répartie sur quatre ans, est perçue comme étant « une menace pour les gains illicites » des dirigeants libanais, sans compter le fait que les liens entre les politiciens et certains acteurs du secteur privé constituent « un obstacle majeur aux réformes ».

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Entre-temps, la livre libanaise n’a cessé de se déprécier, perdant plus de 98 % de sa valeur depuis le début de la crise en 2019, alors que le PIB national est passé de 54 milliards de dollars en 2018 à 19 milliards en 2022. L’IFI relève aussi le fait que « près de 250.000 Libanais », soit « près de 7 % de la population libanaise », ont quitté le pays à la recherche de meilleures opportunités. « Le Liban est en pleine désintégration », résume l’institution.

Des responsables réformateurs

Malgré ce sombre tableau, l’IFI croit quand même que le sort de l’économie libanaise peut être inversé à travers la mise en place des réformes évoquées dans le cadre de l’accord préliminaire signé entre le FMI et les autorités libanaises. Mais pour cela, les auteurs du rapport précisent que le Liban doit en premier avoir « un président et un gouvernement réformateurs ».

En ce qui concerne les principaux chantiers prioritaires, l’IFI s’aligne sur le FMI et cite : l’unification des taux de change multiples ; la publication de l’audit des comptes de la Banque du Liban ; la réhabilitation du secteur bancaire ; le renforcement des règles qui encadrent la bonne gouvernance des banques ; la mise en place d’un contrôle des capitaux ; la restructuration de la dette publique ; la restructuration des établissements publics et la mise en place d’un cadre de protection sociale qui protège les populations les plus vulnérables.

Outre l’aide financière qui serait apportée par le FMI suite à la mise en place de ces réformes, l’IFI estime que le Liban pourra aussi bénéficier d’une injection de fonds liée en grande partie au feu vert du Fonds et provenant des quatre sources suivantes :

- La Banque mondiale qui pourrait apporter une assistance financière directe et aider à formuler des réformes structurelles.

- Les pays du Golfe, l’Europe, les États-Unis et le Canada qui pourraient mobiliser au moins 15 milliards de dollars qui seraient déboursés lors des quatre prochaines années.

- Les Libanais expatriés dont le transfert de fonds vers le Liban est estimé à environ 7 milliards de dollars par an.

- Les investisseurs privés étrangers qui pourraient être intéressés par les secteurs des télécommunications et de l’électricité une fois qu’ils seraient rentables et ouverts à la participation du secteur privé.

Deux scénarios

Dans ce cadre, l’équipe de l’IFI imagine deux scénarios pour le Liban.

Dans le premier cas, il s’agit d’un scénario positif, dont la concrétisation est « peu probable » et dans lequel les auteurs envisagent que les responsables politiques parviennent à « un accord exceptionnel » qui permettrait l’arrivée « d’ici à juillet » d’un président et d’un gouvernement réformateurs, et la nomination d’un nouveau gouverneur indépendant à la Banque du Liban. Ce cadre politique permettrait d’ouvrir la voie à la mise en place des réformes susmentionnées et de la signature d’un accord d’aide définitif avec le FMI « d’ici à septembre ».

Si cela se matérialisait, le PIB libanais pourrait retrouver son niveau de 2018 d›ici à 2026, la croissance étant notamment tirée par les exportations et les investissements publics. Dans ce cas de figure, le PIB est estimé à 21,4 milliards de dollars en 2023, 37,3 milliards en 2024, 46,3 milliards en 2025 et 53,7 milliards en 2026. En parallèle, les multiples taux de change seront en premier lieu unifiés, le Liban adoptant par la suite un système de taux de change flottant. Le taux d’inflation, équivalant à 171,2 % en 2022, repasserait à un chiffre à partir de 2025.

Dans leur scénario pessimiste, estimé comme étant le plus probable, les auteurs jugent que la classe dirigeante actuelle continuera à bloquer les réformes nécessaires, ce qui à son tour empêcherait la signature d’un programme soutenu par le FMI et le déblocage de fonds additionnels par la communauté internationale. Dans ce cas, les différents taux en vigueur ne seront pas unifiés, la livre continuerait à se déprécier rapidement sur le marché parallèle, l›inflation resterait à trois chiffres et la croissance annuelle stagnerait « à moins de 1 %, alors que le PIB resterait inférieur à 23 milliards de dollars pour les quatre prochaines années ».

Reprenant l’analogie de l’ancien ministre français, les auteurs du rapport craignent que ce scénario pessimiste entraîne le naufrage du Titanic après s’être « écrasé sur l’iceberg ».

Une situation qui pourrait se matérialiser par la détérioration des conditions économiques et sociales dans le pays, au point de provoquer « des troubles civils aux conséquences inimaginables ».

Si l’Institut de la finance internationale (IFI) estimait il y a près de deux mois que la possibilité que les réformes nécessaires pour enclencher une amélioration socio-économique au Liban relevaient d’un « miracle », son constat de la situation actuelle est encore plus cinglant. Reprenant une description faite du Liban en 2020 par l›ancien ministre français des Affaires...

commentaires (2)

Pour l’IFI, la classe politique libanaise reste le plus grand obstacle aux réformes économiques. Cependant, une question à deux sous: ou sont planqués ces milliards, et quels sont les pays qui ont accepté de les maquiller avant d’accepter qu’ils soient placés sans se soucier de leur provenance ou plutôt tout en sachant quils proviennent du pillage d’un pays déjà exsangue et de son peuple dépouillé pour servir de fortunes aux corrompus de là nation. Ce ne sont sûrement pas les banques libanaises qui les gèrent et font semblant d’être plus blancs que blancs. Qu’on nous répondent déjà à la question et on leur promet de nous battre jusqu’au dernier pour récupérer le fruit de labeurs de toute une vie. On attend les noms et les sanctions qui vont avec pour tous ceux qui ont rendu ce pillage possible en encourageant sa perpétuation à grande échelle.

Sissi zayyat

13 h 37, le 15 mai 2023

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Commentaires (2)

  • Pour l’IFI, la classe politique libanaise reste le plus grand obstacle aux réformes économiques. Cependant, une question à deux sous: ou sont planqués ces milliards, et quels sont les pays qui ont accepté de les maquiller avant d’accepter qu’ils soient placés sans se soucier de leur provenance ou plutôt tout en sachant quils proviennent du pillage d’un pays déjà exsangue et de son peuple dépouillé pour servir de fortunes aux corrompus de là nation. Ce ne sont sûrement pas les banques libanaises qui les gèrent et font semblant d’être plus blancs que blancs. Qu’on nous répondent déjà à la question et on leur promet de nous battre jusqu’au dernier pour récupérer le fruit de labeurs de toute une vie. On attend les noms et les sanctions qui vont avec pour tous ceux qui ont rendu ce pillage possible en encourageant sa perpétuation à grande échelle.

    Sissi zayyat

    13 h 37, le 15 mai 2023

  • « les troubles civils aux conséquences inimaginables » auraient déjà dû se produire il y a belle lurette. Nous sommes un peuple mou et soumis. À un escroc qui nous soutire 10.000$, nous lui faisons la peau sans sourciller. À une mafia qui siphone l'intégralité de nos comptes, on leur dit "encore". Point de salut. Le Titanic a déjà commencé à sombrer, mais l'orchestre joue toujours, n'en déplaise à Le Drian.

    Ca va mieux en le disant

    01 h 23, le 15 mai 2023

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