Hermès, printemps-été 2023. Crédit Hermès
Des clips, des zips, des cordages, des tirettes, un somptueux gilets sacs-dos en cuir gold, de l’agneau imitant la toile anti-pluie… Voici que le droit d’aller toucher le bout du monde nous est à nouveau accordé comme un rêve possible, et pour la prochaine belle saison, Hermès nous équipe pour la grande aventure. Au Tennis Club de Paris, à l’abri de l’effervescence de la semaine de la mode, une dune de toile géante fait onduler la lumière, de l’aube au crépuscule. Une journée entière se déroule en une dizaine de minutes, et peut-être est-ce ainsi que le temps passe, quand il est de bonheur.
Hermès, printemps-été 2023. Crédit Hermès
« Une rave de femmes »
« Une danse dans le désert, où la lumière du jour laisse place aux teintes acidulées du crépuscule. Les couleurs défilent à toute vitesse au fil des heures, coulant sur des looks agiles et éthérés, habités par la légèreté », indique le manifeste de la maison. La directrice artistique des collections féminines, Nadège Vanhee-Cybulski, a imaginé une rave de femmes – en d’autres temps on aurait dit un sabbat – quelque part dans les confins inhabités où la liberté est absence de repères et de limites. La musique composée par le Studio Frédéric Sanchez évoque une cavalcade intrépide sur fond de tempête spatiale. Elle va accompagner la montée et le déclin progressif du jour, tantôt énergique, tantôt apaisante.
Mystérieux cocons
C’est une garde-robe « vagabonde », montée sur des sandales aux semelles de vent, pour ainsi dire, puisque les semelles conçues par Pierre Hardy pour Hermès sont ajourées et font ressort, conférant à la démarche un mouvement de danse. « Des pièces polyvalentes se transforment au fil des heures. Des pièces utilitaires qui semblent taillées dans une tente, des cuirs brodés et perforés, des corps et des matières en consonance avec le coucher du soleil. La nuit apporte des visions doubles et des silhouettes en mouvement », poursuit le manifeste, et, de fait, on a l’impression que ces femmes vont à tout moment défaire, dézipper, déclipper le cocon mystérieux qui les enveloppe et le reconstruire comme un abri somptueux perméable aux étoiles : le dos d’un trench se déploie, la maille de soie se moule à chaque mouvement, les cordons et les anneaux déconstruisent tout ce qui tient en harmonie parfaite, même le tracé complexe des cordons qui dessine sur la peau nue d’ineffables ceintures.
Hermès, printemps-été 2023. Crédit Hermès
« Les drapeaux se transforment »
« Le travail délicat du cuir se déploie dans une palette de bruns pleine de souplesse et d’ampleur. La lumière brûlante du soleil frappe les paillettes dans le cuir d’agneau, les perforations graduées, les jeux de tressage et de crochet, formant des pièces athlétiques et féminines » : des tops échancrés redessinent le « H » d’Hermès tout en mettant en valeur la puissance des épaules, d’autres, en cuir tressé, en appellent à l’authenticité d’un savoir-faire ethnique et suggèrent des cottes de maille d’un raffinement inégalé.
Tout à coup la lumière rougeoie, se met progressivement en sourdine pour faire éclater des rouges voluptueux. Un vent imaginaire se lève à mesure que la chaleur se retire : « Au coucher du soleil, tout est effervescent et fluide. Les drapeaux se transforment en robes asymétriques flottant sur la dune, les roses et rouges vifs s’associent sur des pièces légères et modulables. »
Les imprimés 3D se tordent et ondulent sur le corps
Tombe alors la nuit et, dans une quasi-obscurité, les perles de verre brodées en motifs géométriques, tribaux ou cabalistiques, œil, alignement d’astres et tout ce qu’on peut imaginer dans un crépuscule désertique, retiennent et font scintiller les dernières particules de lumière : les imprimés 3D se tordent et ondulent sur le corps. Avec des couleurs chatoyantes et en trompe-l’œil, la texture et l’illusion sont partout.
On aimera par-dessus tout le panache de plume qui flotte au-dessus d’une nouvelle ligne de sacs de couleurs vives. Il accompagne ce mouvement dansant, caracolant aussi, de l’ensemble de cette nouvelle collection estivale, à elle seule support de contemplation tant est puissante l’imagerie qu’elle inspire.
Hermès, printemps-été 2023. Crédit Hermès
« Une plénitude longtemps espérée »
Une rave dans le désert, qui ne soit pas un Coachella sans âme mais un véritable périple à la fois intérieur et en communion avec la nature et l’espace, c’est ce que propose Hermès pour son héroïne imaginaire, comme le souligne, pour finir, le manifeste de la maison : « Elle est venue ici dans l’idée que ce bivouac improvisé, ce retour à la vie en pleine nature, lui apporterait une plénitude longtemps espérée. Aussi, elle a savamment choisi ses pièces en fonction de ce qu’elle attend de cette danse dans le désert : tantôt des vêtements ocre jaune, tantôt ébène, beige sable, marron Thar. Et puis du rose aurore pour le matin, pour retenir la fraîcheur avant qu’elle ne s’évade. Chacune de ces pièces semble avoir été directement taillée dans un filet, un hamac ou une moustiquaire. Parmi elles, certaines rappellent sur toute leur longueur le flottement d’un drapeau. Elle a rassemblé des pantalons, des shorts et des blousons presque découpés à même la tente. Toutes ces toiles habituellement pensées pour nous protéger, elle avait envie de les ouvrir à différents endroits. À l’aide de cordes à nouer, elle peut les faire dialoguer avec le monde extérieur, le vivant. Au plus fort de la nuit, emportée dans une robe en imprimé 3D qui dédouble ses mouvements et les lignes de son corps, elle porte enfin sur elle ce troublant voyage intérieur commencé dans la joie. Un bivouac, une danse et partout cette sensation d’immensité. Celle-là même qu’un philosophe qui ne refusait pas la magie avait un jour désignée comme l’enchantement californien... »
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