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Société - Drame

Bâtiment effondré à Tripoli : un drame qui fait craindre une série noire

La ville est encore sous le choc de la mort d’une fillette dimanche, sous les décombres d’un immeuble vétuste. Les habitants sont inquiets, vu l’état d’autres constructions du même secteur.

Bâtiment effondré à Tripoli : un drame qui fait craindre une série noire

Les décombres de l'immeuble, hier. Souhayb JAWHAR

Les habitants du quartier de Dahr el-Maghar à Kobbé, Tripoli, se sont réveillés hier avec un goût amer : un tas de gravats est tout ce qu’il reste de l’immeuble effondré la veille, témoin du drame qui a coûté la vie à une fillette, Joumana el-Diko, et fait plusieurs blessés, dont la mère de la victime, Lina Kammoun, et une dame âgée évacuée sur une civière. Toute la nuit, les habitants de ce quartier, le plus pauvre de Tripoli, ont manifesté leur tristesse et leur colère. Beaucoup déclarent craindre pour le reste des bâtiments de la rue, tous aussi vétustes que celui qui s’est effondré.

En mauvais état, avec des murs lézardés depuis longtemps, le bâtiment s’élevait sur cinq étages. La plupart de ses habitants l’avaient déjà déserté, certains récemment et d’autres depuis deux ans. Seuls Khaled el-Diko et sa famille étaient restés sur place, même après qu’une consigne d’évacuation eut été lancée ces derniers jours. Leur situation financière ne leur permettait pas de déménager, affirment leurs voisins.

On ignore toujours ce qui a précipité la catastrophe, mais deux thèses circulent. La première fait état de la foudre qui a frappé le bâtiment lors de la courte tempête de samedi, suivie de pluies diluviennes, deux facteurs qui auraient fragilisé l’immeuble. La seconde hypothèse évoque un camion-benne qui avait heurté, il y a 6 ou 7 jours, l’un des piliers de la construction, fragilisant l’ensemble de l’immeuble. C’est depuis ce jour-là que la plupart des habitants avaient été encouragés à partir.

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Dans la capitale du Nord qui est aussi la ville la plus pauvre du pourtour méditerranéen, le bâtiment est loin d’être le seul en piteux état. De nombreuses autres constructions pourraient elles aussi s’effondrer. Hier, la présidente de la Commission nationale de l’immobilier, Indira el-Zouhaïri, a affirmé que l’immeuble qui s’est effondré est « l’un des 4 000 menacés » du même sort à Tripoli. Elle a également relevé que « de nombreux bâtiments sont sur le point de tomber, soit parce qu’ils ont été construits il y a longtemps et n’ont pas été entretenus depuis, soit parce que leurs propriétaires sont absents, ou encore parce que l’absence de contrôle gouvernemental sérieux a favorisé l’utilisation de mauvais matériaux lors de leur construction ».

Mme Zouhaïri a précisé qu’en raison de la crise économique, il y a un « risque accru d’effondrement des bâtiments du fait du coût élevé des matériaux de construction, alors que les salaires médiocres ne sont pas suffisants pour mener à bien le processus de restauration, de renforcement et de maintenance requis ».

« Nous avons entendu les cris et les appels au secours »

Ces risques, les habitants du quartier de Dahr el-Maghar en sont bien conscients. Out Nach’at, assise dans les décombres de l’immeuble sinistré, n’en croit toujours pas ses yeux. Cette mère de famille d’une cinquantaine d’années habite l’immeuble voisin, lui aussi vétuste et menacé d’un sort tout aussi dramatique. Out Nach’at contemple les débris, et les images du drame continuent de la hanter. « Le bâtiment a commencé à tomber lentement, pierre par pierre, puis son effondrement s’est accéléré, raconte-t-elle. En quelques instants, c’était fini. Nous avons entendu les cris et les appels au secours dès la première minute. »

Selon elle, la panique a régné dès les premiers instants dans le quartier. « Beaucoup ont cru à un tremblement de terre et ont fui, poursuit-elle. La petite Joumana, qui est morte dans l’incident, jouait souvent avec les enfants de ses proches dans ce quartier où elle a fini par trouver la mort, du fait de l’incapacité de l’État à assurer des domiciles dignes de ce nom aux habitants de Tripoli. »

Les plaintes concernant la vétusté des bâtiments dont les résidents n’arrivent pas à assurer la maintenance se multiplient dans le quartier. C’est ce qu’assure Jamil Ismaïl, ingénieur et habitant d’un bâtiment voisin de l’immeuble sinistré. « Nous demandons aux responsables de la ville d’assumer leurs responsabilités à ce niveau », affirme-t-il. Concernant les bâtiments menacés, il souligne que beaucoup ont été érigés illégalement et au mépris de toutes les lois et des principes architecturaux. « Nous avons déjà notifié de ce fait la municipalité de Tripoli, plus particulièrement le comité d’ingénierie, mais sans résultat », déplore-t-il.

La direction du patrimoine pointée du doigt

Le président du conseil municipal de Tripoli, Riad Yamak, a répondu hier aux critiques qui le visent. Dans une conférence de presse, il a réfuté « toute responsabilité » dans l’effondrement de l’immeuble et mis en cause la direction du patrimoine au ministère de la Culture, affirmant que celle-ci « refusait toute demande de rénovation des bâtiments vétustes, même lorsque le montant nécessaire était disponible. Cela, nous l’avons répété des dizaines de fois et nous le répétons aujourd’hui », a-t-il déclaré.

M. Yamak a plaidé pour « la tenue d’une enquête transparente afin d’identifier les responsables » du drame et rappelé que « la municipalité a rapidement envoyé de l’aide et pris les mesures d’urgence pour retirer les décombres et les pierres, afin de savoir si des victimes étaient ensevelies ». Selon lui, l’immeuble qui s’est effondré « fait partie de ceux qui sont menacés à Kobbé, à Bab el-Tebbané et autres, sur lesquels la municipalité a établi des rapports détaillés qui ont été envoyés aux services concernés », notamment à la direction du patrimoine du ministère de la Culture et au Haut Comité de secours.

Les habitants du quartier de Dahr el-Maghar à Kobbé, Tripoli, se sont réveillés hier avec un goût amer : un tas de gravats est tout ce qu’il reste de l’immeuble effondré la veille, témoin du drame qui a coûté la vie à une fillette, Joumana el-Diko, et fait plusieurs blessés, dont la mère de la victime, Lina Kammoun, et une dame âgée évacuée sur une civière. Toute la...

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Mr. Mikati c’est votre ville…..

Eleni Caridopoulou

19 h 17, le 28 juin 2022

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Commentaires (1)

  • Mr. Mikati c’est votre ville…..

    Eleni Caridopoulou

    19 h 17, le 28 juin 2022

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