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Nos Lecteurs ont la Parole

Les feuilles mortes

Un silence total règne dans ce grand boulevard où les gens s’y rendaient autrefois pour faire leur balade du soir.

Seule la voix des arbres se fait entendre tout bas. Celle-là, étouffée et mourante, expire son dernier souffle avant de s’éteindre et de s’effacer.

Leurs grands troncs laissent tomber leurs feuilles fades par-ci par-là.

Au-delà de toute résistance, ces géants solides baissent leur front devant la grandeur du temps et sa puissance.

La vigueur du froid casse les branches tenaces et arrache les couleurs vives pleines de joie les mettant en transe.

Les affres de la mort pèsent sur la nature morne qui a perdu tout effort devant le vent fort.

Par terre, les feuilles se dispersent mortes et leurs esprits les emportent dans tous les sens.

Elles s’envolent parmi les sentiers et ruelles détachés de leur support.

Là où la douceur de la terre cède ses fruits de sagesse à travers ses racines solides arrosées de tendresse certes.

Tout attachement décède à présent sur ce sol pâle et amer.

Les feuilles sèches errent dans les rues et suivent les passants qui se serrent pour sentir leur chaleur humaine.

Dispersés, déracinés, éparpillés, ces fantômes blêmes survolent par-delà les trottoirs pour toucher la chair vivante et revivre les souvenirs chers.

Ceux-ci caressent les joues douces des vivants et murmurent dans leurs oreilles des paroles obscures à faire frissonner toute la tête.

Ils se rappellent ces visages pleins de grâce qui se promènent en grande liesse par-dessus leurs ombres fières.

Un air mou frôle leurs figures drôles comme un bisou rempli de gentillesse.

Le moment s’arrête pour un instant là, pour se plonger d’un coup dans la fraîcheur d’hier. Et faire renaître la mémoire du temps perdu dans ce lieu terne.

L’ardeur du soleil, les couleurs vermeilles, le son des abeilles, le souffle d’une brise légère, le vrai bonheur sans conteste.

Un petit recul en arrière qui rapporte la magie des belles veilles.

Quelle merveille !

L’âme des feuilles se réjouit de ce brusque arrêt dans le temps qui a dû emporter les vieilles images du passé dans la scène actuelle.

Mais pour une brève durée malheureusement et le spectacle vert est remplacé aussitôt par le deuil de la terre.

Une vision courte et agréable au seuil du présent qui n’a pas tenu longtemps. C’est la dure réalité qui émerge tristement.

Les feuilles sont déjà mortes et leurs esprits survolent dans les alentours mornes mélancoliquement.

Quelquefois le froid les sépare et les porte ensemble pour s’étendre quelque part en formant une tapisserie multicolore au sol.

Un régal offert à ces piétons solitaires aux yeux sombres et égarés qui suivent la démarche de leur ombre noire dont le hasard a dû tracer son drôle de trajet.

Un plaisir bref pour ce regard amer qui vient distraire le moral épuisé et en peine d’une destinée sur leur chemin dessinée.

Et les feuilles tombent en trombe d’ores et déjà à cause du vent violent qui se lève en pleine force couvrant la terre avec une masse de feuillage disséminé.

Épars çà et là de toutes les manières, même cruellement embourbés ou simplement piétinés.

Un moyen cruel pour ces doux gardiens fidèles dont l’ombre hante à jamais la mémoire des gens sincères.

Un souvenir qui reste vivant jusqu’à son intrusion brutale dans le cadre de la vie réelle. La saison prochaine !


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Un silence total règne dans ce grand boulevard où les gens s’y rendaient autrefois pour faire leur balade du soir.Seule la voix des arbres se fait entendre tout bas. Celle-là, étouffée et mourante, expire son dernier souffle avant de s’éteindre et de s’effacer.Leurs grands troncs laissent tomber leurs feuilles fades par-ci par-là.Au-delà de toute résistance, ces géants...

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