D.R.
ChatGPT, ainsi que les technologies d’intelligence artificielle (IA) qui le sous-tendent, suscitent à la fois fascination et inquiétude. Des ouvrages de référence soulignent l’importance des mathématiques, de la puissance informatique et des talents humains, combinés pour la création d’une véritable révolution de l’IA.
L’essor de l’intelligence artificielle
Il est généralement admis que les prémices de l’intelligence artificielle remontent aux années 1950.
Pour les personnes ayant interagi avec ChatGPT, il est évident que ce modèle réussit facilement le test de Turing qui vise à donner l’impression que l’on dialogue avec un être humain plutôt qu’avec une machine.
ChatGPT utilise une technologie de génération de texte capable de prédire la probabilité de chaque mot et paragraphe afin de composer un texte cohérent et fluide. Cette technologie repose sur un « apprentissage en profondeur » (Deep Learning) pour réaliser des tâches complexes de compréhension de la langue naturelle.
Processeurs, données, talents
Les premiers travaux sur l’apprentissage en profondeur sont entrepris dès 1950 par Marvin Minsky et John McCarthy qui construisent l’une des premières « machines neuronales ». À partir des années 2000, l’apprentissage en profondeur connaît un développement fulgurant grâce à l’explosion de la puissance de calcul, de la disponibilité de données massives et aux talents humains consacrés à la création de nouvelles techniques d’optimisation des réseaux de neurones.
L’intelligence artificielle (IA) recouvre en 2023 une grande variété de technologies et de domaines d’application. Voici quelques exemples de réalisations typiques obtenues grâce à l’IA :
- La prédiction de diverses variables, comme le prix d’un titre boursier, le risque de fraude dans une transaction, le prochain achat d’un client, le contenu d’une image ou d’une vidéo, ou encore le risque de développement d’une maladie ;
- L’extension des capacités humaines grâce à la création de réalités virtuelles ou augmentées, telles que des réunions en ligne reproduisant les conditions d’une réunion réelle, grâce à l’imagerie 3D ;
- L’utilisation d’objets connectés au corps humain. Cela peut prendre la forme de montres munies de capteurs de signaux électriques émis par les nerfs moteurs qui traversent le poignet. Ces montres traduisent les mouvements de la main en commandes pour contrôler les fonctions d’un appareil (éteindre ou allumer à distance, pour fournir un exemple trivial).
Ces applications de l’IA ont déjà commencé à transformer de nombreux domaines, notamment la finance, la santé, l’industrie, l’éducation, le divertissement et bien d’autres encore.
IA, biologie et neurosciences
Un autre exemple remarquable est la création d’implants cérébraux, des modules électroniques connectés à des fils très fins appelés « électrodes », insérés dans le cerveau. Ces électrodes détectent l’activité neuronale pour stimuler les neurones en fonction des signaux reçus. Cette technologie a pour objectif la restauration de la mobilité et de la communication chez les personnes paralysées, le traitement de troubles neurologiques tels que la maladie de Parkinson ou l’épilepsie, ou encore l’amélioration des capacités cognitives et de communication.
Les progrès dans ce domaine sont époustouflants, avec des implants cérébraux permettant de communiquer avec un ordinateur en pensant à des mots ou en utilisant des signaux cérébraux, et même de percevoir des sensations tactiles à travers des doigts artificiels. Cette technologie, encore en développement, a le potentiel de transformer la vie de nombreuses personnes atteintes de maladies neurologiques ou de troubles de la communication.
Risques de détournement
Malgré les nombreuses applications positives de l’IA, celle-ci suscite des préoccupations quant à ses utilisations potentiellement néfastes. En voici quelques exemples :
- Les techniques génératives peuvent être utilisées pour créer des « deep fakes », des vidéos truquées apparemment réalistes mais qui montrent des événements qui n’ont jamais eu lieu. Cela peut engendrer des conséquences négatives sur la vie privée, la réputation ou la sécurité de personnes ou d’organisations.
- L’utilisation militaire et les cyberattaques de plus en plus sophistiquées et nocives avec des enchaînements graves pour la sécurité et la stabilité internationales.
On redoute notamment l’avènement d’une « IA forte », une intelligence artificielle munie de la capacité de comprendre, d’apprendre et d’appliquer de manière autonome ses connaissances à une large gamme de tâches et de problèmes, de manière similaire à l’intelligence humaine.
Toutefois, la plupart des spécialistes pensent que ce danger n’est pas imminent, car l’IA actuelle n’est pas capable de comprendre le sens des mots qu’elle manipule. Par exemple, elle peut isoler un chien et un chat sur une photo et les regrouper sous le concept général d’« animaux », mais elle ne comprend pas la signification ou la complexité du concept d’« animaux » en lui-même.
Les enjeux économiques, géopolitiques et militaires de l’IA sont considérables et pourraient bouleverser l’ordre mondial, car l’IA donne un avantage décisif à ceux qui en exploitent les versions les plus avancées.
Les récentes décisions prises par l’administration Biden pour restreindre les ventes d’équipements de fabrication de semi-conducteurs et de puces d’IA à la Chine dévoilent bien les enjeux en cours. La même administration Biden a pris certaines mesures pour faciliter la venue aux États-Unis des étudiants en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques.
On ne « pause » pas le progrès
Il est peu probable que la pause préconisée récemment par Elon Musk soit acceptée par les principaux acteurs de la course à l’IA. Pour atténuer les risques d’une dérive dangereuse pour l’humanité, il faudrait que des instances internationales et la communauté scientifique et de développement informatique travaillent ensemble pour établir une réglementation ou une charte éthique visant à limiter les abus potentiels. Malheureusement, le contexte mondial actuel et les tensions exacerbées entre les parties prenantes de la course à l’IA ne sont guère encourageants pour entrevoir un tel processus.
Le Métavers. Comment va-t-il tout révolutionner ? de Matthew Ball, traduit de l’anglais par Jean-Yves Kruger, De Boeck Supérieur, 2023, 352p.
Au cœur de l’intelligence artificielle. Des algorithmes à l’IA forte d’Axel Cypel, De Boeck Supérieur, 2020, 480p.
Quand la machine apprend. La Révolution des neurones artificiels et de l’apprentissage profond de Yann Le Cun, Éditions Odile Jacob, 2019, 400p.
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