La révocation du juge Fadi Akiki est "hors de ma compétence de ministre", a affirmé vendredi le ministre sortant de la Justice Henri Khoury à Dimane, siège estival du patriarcat maronite au Liban. Après l'arrestation du vicaire patriarcal Moussa el-Hage, archevêque de Haïfa et Jérusalem, lundi dernier à Ras Naqoura entre le Liban et Israël, le patriarcat s'est indigné et a demandé le limogeage de M. Akiki, commissaire du gouvernement près le tribunal militaire par intérim qui est à l'origine de cette arrestation. Le prélat a par ailleurs été reçu dans la matinée à Baabda par le chef de l'État, Michel Aoun, resté silencieux jusqu'à présent sur cette affaire qui prend une tournure politique, l'Église maronite dénonçant un "message" envoyé par le Hezbollah à Bkerké.
"J'ai suivi l'affaire avec le patriarche Béchara Raï", a déclaré M. Khoury au micro de la chaîne MTV, du siège estival du patriarcat à Dimane, où se succèdent les visites de solidarité au patriarche Béchara Raï. "Les magistrats se gouvernent eux-mêmes et la décision d'une éventuelle révocation du juge est hors de ma compétence de ministre de la Justice, qui est définie. Je n'enquête pas, je ne juge pas", a-t-il insisté. La veille, le directeur de la Sûreté générale, organisme qui avait procédé à l'interrogatoire du prélat, avait réitéré que l'arrestation avait eu lieu sur ordre du juge Akiki.
"N'attaquez pas la justice"
De son côté, le procureur général près la cour de cassation, Ghassan Oueidate, a estimé qu'il "n'y a aucun fond politique" derrière cette affaire, dans les colonnes du quotidien al-Chark al-Awsat. "M. Akiki a appliqué la loi concernant l'argent, les médicaments et les produits saisis en possession du prélat", a-t-il poursuivi. Mgr Hage transportait 460.000 dollars, comme à son habitude selon ses propos. "Personne n'a été atteint dans sa dignité, son rang religieux ou son humanité", a soutenu M. Oueidate. "N'attaquez pas la justice qui fait appliquer les lois que vous avez adoptées. Si vous ne voulez pas appliquer la loi, amendez-la", a-t-il lancé, en référence à la loi sur le boycottage d'Israël et des produits israéliens.
Le cheikh Akl Sami Abi el-Mona, chef religieux de la communauté druze, s'est également montré critique à l'égard du vicaire patriarcal et estimé que recevoir des fonds envoyés "à partir de la Palestine occupée, à travers la frontière, quelle qu'en soit la justification, est considéré comme de la collaboration avec un État ennemi". Une partie de l'argent que transportait l'évêque Hage devait aller à des familles notamment druzes et chiites. Il a donc appelé à ce que ces fonds "retournent d'où ils viennent". La veille, le leader druze Walid Joumblatt avait appelé au calme sur cette affaire, mais mis en garde contre "l'exploitation par Israël du clergé" libanais.
"Terrorisme intellectuel"
De leur côté, les députés du bloc du Renouveau Michel Moawad et Achraf Rifi, ont appuyé, depuis Dimane, la rhétorique mise en avant par Bkerké et dénoncé l'influence du Hezbollah derrière l'arrestation de Mgr el-Hage. "Nous n'avons gagné face à l'occupation syrienne que lorsque nous étions ensemble. Aujourd'hui, nous devons être main dans la main face à un projet autoritaire iranien incarné par la mafia et la milice", a lancé M. Moawad en faisant référence au parti chiite de Hassan Nasrallah, ouvertement pro-Iran. M. Moawad a ajouté : "Nous sommes ici pour renouveler notre appel à la confrontation, aux côtés de Bkerké et de toutes les personnes libres du Liban, face à un nouveau projet autoritaire. L'équation est claire : se soumettre ou s'opposer à une opération de terrorisme intellectuel, de trahison, et à l'ouverture de dossiers à la manière d'Adnan Addoum", ministre de la Justice et magistrat qui était, pendant l'occupation syrienne du Liban, accusé de couvrir les agissements du régime d'Assad.
Le député de Tripoli, Achraf Rifi, a abondé dans son sens : "Nous devons dire à l'Iran : +Sors de ce pays+", a-t-il affirmé. Il a également appelé à restreindre les compétences du Tribunal militaire "aux seuls militaires" et à faire face au Hezbollah.
En fin d'après-midi, l'ambassadeur d'Arabie saoudite au Liban Walid Boukhari s’est rendu à Dimane où il s’est entretenu avec le patriarche Raï.
Depuis l'arrestation de Mgr Hage, les réactions critiques se sont multipliées. Le président Aoun est, quant à lui, resté silencieux sur ce sujet, se contentant de recevoir vendredi matin l'archevêque de Haïfa au palais présidentiel de Baabda, mais aucune déclaration n'a été faite à l'issue de cet entretien.
Pourquoi le juge Bitar a été à maintes reprises stopper dans son travail suite à des plaintes farfelues des criminels et qu’aucun ministre n’a osé dénoncer l’entrave à la justice? Ils ne sont aptes à intervenir? Alors quel est leur rôle au juste et pourquoi sont ils ministres et gagneraient ils leurs salaires? Pour voir le train passe pendant qu’ils bêlent? Des vendus qui gangrènent le pouvoir voilà tout.
14 h 09, le 23 juillet 2022