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Lifestyle - Liban Pop

Nicolas Tawk, de la sensibilité et de l’humour pour casser les stéréotypes

Photographe, vidéaste et comédien de stand-up, il a décidé de changer de vie après un grave accident.

Nicolas Tawk, de la sensibilité et de l’humour pour casser les stéréotypes

Nicolas Tawk, humoriste, vidéaste et photographe. Photo DR

« Le stand-up m’a ouvert aux autres. Ça m’a appris beaucoup de choses sur le Liban. J’ai rencontré des personnes de toutes les communautés et de milieux différents et j’ai pu constater la richesse que nous avons », confie Nicolas Tawk, 31 ans, comédien de stand-up depuis quatre ans. « Je me souviens de la date exacte, c’était le 22 mai 2018, à mon 27e anniversaire. Je prenais des cours de théâtre à L’atelier du Je et j’avais envie de monter sur scène, de faire une carrière d’humoriste. J’ai rencontré Dany Abou Jaoudé, l’un des fondateurs d’Awkword, qui m’a encouragé à franchir le pas, mais j’avais peur. J’ai changé d’avis à plusieurs reprises, je me désistais à la dernière minute. Le jour de mon anniversaire, j’ai pris mon courage à deux mains… J’avais sur moi un papier où j’avais noté des idées en 2013. Aujourd’hui encore, je le garde précieusement », note cet acteur, photographe et vidéaste.

Les nus de Nicolas Tawk, souvent censurés. Photo DR

Sur scène, Nicolas Tawk raconte son appartenance à Bécharré et ses sketches tournent autour de certains stéréotypes courants. « Je suis né à Bécharré et j’ai grandi dans la banlieue de Beyrouth, mais j’ai préservé cet attachement à mon village. Petit à petit, en grandissant, j’ai été confronté à la perception et aux idées que les autres en ont. Mon impression de la vie se limitait à ce que mes parents m’avaient inculqué à travers mon éducation et leurs habitudes, et j’avais moi aussi en tête des clichés sur les personnes appartenant à d’autres régions et d’autres communautés religieuses du pays », explique-t-il. « On pense souvent que toute personne originaire de Bécharré appartient aux Forces libanaises, fume du haschisch, est profondément croyante et jure comme un charretier. Je ne fume pas de haschisch… Je me suis tellement impliqué dans la vie de l’Église que je me suis rendu deux fois au Tchad, avec des missionnaires, pour faire du volontariat. Sur scène, je parle de moi et de ma vie », ajoute-t-il.

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C’est ainsi qu’il apparaît sur scène, parlant avec sa mère au téléphone alors qu’il est atteint du Covid-19. « Comment vas-tu ? Avec qui tu es à la maison ? » lui demande-t-elle. « Maman, je suis seul ! Avec qui veux-tu que je sois ?

L’esprit de mon grand-père ? » répond-il. Elle enchaîne : « La Sainte Vierge, saint Joseph, saint Charbel et tous les saints sont avec toi, tu n’es pas seul ! » Et Nicolas Tawk de s’imaginer jouant au Monopoly avec saint Charbel, faisant le signe de la croix avant de jeter les dés, dans l’incapacité de tricher, car « les saints connaissent nos intentions à l’avance », et ne pouvant même pas se construire une maison car tous les terrains au Monopoly appartiennent… à l’Église.

Les nus de Nicolas Tawk, souvent censurés. Photo DR

La fragilité de la vie

Nicolas Tawk évoque aussi sur scène et avec un humour tendre et transparent son expérience de moniteur pour enfants où déguisé en père Noël et se rendant dans une maison pour remettre des cadeaux aux enfants, la maîtresse des lieux lui demande de descendre par la cheminée. C’est que, avant de devenir comédien et photographe, Nicolas Tawk avait une autre vie. Il était architecte et moniteur pour enfants. Il se souvient d’une autre date : « Le 17 septembre 2016, j’ai eu un accident de travail. J’étais sur un chantier et je suis tombé de cinq mètres de haut, atterrissant sur mes chevilles qui se sont fracturées. » Il passe un an et demi à se faire soigner, reste de longs mois en convalescence à la maison, dont quatre immobilisé sur une chaise roulante. « J’ai dû réapprendre à marcher. Durant ces moments de solitude, j’ai pensé à ma vie. J’ai fait le tri de mes amis et j’ai réfléchi à ce que j’allais faire. J’ai réalisé à quel point tout était fragile et qu’il fallait être heureux et faire les choses qu’on aime. J’ai donc décidé de ne plus faire un métier à horaires fixes, de 9 heures à 17 heures. J’ai décidé de laisser tomber de nombreuses activités aussi et je suis devenu photographe », raconte-t-il.


Le comédien, pour qui la photographie figurait parmi ses hobbies, se met aux photos professionnelles. « J’ai commencé avec des photos de nature que j’ai pu vendre, j’ai travaillé sur des projets pour des ONG et des entreprises puis j’ai commencé à faire des portraits professionnels et des photos de nus. » Ces nus, qui dévoilent des corps dans leurs différences, qu’ils soient beaux, gros ou amoindris par la maladie, ont été censurés sur Instagram. Ces clichés en couleur ou en noir et blanc artistique, et qui ne sont pas sans rappeler les sculptures d’Auguste Rodin et les danseuses d’Edgar Degas, n’ont en fait rien de choquant. « J’ai eu des problèmes à trois reprises, mais je sais maintenant comment gérer les photos et surtout les commentaires pour éviter des ennuis à venir. »

Les nus de Nicolas Tawk commencent à figurer dans des expositions, dont une à l’ABC Verdun organisée pour la Journée mondiale de la femme. « La majorité de mes nus sont des commandes. De nombreuses personnes n’ont pas de problème avec la nudité de leur propre corps, même si le sujet reste tabou au Liban. D’ailleurs, j’ai créé mon compte Instagram pour briser ce tabou et faire bouger les choses », dit-il. Quand il n’est pas devant son audience ou derrière l’objectif, Nicolas Tawk passe son temps à Bécharré, son village natal – avec ses cèdres, sa neige et son vent glacé en hiver – qu’il préfère de loin à Beyrouth. Et pense à de nouveaux sujets pour faire rire son public… Avec cette même pureté.


« Le stand-up m’a ouvert aux autres. Ça m’a appris beaucoup de choses sur le Liban. J’ai rencontré des personnes de toutes les communautés et de milieux différents et j’ai pu constater la richesse que nous avons », confie Nicolas Tawk, 31 ans, comédien de stand-up depuis quatre ans. « Je me souviens de la date exacte, c’était le 22 mai 2018, à mon 27e...

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