Rechercher
Rechercher

Politique - Liban-Législatives 2022

Premier jour de vote pour la diaspora : ce qu'il faut retenir

Taux de participation, comparaison avec 2018, principaux enjeux... Lecture à chaud du scrutin organisé dans neuf pays arabes ainsi qu'en Iran.

Premier jour de vote pour la diaspora : ce qu'il faut retenir

Une expatriée libanaise cherche son nom sur la liste d'électeurs avant de voter pour les législatives à l'ambassade du Liban au Caire, le 6 mai 2022. REUTERS/Amr Abdallah Dalsh

Redouté par les uns, courtisé par les autres, le vote de la diaspora pour les élections législatives de 2022, dont la tenue était jusqu'à la dernière minute incertaine, est devenu vendredi réalité. Plus de 225 000 Libanais résidant à l'étranger sont inscrits sur les listes électorales, une forte augmentation par rapport à 2018, lorsque 92 000 d'entre eux étaient inscrits - avec seulement 50 000 se rendant finalement aux urnes. Hier, le scrutin a été organisé pour les 30 390 inscrits parmi les Libanais qui vivent dans les pays du Moyen-Orient chômant le vendredi : Arabie saoudite (13 105 inscrits dont 6 456 ont voté, soit 49,3%), Koweït (5 760, dont 3 778 ont voté, soit 65,6%), Qatar (7 345, dont 4 872 ont voté, soit 66,3%), Bahreïn (638, dont 424 ont voté, soit 66,5%), Égypte (709, dont 312 ont voté, soit 44,01%), Oman (903, dont 600 ont voté, soit 66,4%), Jordanie (483 dont 288 ont voté, soit 59,6%), Irak (327, dont 157 ont voté, soit 48%), Syrie (1 018, dont 853 ont voté, soit 83,8%) et Iran (642, dont 474 ont voté, soit 73,8%). Dimanche, ce sera au tour des Libanais vivant en Europe, aux États-Unis, au Canada, en Australie, en Asie mais aussi aux Émirats arabes unis de faire entendre leur voix. Le vote de la diaspora est considéré comme un des principaux enjeux de ce scrutin législatif prévu le 15 mai au pays du Cèdre, de nombreux Libanais y voyant une opportunité pour un véritable changement au Liban, deux ans après le début d'une crise économique sans précédent ayant déclenché un exode massif.

Abstention sunnite ?
Au total, ce sont 18 214 électeurs, soit 58,9% des inscrits, qui se sont donc rendus aux urnes. Si ce taux de participation est inférieur à celui de 2018 dans les pays du Moyen-Orient (65 %), il reste néanmoins supérieur aux pronostics de nombreux observateurs, qui s’attendaient à une faible mobilisation, notamment du fait du nombre limité de bureaux de votes mis à disposition des électeurs (entre 1 et 2 par pays). La mobilisation est d’autant plus satisfaisante que le nombre d’inscrits a fortement augmenté. En 2018, le nombre d’inscrits en Arabie saoudite, au Qatar, au Koweït, en Égypte et à Oman était de 7 449, contre 27 822 électeurs inscrits cette fois-ci dans ces cinq pays. Cette mobilisation massive pourrait être avantageuse pour les forces de la contestation. « En 2018, les électeurs en Arabie saoudite et dans les pays du Golfe ont été plus enclins à soutenir la société civile que leurs concitoyens au Liban ou dans d’autres pays. Le courant du Futur a également profité d’un soutien important chez ces électeurs », explique l’experte électorale Georgia Dagher.

Or, le Futur est absent de ce scrutin, son leader Saad Hariri ayant annoncé le retrait de sa formation de la vie politique en février dernier, plongeant ses électeurs sunnites dans l’incertitude. Résultat, l’ambassadeur libanais en Arabie saoudite (où 56 % des Libanais inscrits sont sunnites) a déclaré à la chaîne libanaise LBCI que les régions où cette communauté est majoritaire - Tripoli, Beyrouth II, Akkar et Saïda - ont connu les taux d’abstention les plus élevés. Le Chouf, où notamment le Parti socialiste progressiste de Walid Joumblatt mais aussi les Forces libanaises de Samir Geagea ont une forte présence, serait par contre la région où le taux de participation était le plus élevé.

Où sont-ils ? Focus sur les électeurs de la diaspora

Où sont-ils ? Focus sur les électeurs de la diaspora

Appelés à commenter ces indications, un conseiller de l’ancien Premier ministre Fouad Siniora, qui mène des efforts dans plusieurs régions pour combler le vide laissé par Saad Hariri sur la scène sunnite et empêcher le Hezbollah pro-iranien d’en profiter, indique qu’il est encore trop tôt pour en tirer des conclusions concernant la participation au scrutin sur le territoire libanais.
M. Hariri est assujetti à des pressions importantes de la part de Riyad, qui soutient M. Siniora dans ses efforts, pour inviter ses électeurs à se rendre massivement aux urnes, malgré le boycott de sa formation. Des médias proches du pouvoir saoudien ont même accusé Saad Hariri d’avoir « trahi » le sang de son père (l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, assassiné en 2005) et les sunnites au Liban. Dar el-Fatwa, la plus haute autorité religieuse sunnite au Liban, s'est également joint à ces efforts, en invitant les fidèles à se rendre aux urnes massivement pour « sortir le Liban des griffes des corrompus ».

