
Le patriarche maronite, Béchara Raï, se préparant à célébrer la messe à Baabdate, le 5 juin 2022. Photo fournie par notre correspondante Hoda Chedid
Le patriarche maronite, Béchara Raï, a critiqué dimanche la "réticence" du ministre sortant des Finances, Youssef Khalil, à signer un décret de nominations judiciaires qui devrait permettre une reprise de l'enquête sur la double explosion du 4 août 2020 au port de Beyrouth, se demandant si les responsables qui bloquent cette instruction "n'ont pas honte face aux familles des victimes" de cette catastrophe.
La tirade du patriarche a été lancée au lendemain de commémorations pour les 22 mois écoulés depuis le drame qui a fait plus de 220 victimes et des milliers de blessés. Après leur sit-in mensuel devant le port, les proches des victimes avaient manifesté devant le domicile du ministre sortant des Finances, ce qui avait poussé celui-ci à publier un communiqué dans lequel il a annoncé qu'une "solution sera trouvée dans les prochains jours pour signer ce décret", sans préciser en quoi consiste cette solution.
"Malheureusement, les parties politiques se moquent du fait que le peuple a faim et est appauvri. Nous n'aurions jamais imaginé que l'indifférence des responsables atteigne un tel niveau", a déploré Mgr Raï lors d'une messe à Baabdate, célébrée en l'honneur de la béatification de Léonard Melki et Thomas Saleh, deux prêtres de l’ordre des Frères mineurs capucins tués en Turquie respectivement en 1915 et en 1917.
Appel à la "lutte"
Revenant sur les différents éléments de la "catastrophe" socio-économique que traverse le pays, augmentations de prix, pénuries, chômage, émigrations, le dignitaire maronite a critiqué le fait que "certains juges sont devenus des outils policiers aux mains des dirigeants et des personnes influentes". "La vengeance est devenue le moteur des convocations et poursuites en justice et des arrestations", a-t-il dénoncé, tandis que des décisions judiciaires sont "obstruées".
"De grands dossiers sont gelés, par plusieurs biais, à commencer par l'instruction sur l'explosion au port de Beyrouth", a-t-il ajouté, dénonçant "la réticence" du ministre Khalil à signer un décret de nominations judiciaires. Les responsables mis en cause dans l'instruction "n'ont-ils pas honte face aux proches des martyrs du port ?", a-t-il lancé, appelant le peuple "qui voit le jeu des intérêts qui se renouvelle après les législatives, à se préparer à lutter pour récupérer ses droits et empêcher la chute du Liban".
Près de deux ans après le drame, l'enquête piétine toujours à cause de multiples manœuvres politiques. Elle est actuellement suspendue en raison des nombreux recours à l'encontre du juge Tarek Bitar en charge du dossier, présentés par de hauts responsables politiques, dont les députés Ghazi Zeaïter, Ali Hassan Khalil (tous deux membres du mouvement Amal, dont est proche le ministre Khalil) et l'ancien ministre des Travaux publics Youssef Fenianos.
Après avoir rendu hommage au militaire décédé vendredi suite à des affrontements à Baalbeck, le patriarche a souligné que l'armée est "la force principale pour veiller sur la sécurité du Liban", estimant que cela "fait partie des critères qui doivent être reconnus" par toutes les parties pour permettre un "dialogue national" fructueux, que celui-ci soit lancé "sous patronage étranger ou lors d'une rencontre en interne". "Il y a au Liban des formations officielles et politiques qui nient cet élément et veulent créer un pays qui est déconnecté de son histoire", a-t-il lancé, ce qui selon lui "entrave d'avance tout dialogue". "Il est inacceptable que l'Etat soit le maillon le plus faible de la nation et que les partis politiques se regardent l'un l'autre comme des ennemis alors que le pays a un besoin pressant d'une réconciliation", a encore dit Mgr Raï.
"Convoitises"
De son côté, lors d'une messe en la cathédrale Saint Georges à Beyrouth, le métropolite grec-orthodoxe, Elias Audi, a indiqué que l'unité du Liban "repose sur sa reconnaissance en tant que tel par toutes les parties, sans que personne ne cherche à annuler l'autre".
Il a déploré que le Liban "soit devenu un exemple pour la corruption et la fragmentation en raison des convoitises de ceux qui ne sont jamais rassasiés". Le métropolite est également revenu sur un incident, plus tôt cette semaine à Beyrouth, lorsque des proches de Badri Daher, ancien responsable des douanes au port de Beyrouth et en détention pour son implication présumée dans le stockage du nitrate d'ammonium à l'origine de l'explosion, ont accroché une pancarte sur la place Sassine appelant à sa libération "au lieu de réclamer des progrès dans l'enquête afin que la vérité soit faite pour tout le monde", selon Mgr Audi.
Le patriarche maronite, Béchara Raï, a critiqué dimanche la "réticence" du ministre sortant des Finances, Youssef Khalil, à signer un décret de nominations judiciaires qui devrait permettre une reprise de l'enquête sur la double explosion du 4 août 2020 au port de Beyrouth, se demandant si les responsables qui bloquent cette instruction "n'ont pas honte face aux familles des victimes" de...
commentaires (8)
On ne peut pas dire que vous ayez donné le bon exemple dans la crise que traverse notre pays en matière d’empathie et de solidarité vis à vis des libanais qui souffrent. Vous avez certes beaucoup prêcher dans le vide, toujours pour ne rien dire avec vos plus beaux apparats ou on ne peut pas prétendre ne pas vous voir. mais ça s’arrête là. vos actions contradictoires et balbutiantes n’ont fait que renforcer ces prétendus protecteurs des chrétiens que vous avez ménagé pendant longtemps et que vous continuer à le faire en utilisant la la langue de bois pour les sermonner. Aucun chrétiens ne peut attester de la charité de vos semblables bien au contraire, les écoles, les loyers et les autres commerces que vous tenez se sont vues à la hausse tout comme celles des vendus que vous infligez à ce pauvre peuple. Pour le coup on ne sait plus à quel saint se vouer.
Sissi zayyat
12 h 08, le 06 juin 2022