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Moyen-Orient - Diplomatie

Comment Macron veut éviter un scénario catastrophe au Moyen-Orient

Dans l’éventualité d’un échec des négociations sur le nucléaire, Paris semble vouloir jouer les médiateurs pour stabiliser la région riche en hydrocarbures.

Comment Macron veut éviter un scénario catastrophe au Moyen-Orient

Le président français, Emmanuel Macron, en compagnie du prince héritier saoudien, Mohammad ben Salmane, le 28 juillet 2022 à Paris. Photo BENOIT TESSIER / POOL / AFP

Le président Emmanuel Macron reçoit discrètement mais sûrement. Après la tournée très médiatisée du président Joe Biden en Israël, dans les Territoires occupés et en Arabie saoudite, où il a rencontré de nombreux dirigeants arabes, certains d’entre eux se sont rendus sans tapage dans l’Hexagone pour s’entretenir avec le locataire de l’Élysée. Le président français a ainsi reçu le 18 juillet son plus proche allié au Moyen-Orient, son homologue émirati Mohammad ben Zayed, avant de s’entretenir quelques jours plus tard à Paris avec le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, puis avec le chef de l’État égyptien Abdel Fattah al-Sissi le 22 juillet, pour enfin dîner jeudi avec le prince héritier saoudien, Mohammad ben Salmane.

Un ballet diplomatique dont le déroulé a souvent été dévoilé à la dernière minute, et dont les résultats sont restés relativement vagues dans les communiqués officiels. Une certitude pourtant, la stabilité régionale était au cœur des discussions, à l’heure où la guerre en Ukraine contribue aux cours élevés des hydrocarbures et des denrées alimentaires et où la perspective d’une réactivation de l’accord sur le nucléaire iranien s’éloigne plus le temps passe.

Outre les questions énergétiques, les dossiers tels que les activités de la République islamique, le processus de paix israélo-palestinien, la situation au Yémen ou encore les développements politiques au Liban, ont été abordés lors de ces entretiens. Des échanges qui semblent ouvrir la voie à l’organisation d’ici la fin de l’année d’une nouvelle conférence régionale sur le format de celle de Bagdad, tenue en août 2021 et co-organisée par la France et l’Irak, qui paraissait alors matérialiser les efforts de désescalade entre rivaux de la région.

Nucléaire iranien

En sus des dirigeants arabes reçus dans la capitale française, Emmanuel Macron y avait accueilli au début du mois le Premier ministre israélien par intérim, Yaïr Lapid, tandis qu’il a appelé le président Ebrahim Raïssi le 23 juillet, réitérant sa conviction qu’un deal nucléaire était encore possible, et pressant son homologue iranien "de faire le choix clair de conclure l’accord et de revenir à la mise en œuvre de ses engagements nucléaires". Assurant la navette entre Téhéran et Washington dans les pourparlers de Vienne, entamés en avril il y a plus d’un an, les Européens ont lancé mardi une dernière tentative pour aligner les parties iranienne et américaine. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a ainsi présenté un texte qu’il qualifie, dans une tribune parue dans le Financial Times, de "meilleur accord possible", considérant sa faisabilité dans les circonstances actuelles.

La semaine précédente, le coordinateur de la Maison-Blanche pour le Moyen-Orient, Brett McGurk, aurait pourtant déclaré lors d’un briefing téléphonique qu’un retour à l’accord de Vienne était "hautement improbable" dans un futur proche, selon des sources américaines ayant participé à l’appel, citées par le site d’information Axios. La levée des sanctions pesant sur Téhéran favoriserait cependant le retour sur le marché iranien de compagnies étrangères en recherche de nouvelles opportunités alors qu’une récession menace particulièrement les économies occidentales, selon le Fonds monétaire international. Elle permettrait surtout une augmentation de la quantité de gaz et de pétrole disponible à l’importation, contribuant ainsi à faire retomber les cours des hydrocarbures et l’inflation qui en découle partiellement.

Pour mémoire

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Au centre des préoccupations actuelles des Européens, la diversification de leur approvisionnement en pétrole et notamment en gaz naturel, qui provenait à près de 45 % de la Russie, aujourd’hui sous le coup de sanctions occidentales après avoir envahi son voisin ukkrainien.  A l’échelle nationale, lors de la visite d’État de Mohammad ben Zayed, Paris a ainsi chapeauté la signature d’un accord entre TotalEnergies et la compagnie pétrolière émiratie ADNOC pour s’assurer notamment un approvisionnement en diesel. Il était également attendu du président français qu’il cherche à convaincre Riyad d’augmenter sa production de pétrole lors de son dîner de travail avec le controversé Mohammad ben Salmane, dirigeant de facto du royaume wahhabite.