Bataille chrétienne
La participation importante en Arabie saoudite pourrait également profiter aux Forces libanaises, principal allié de Riyad au Liban. Des représentants de la machine électorale du parti se sont fait remarquer par leur présence massive aux alentours des bureaux de vote à Riyad et à Jeddah.
« Les électeurs de la diaspora sont naturellement des souverainistes qui ne voteront pas pour ceux qui ont détruit leur pays, mais plutôt pour ceux qui portent un projet de paix, de prospérité et de stabilité », commente Charles Jabbour, responsable médiatique des FL, contacté par L'OLJ.

L'ambassadeur du Liban en Arabie saoudite Faouzi Kabbara lors de la journée de vote à Riyad, le 6 mai 2022. REUTERS/Ahmed Yosri

M. Jabbour ajoute que le taux de participation « important » est une gifle pour ceux qui « voulaient empêcher les expatriés de participer au scrutin via des manigances politiciennes », en allusion au rival du parti de Samir Geagea sur la scène chrétienne, le Courant patriotique libre de Gebran Bassil. Du fait de son intransigeance sur des questions comme la création d’une 16ème circonscription propre à la diaspora ou l’édification de mégacentres, le parti fondé par le président Michel Aoun était durant ces dernières semaines régulièrement accusé par ses détracteurs, notamment les FL, de vouloir torpiller le scrutin à l'étranger, de crainte d'un vote sanction, notamment en raison des sévères crises qui ont ponctué le mandat du chef de l’État. Ce scrutin est en effet le premier depuis le soulèvement populaire qui, en octobre 2019, a mené des milliers de Libanais dans la rue pour exiger le départ d'une classe politique accusée de corruption et d'incompétence. La crise économique inédite que traverse le Liban, couplée à la pandémie de Covid-19 et l'explosion meurtrière au port de Beyrouth en août 2020, a essoufflé ce mouvement. De nombreux Libanais des classes moyennes ont depuis quitté le pays à la recherche d'un avenir meilleur. Du côté du parti orange, on nie catégoriquement toute intention de priver les non-résidents de leur droit de vote. « Pour rappel, c’est le CPL via l'ancien ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil qui a permis aux expatriés de voter pour la première fois en 2018. Même dans le cas où les résultats ne sont pas à notre avantage, nous sommes heureux de voir que la mobilisation est importante », affirme Rindala Jabbour, une cadre du CPL.

Mobilisation chiite
Cette mobilisation était la plus importante en Syrie (83,8%) et en Iran (73,8%) - deux pays qui n’avaient pas participé au scrutin en 2018 et qui forment, avec le Hezbollah, « l’axe de la Résistance » - où, il faut cependant le rappeler, le nombre d'inscrits est faible. « Du fait de leur positionnement politique et de la nature de leur régime, il faut probablement s’attendre à un soutien massif des expatriés résidant dans ces pays aux forces du 8 Mars », suppute Georgia Dagher. Cette mobilisation pourrait profiter également, selon elle, à d'autres formations hostiles au Hezbollah. En effet, si en Iran, l’écrasante majorité des inscrits (99 %) sont chiites, l'électorat est beaucoup plus diversifié en Syrie, où les druzes représentent 37 %, les chiites 35 % et les sunnites 25 %.

Des expatriées faisant la queue pour voter à l'ambassade du Liban à Téhéran, le 6 mai 2022. AFP

Redouté par les uns, courtisé par les autres, le vote de la diaspora pour les élections législatives de 2022, dont la tenue était jusqu'à la dernière minute incertaine, est devenu vendredi réalité. Plus de 225 000 Libanais résidant à l'étranger sont inscrits sur les listes électorales, une forte augmentation par rapport à 2018, lorsque 92 000 d'entre eux étaient inscrits - avec...

commentaires (3)

rectificatif utile :l'article emet le chiffre de "" 30 390 Libanais vivant dans les pays du Moyen-Orient "" pas possible, ce chiffre indique le nombre de ceux INSCRITS dans les ambassades au MO,certainement pas ceux non pas ceux qui y vivent.

Gaby SIOUFI

09 h 53, le 07 mai 2022

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • rectificatif utile :l'article emet le chiffre de "" 30 390 Libanais vivant dans les pays du Moyen-Orient "" pas possible, ce chiffre indique le nombre de ceux INSCRITS dans les ambassades au MO,certainement pas ceux non pas ceux qui y vivent.

    Gaby SIOUFI

    09 h 53, le 07 mai 2022

  • il est des chiffres dont nous n'avons pas les details, pourtant tres interessants a connaitre: le pourcentage des inscrits par rapport aux citoyens libanais expatries, ne serait ce qu'inscrits en tant que tels aupres de nos ambassades. pas difficile a fournir.

    Gaby SIOUFI

    09 h 13, le 07 mai 2022

  • Quid de l'Afrique? Toujours aussi regrettable d'identifier les électeurs Libanais en fonction de la confession religieuse... Un mauvais réflexe? Je suis ravi de voir une photographie prise à Téhéran, un aperçu de nos plus belles régions libanaises

    Georges Olivier

    08 h 10, le 07 mai 2022

Retour en haut