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Nos Lecteurs ont la Parole

Arrêtez de nous martyriser

Après la double explosion au port de Beyrouth, le président Macron est venu partager la terrible et juste douleur des innocentes victimes à la fois des pompiers, de la Défense civile et des civils tout court.

Une présence compassionnelle de plusieurs heures avec accolades et bain de foule dans les quartiers dévastés ayant relégué le chef de l’État libanais au deuxième plan, perçu comme une personne insensible encombrant un tableau idyllique, celui de la mère affectueuse « al-oum al-hanoun » accourue au chevet de son enfant blessé et malmené !

La passion n’obéit pas beaucoup au cartésianisme de la raison et à son pragmatisme, ce qui fait dire que le cœur a des raisons que la raison ne peut souvent pas comprendre !

Ce n’est pas rien si, un jour de 1941 et à Beyrouth même, un général résistant du nom de De Gaulle a déclaré devant le public libanais réuni, pour un discours solennel resté depuis dans les annales : « Les Libanais sont (et je pense resteront), à travers l’histoire et quels qu’aient été les malheurs, les souffrances et les destinées de la France, le seul peuple dont le cœur n’a jamais cessé de battre au rythme (de celui) de la France. » Depuis le grand Charlemagne et son contemporain le calife abbasside Haroun al-Rachid, les chrétiens libanais (mais pas que) ont toujours bénéficié de la protection et de l’assistance de la France dans tous les domaines... On peut toujours compter sur elle depuis longtemps, et ce bien avant, pendant et après les croisades...

D’ailleurs, faut-il le rappeler encore, la première croisade doit sa réussite à l’aide décisive militaire alimentaire et logistique du wali chiite et de la population (chiite à l’époque) de Tripoli, première ville côtière charnière à accueillir, ravitailler et requinquer les premières légions croisées arrivées exténuées par le long périple européen de la route vers Jérusalem...

Bien moindres et modestes seront par la suite les aides apportées par les maronites de la montagne au détroit goulot de Nahr el-Kalb permettant l’ouverture du chemin côtier vers Beyrouth, puis Tyr, puis la Terre sainte.

Déjà, il y avait un parfum d’alliance des minoritaires... chiites et chrétiens.

Après les croisades et saint Louis, rien ne changera, ni avec Louis XIV ou Louis XV, et l’épopée indépendantiste de Fakhreddine et des princes Maan, ni avec Napoléon Ier encerclé à Saint-Jean-d’Acre, ni avec Louis Napoléon le neveu intervenant contre les massacres de 1840/1860, arrachant (fait rarissime dans le califat) l’autonomie de la « moutassarrifiya » de la montagne libanaise et ses deux caïmacats au sein d’un Empire ottoman centralisateur.

Faut-il rappeler que tous les attributs de l’état libanais actuel, routes, chemins de fer, centrales électriques, réseau d’eau potable, égouts, ministères, casernes, université, hôpital, aménagement du port et aéroport, etc., tous ces domaines constitutifs d’un État, en plus des droits civil et pénal, sont des legs du mandat français ?

Alors, on est en droit de poser quelques questions aux autorités françaises : l’amour sans limite que ce cœur libanais voue à la France ne comprend pas trop la politique de ce pays, tout au moins depuis la double explosion au port...

Comment se fait-il, par exemple, qu’un gouverneur de banque centrale poursuivi par des parquets européens pour des faits extrêmement graves, y compris le parquet français, continue à occuper ses fonctions ?

Comment peut-elle cautionner que des hommes politiques corrompus ayant détourné en bandes organisées plus de 200 milliards de dollars d’argent des contribuables et dépositaires libanais et étrangers puissent rester en place à des postes-clés (ministres ou élus) sans être inquiétés le moins du monde quand on sait que les Carignon, Cahuzac ou Balkani ont fait de la prison ferme et que le « libanophile » Jacques Chirac n’en a échappé que par le sursis, en attendant le sort qui sera réservé à Sarkozy ou Fillon !

Comment, vu l’urgence de la détresse alimentaire et sanitaire où se trouvent des millions de Libanais actuellement, la notion d’ingérence humanitaire chère à l’ami Bernard Kouchner, fondateur de Médecins sans frontières, tarde à trouver une solution, avec ou sans ONG interposées ?

Monsieur Macron, beaucoup de choses dans la politique actuelle de la France ont l’air contradictoires ! Il ne faut jamais pactiser ou faire l’armistice avec la tyrannie ! Imaginez un instant que vous auriez décidé de laisser l’Ukraine seule face à son bourreau envahisseur.

Aujourd’hui, le Liban agonisant se tourne encore une fois vers la France au rendez-vous de l’histoire, aidez-le à survivre encore une fois...

Beaucoup de Libanais ont les yeux rivés vers le nouveau gouvernement français, où une des leurs vient d’entrer pour la première fois comme ministre dans la Ve République.

Faut-il rappeler que ce Liban, lâché de tous et de toutes parts, sans électricité étatique, à court de tous les produits de première nécessité, a longtemps été une terre d’accueil pour la misère du monde : Arméniens, Kurdes, Palestiniens et, depuis 10 ans presque, deux millions de Syriens, dans un pays de cinq millions d’habitants déjà à l’étroit dans quelque 10 mille km2...

la taille du département de la Gironde ?!


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Après la double explosion au port de Beyrouth, le président Macron est venu partager la terrible et juste douleur des innocentes victimes à la fois des pompiers, de la Défense civile et des civils tout court.Une présence compassionnelle de plusieurs heures avec accolades et bain de foule dans les quartiers dévastés ayant relégué le chef de l’État libanais au deuxième plan,...

commentaires (1)

Quel bel article , félicitations. Pauvre Liban il est délaissé par tout le monde , merci Hezbollah et Iran ???

Eleni Caridopoulou

17 h 10, le 07 juin 2022

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Commentaires (1)

  • Quel bel article , félicitations. Pauvre Liban il est délaissé par tout le monde , merci Hezbollah et Iran ???

    Eleni Caridopoulou

    17 h 10, le 07 juin 2022

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