Au tout début des années 60, Manoug Manougian, un tout jeune professeur de mathématiques, venu de Jérusalem, et ses étudiants de l’Université Haïgazian ont fabriqué des fusées d’abord pour comprendre la propulsion, les mathématiques et la physique, puis parce que ce groupe a été vite contaminé par la passion de l’espace, transmise par leur professeur.
Le groupe a conçu et lancé dans le ciel libanais une dizaine de fusées, les « Cedars », qui sont devenues de plus en plus performantes, à tel point que les États-Unis et la France, inquiétés par leur performance, ont demandé et obtenu l’arrêt du programme en 1967. L'équipe, baptisée The Lebanese Rocket Society,était composée de jeunes gens, majoritairement arméniens, venus du monde arabe pour étudier au Liban, et qui, par gratitude à leur pays d’accueil, ont offert ce projet spatial. Ce projet de recherche totalement contemporain alors, c’est ainsi que ce groupe se percevait.
Cette aventure spatiale qui était célébrée partout (un timbre a même été édité à ce sujet) est, plus tard, tombée dans l’oubli. Quand Tania Mehanna nous en a parlé, nous avons d’abord cru à une fiction avant de nous rendre compte que cela était bien réel. La première fois que nous avons pris contact avec Manoug, qui vivait désormais à Tampa, aux États-Unis, il était méfiant : Que lui voulait un couple de cinéastes libanais cherchant à ressusciter l’histoire des fusées, 50 ans plus tard ? Il tenait à ce qu’il n’y ait aucun malentendu autour de ce projet spatial qui, pour lui, n’a jamais été militaire, mais un projet pour la paix, l’éducation et la science.
Quand, rassuré, il nous a reçus chez lui, il nous a ouvert toutes ses archives : il avait tout gardé : journaux, images, photos, films, témoignages ! Tout ! Avec son aide, nous avons pu reconstituer toute l’histoire et retrouver tous ses protagonistes dans le film The Lebanese Rocket Society, sorti en 2012 et primé au Festival de Doha Tribeca. D’une grande générosité, c’était un homme de science qui se voyait d’abord comme un éducateur et qui, jusqu’aux dernières années de sa vie, continuait de développer des fusées à base de nanotechnologie, avec ses étudiants américains.
En hommage à la Lebanese Rocket Society, et en premier lieu à Manoug Manougian, nous avons offert une sculpture, une reproduction de la « Cedars IV », à l’Université Haïgazian où toute cette histoire a commencé.
Un monument aux rêveurs et à l’un des plus assidus qui s’en est allé côtoyer l’espace infini, grande passion de sa vie.
Merci Manoug…
wow...je ne savais pas tout ca...
09 h 08, le 12 mai 2024