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Nos Lecteurs ont la Parole

Tartare d’oranges amères

Déjeuner dominical : « Kebbé arnabieh ». Vous savez le truc à base de citrons, de clémentines et de « bou sfeir » ? Plus acide, tu meurs, et surtout plus lourd… tu meurs. Mais Dieu que c’est bon !

Si je savais que quelques heures plus tard, j’allais assister à la déconfiture de la marmelade d’oranges amères, je n’aurais pas cherché à faire disparaître toute cette acidité. Bon, il ne faut pas être méchant ! Ce n’est qu’un revers, pas trop grand quand même. L’honneur est sauf ! Sauf que…Reprenons notre sérieux ! Tout le monde s’est bien battu, bec et ongles, avec une participation honorable aux femmes et mieux, une percée de la société civile. Pourtant, tout avait bien commencé : une ambiance chaude, des néons, des couleurs, les doux ronronnements des moteurs et autres générateurs et une absence totale de folie collective. C’en était presque décevant. Pourtant, des banderoles, ce n’est pas ce qui manquait, des rouges, des jaunes, des vertes, des bleues, des mûres, des défraîchies, des décollées, des recollées et du baratin entre ceux qui veulent combattre et ceux qui veulent résister, ceux qui préconisent l’intellect et ceux qui font prévaloir la force, ceux qui ont des visions futuristes avec une guerre des étoiles revisitée et ceux qui, à défaut d’en être, voient déjà les extraterrestres et les machines nous remplacer. Franchement, c’était un beau décor, entre les sourires « Hollywood Smile » et les airs renfrognés de gens qui se la pètent un peu trop, entre les visages poupons et les poupées gonflables, entre le népotisme qui crève les yeux et d’autres qui ne font que succéder sans proposer du renouveau mais une simple continuité avec plus d’épices, la question s’était posée : était-ce la chronique d’une mort annoncée? Allons-nous revivre cent ans de solitude ? Ou la vérité est-elle si violente qu’un édifice de trente ans va vaciller ? S’écrouler, il est encore tôt pour avancer de telles affirmations. Par contre, la partie drôle de nos élections était que les chantres du renouveau, ceux qui sont descendus manifester ou – pour ceux qui s’en rappellent – ont même formé la chaîne de l’espoir en 2019, ont souvent voté pour les homonymes déclarés de ceux qui ont voulu se retirer de la scène politique. Nous ne doutons pas du bien-fondé de leur choix et que la liste choisie mérite considération et respect avec des têtes bien faites (sur les panneaux du moins!) et des titres pompeux. Il nous fallait du vrai nouveau. Les gens n’ont pas compris. De l’audace! De l’audace et encore de l’audace ! Personne n’a réellement compris le sens de ce qui fut appelé « la thaoura ».

Certes, depuis le temps, le terme est devenu désuet tellement ses conséquences ont été catastrophiques. Encore heureux que dans certains cercles, certains osent le prononcer timidement. Mais il a été remplacé par des termes plus politiquement corrects, comme contestataires ou « nouvelles têtes ». Entendons-nous, les contestataires sont la société civile à tester. S’il y en a eu 15, c’est qu’il y en a quelques-uns de bien.

Par contre, les nouvelles têtes (futurs carbonisés de la république) sont ceux qui ont été sciemment – et intelligemment – choisis par les partis politiques et inconnus du grand public pour faire la promotion du bien commun et se mettre au service de la communauté. Qu’ils soient partisans affiliés ou pas, ils ont de bonnes bouilles et, en principe, savent penser. Enfin, une fois dans l’hémicycle, c’est étrange comment cette faculté soudainement s’amenuise chez certains pourtant mus des meilleures intentions du monde. D’ailleurs, l’enfer n’en est-il pas pavé ? Et puis les grands partis se disputent la majorité à un député près. On se croirait à un jeu de bataille navale. Mais qui s’en fout qui a le plus de députés ? L’essentiel, c’est ce qui va suivre. Franchement, entre des fruits rassis et des fruits pas encore mûrs, il n’y a même pas de quoi faire une bonne compote. Bref, à défaut d’avoir un bon cru, nous terminerons sans doute avec une piquette.

Non ! Non ! Je ne veux pas être méchant. Il y a du nouveau. Il y a des idées. Il y a des gens qui veulent travailler (même si on ne va pas les laisser!). Il y a du punch !

Restons positifs. J’apprenais plus tard que mon tartare d’oranges amères s’était transformé en fruits de la passion et que finalement, la vie a été belle pour tout le monde.

L’essentiel est que tout le monde continue à exister et le nouveau débat repose sur la question principale shakespearienne : « To Berry or not to Berry ? » Franchement, la « kebbé arnabieh », cette année, n’est pas digeste. J’espère qu’on ne regrettera pas nos fruits.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Déjeuner dominical : « Kebbé arnabieh ». Vous savez le truc à base de citrons, de clémentines et de « bou sfeir » ? Plus acide, tu meurs, et surtout plus lourd… tu meurs. Mais Dieu que c’est bon !Si je savais que quelques heures plus tard, j’allais assister à la déconfiture de la marmelade d’oranges amères, je n’aurais pas cherché à faire...

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