Membre du comité de résistance du quartier de Maamoura, à Khartoum, Dania Atabani a été de toutes les récentes mobilisations citoyennes contre le diktat du pouvoir militaire qui sévit au Soudan. Après avoir participé aux manifestations ayant provoqué la chute du dictateur Omar el-Bachir en avril 2019, cette étudiante de 23 ans s’est opposée à la montée en puissance des généraux Abdel Fattah el-Burhane, chef de l’armée, et son lieutenant Mohammad Hamdane Dagalo, alias Hemetti, chef des Forces de soutien rapide (FSR). Lors de leur putsch conjoint d'octobre 2021, les comités de résistance des différents quartiers de la capitale ont organisé des manifestations hebdomadaires où beaucoup de ses amis ont péri.
Elle n’a pas cru à l’accord entre civils et militaires du 5 décembre 2022, selon lequel les deux généraux étaient censés remettre le pouvoir à un gouvernement civil au bout d’un mois. Au lieu de cela, ils se sont retournés l’un contre l’autre le 15 avril pour prendre le contrôle du Soudan et de ses ressources, déclenchant un conflit qui n’en finit plus de détruire ce pays de 45 millions d’habitants.
« C’était attendu », a dit Dania dès le premier jour de la guerre, racontant les affrontements ayant lieu près de chez elle, les balles traversant le plafond de l’appartement familial. Fidèle à ses engagements, la jeune militante a participé aux actions du comité de résistance de Maamoura pour fournir des soins médicaux et des voies d’évacuation pour les familles soudanaises, livrées à elles-mêmes dans une ville transformée en théâtre de guerre et désertée par les diplomates.
Dania, elle, a tout fait pour ne pas fuir ce pays pour lequel elle s’est tant battue. Mais le 9 mai, quand les combats sont devenus trop menaçants, ses grands-parents et sa mère ont décidé qu’il était temps de partir. Les larmes aux yeux, dans le bus qui la mène vers la frontière égyptienne, entre un barrage des forces paramilitaires et un autre de l’armée régulière, elle a écrit ce texte pour L’Orient-Le Jour.
E.H.
Tout est une bénédiction
Cette guerre m’a tant appris. Tous les détails dont j’ignorais l’importance, mais qui étaient en réalité les couleurs qui donnent à la vie sa vraie valeur… Tant de détails dont je n’aurais jamais imaginé que l’absence me serait si cruelle.
Mes amis me manquent. Ma famille aussi, cela va sans dire. Mais beaucoup de choses plus anecdotiques me font défaut. Le gérant de l’épicerie du coin qui me saluait chaque fois que je venais fouiller dans ses étals, me demandant des nouvelles de ma famille et démarrant une conversation sur tout et rien avant de se moquer de moi. Mes visites à la station-service pour demander le prix de l’essence et se perdre en digressions sur la difficulté de la vie au Soudan, essayant de partager la souffrance de mon peuple, malgré ma situation économique bien plus aisée que d’autres. Mes complaintes permanentes sur l’eau trop chaude ou un soleil qui tape si fort qu’on dirait qu’il marche à tes côtés dans la rue. Les blagues que je faisais à mes amies sur la chaleur, leur disant que si j’étais un pop-corn, j’aurais déjà explosé ! Les négociations ardues avec le vendeur sur les prix des légumes, se terminant par mon refus de payer un tarif si élevé en raison de l’inflation. Mon plaisir de croiser des jeunes jouant au football dans la rue. Mes réflexions permanentes sur la manière désastreuse dont les gens conduisent. La gentillesse de mon peuple, la façon dont un parfait étranger venait me raconter une blague quand je pleurais ou que j’étais triste. Ma vie d’avant, les manifestations, les canons à eau qui nous chassaient dans les rues de Khartoum, les blagues que nous faisions à ce propos, notre humour nous servant de mécanisme de survie face à la violence de la répression. Même l’odeur de lacrymogène me manque à présent, bien que cela puisse paraître un peu étrange.
Cette guerre m’a appris que tout ce que j’avais avant était une bénédiction. Elle m’a appris que je ne dois jamais rien tenir pour acquis et que ce que nous chérissons dans la vie n’est pas impérissable, pas plus que les choses et les gens que nous détestons. Le problème, c’est que la vie a décidé de me donner cette leçon de la façon la plus dure qu’il soit. J’ai perdu ma maison, ma cause, de nombreux proches ont disparu de différentes façons. Mais surtout, je me suis perdue moi-même. C’est vraiment dur de voir qu’après t’être battue si dur pour vivre heureuse et en sécurité dans ton pays, après avoir vu tes amis mourir devant tes propres yeux pour cette cause, tout ce pour quoi tu as lutté est transformé en cendres en une fraction de seconde.
Mais cette guerre m’a appris une leçon précieuse : l’espoir maintient en vie. J’espère qu’un jour très prochain je reviendrai chez moi, je reconstruirai chaque mur détruit et soignerai toutes les âmes blessées de mon pays. Je participerai à cette reconstruction, car c’est ce pour quoi moi et toutes les personnes qui sont descendues dans les rues pour réclamer leurs droits et leurs libertés, désarmés face à la mort, nous sommes battus. Nous avons promis que nous allions réparer ce pays et nous allons tenir cette promesse.
Par Dania ATABANI, militante soudanaise
Depuis le 15 avril, ( 1 mois ) la guerre a fait plus de 750 morts, 5.000 blessés , près de 150.000 réfugiés, et 700.000 déplacés. Ça nous rappelle la Lybie, la Syrie , demain le Pakistan (aujourd’hui déjà ) , l’Arménie - Azerbaïdjan en préparation . Voilà et hop : Un officier tué dans l'explosion d'un véhicule de police à Damas, L’EI revendique (depuis Londres, merci OSDH ) un attentat contre la police à Damas ? Mrs./Miss Dania ATABANI, militante soudanaise , NOUS ,on est passé par cela. Méfiez-vous des PYROMANES ANGLO-SAXONS et de leur terrorisme ..
18 h 17, le 10 mai 2023