Au dernier sommet du G7 en Bavière, Emmanuel Macron s’était précipité vers son homologue américain pour lui signaler que les Émiratis étaient au maximum de leurs capacités, tandis que les Saoudiens auraient encore une certaine marge de manœuvre. Si la visite de Joe Biden dans le royaume n’a pas eu d’effet immédiat, Riyad ayant réitéré peu après son attachement aux décisions de l’OPEP+, qu’il domine avec la Russie, la prochaine réunion de l’organisation début août pourrait néanmoins conduire à une augmentation des quotas de production pour septembre et octobre - sans doute trop tard pour changer la donne des élections de mi-mandat prévues en novembre aux États-Unis face au mécontentement populaire nourri par l’inflation.

Sécurité et stabilité régionale

En échange d’une augmentation de production, les pétromonarchies du Golfe cherchent notamment à assurer leur sécurité face à la menace iranienne, portée par les programmes balistique et nucléaire de la République islamique, ainsi que les activités de ses supplétifs régionaux - laissées de côté lors des négociations de Vienne. La France, qui ne peut remplacer leur allié stratégique américain en matière de défense, a tout de même signé avec Abou Dhabi le "contrat du siècle" pour près de 17 milliards d’euros d’équipement militaire en décembre dernier, lors de la tournée de Macron dans le Golfe, tandis que Riyad est un des principaux clients de l’industrie militaire française. S’ils sont prêts à investir dans la dissuasion, la perspective d’une confrontation directe avec leur voisin iranien effraie les alliés de Washington dans le Golfe. Mise en avant par Joe Biden lors de sa tournée régionale mi-juillet, la proposition d’un système de défense commun aux pays arabes et à Israël pour faire face à la République islamique n’a donc pas semblé les convaincre, du moins dans sa forme conflictuelle.

Poursuivant depuis des années sa stratégie de désengagement du Moyen-Orient pour se tourner vers l’Asie, Washington a longtemps poussé les pays de la région vers une désescalade pour assurer une certaine stabilité. Ces derniers mois, la Turquie a opéré un rapprochement avec les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et Israël, tandis que Riyad et Abou Dhabi ont repris langue avec Téhéran plus ou moins officiellement et qu’un processus de normalisation avec l’État hébreu a été entamé dès 2020 avec les Accords d’Abraham. Contrairement à la Maison-Blanche, qui n’a pas de contact direct officiel avec l’Iran, l’Élysée peut se prévaloir de jouer les médiateurs à l’échelle régionale dans le sens de ce processus de rapprochement, comme l’a montré la conférence de Bagdad sur la Coopération et le Partenariat l’été dernier.

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Seul dirigeant occidental présent lors de ce sommet régional, le président Macron avait réussi le coup de force de réunir entre autres les ministres des Affaires étrangères saoudien et iranien, grâce notamment aux efforts du Premier ministre irakien Moustafa Kazimi. Depuis des mois, celui-ci jouait l’intermédiaire entre les deux pays pour leur permettre de mener des discussions bilatérales secrètes sur le dossier du Yémen. Ces pourparlers devaient permettre à l’Arabie saoudite de trouver une voie de sortie à la guerre dans laquelle elle est embourbée chez son voisin, menant depuis 2015 une coalition appuyant les forces pro-gouvernementales contre les rebelles houthis, soutenus par l’Iran. Sous la pression des États-Unis, et en geste de bonne volonté avant la visite de Joe Biden dans la région, Riyad a consenti en avril à démettre le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi de ses fonctions au profit d’un conseil présidentiel et à négocier une trêve que les Américains essaient désormais de prolonger. Après cinq cycles de négociations directes entre représentants sécuritaires et des services de renseignement, qui ont eu pour seul résultat concret la nomination de représentants iraniens à Djeddah auprès de l’Organisation de coopération islamique, Bagdad prépare désormais une prochaine rencontre publique et officielle, au niveau des ministres des Affaires étrangères. 

Le président Emmanuel Macron reçoit discrètement mais sûrement. Après la tournée très médiatisée du président Joe Biden en Israël, dans les Territoires occupés et en Arabie saoudite, où il a rencontré de nombreux dirigeants arabes, certains d’entre eux se sont rendus sans tapage dans l’Hexagone pour s’entretenir avec le locataire de l’Élysée. Le président français a...

commentaires (3)

Je ne suis pas pro moumana3iste mais je me méfie des USA !! Ils laissent tomber illico presto leur alliés

Bery tus

15 h 48, le 30 juillet 2022

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Commentaires (3)

  • Je ne suis pas pro moumana3iste mais je me méfie des USA !! Ils laissent tomber illico presto leur alliés

    Bery tus

    15 h 48, le 30 juillet 2022

  • bonjour, pourquoi quand il y a plusieurs commentaires, nous ne voyons que un ? merci

    f.nassar

    14 h 15, le 30 juillet 2022

  • ""Joe Biden lors de sa tournée régionale mi-juillet, la proposition d’un système de défense commun aux pays arabes et à Israël "" comme si les americains poussaient les persans enturbannés a se sentir tellement "menaces" qu'ils n'hésitenteront pas a envahir les pays du Golf

    Gaby SIOUFI

    10 h 21, le 30 juillet 2022

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