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Culture - Entretien

« Les Libanais ont l’art de rester vivants dans un quotidien sans visibilité »

« Les Libanais ont l’art de rester vivants dans un quotidien sans visibilité »

Cécile Longé : « Je serai toujours redevable à ce pays d’avoir accueilli ma pièce de théâtre. » Photo DR

De son séjour au Liban comme consule générale en 2013-2017, Cécile Longé a développé de très fortes amitiés et conservé un attachement très fort pour ce pays. Les crises économique et sociale que traverse le Liban depuis 2019, ponctuées par la double explosion du 4 août 2020, lui a donné l’envie de contribuer, à la mesure de ses moyens mais avec conviction, à maintenir vivace ce qui fait l’âme et toute la singularité de ce pays. La langue française et la culture francophone en sont bien sûr des éléments déterminants. Elle écrit la pièce de théâtre Antoura, sentier de la lune en 2020. Aujourd’hui coproductrice et membre de la troupe de comédiens, elle a mobilisé plus de 20 professionnels du spectacle vivant, tous des Libanais résidant au Liban.

La troupe au complet de « Antoura, sentier de la lune ». Photo DR

Pourquoi Antoura ?

Antoura est la matrice de la pièce. Collège lazariste, c’est un établissement très ancien particulièrement attachant. Il a été le berceau de la langue française, le cœur battant de l’enseignement. C’est un lieu avec lequel la France a entretenu des liens très étroits. Antoura possède des archives magnifiques qui évoquent les relations entre la France et le Liban. J’ai été inspirée par la beauté de ce lieu, par l’esprit qui y souffle, et par son histoire tragique tourmentée et très belle. La pièce est profondément libanaise par son ancrage géographique.

Décrivez-nous votre expérience libanaise...

Elle a commencé assez tardivement, en 2008, avec plusieurs missions au Liban dans le cadre de mes fonctions successives, s’est prolongée durant mon mandat de quatre années comme consule générale de France en 2013-2017 et n’a toujours pas pris fin. J’ai séjourné au Liban au cours de mon mandat d’ambassadrice à Bahreïn (2017-2019), j’y ai passé une année de césure en 2019-2020, comme étudiante en arabe à l’USJ, j’y suis revenue plusieurs fois depuis le 4 août 2020 – dont j’ai été témoin direct. M’y voici pour deux mois dans le cadre de cette pièce de théâtre, écrite en 2020 et dont un thème essentiel est précisément l’épopée d’une famille libanaise exilée dont les membres sont liés malgré eux par un secret d’enfance niché au cœur du Mont-Liban. Mon expérience libanaise est donc professionnelle et aujourd’hui artistique. Et de tout temps, humaine et amicale.

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Si vous deviez inviter les Français à venir visiter ce pays, que leur diriez-vous pour les convaincre ?

Je leur dirais que l’accueil qui leur sera réservé compensera amplement les inconforts éventuels et que les découvertes qu’ils feront en sortant des sentiers battus leur parleront mieux que je ne saurais le faire.

Qu’est-ce qui rapproche (à part la langue) les Libanais des Français ?

Une histoire d’amitié séculaire, un fait rare dans l’histoire mondiale des peuples. Tout le reste, la langue, la culture, les valeurs, en découle.

Qu’est-ce que le Liban vous a apporté et quelle leçon acquise au Liban aimeriez-vous partager avec le reste du monde ?

Vous m’excuserez de faire usage du terme si galvaudé de résilience, que les Libanais eux-mêmes, exaspérés par les épreuves en tout genre, récusent désormais. Mais ce terme résume au mieux ce qui me vient à l’esprit pour vous répondre : un art de rester vivant et vibrant dans un quotidien sans visibilité et de retrouver à chaque détour les raisons d’en rire plutôt que d’en pleurer.

À la suite de votre expérience libanaise, qu’est-ce que vous aimeriez modifier dans la vie quotidienne française et dans les rapports humains ?

Il est délicat de se livrer à un tel exercice, mes compatriotes savent faire preuve d’un élan de solidarité extraordinaire et leur quotidien n’est pas uniforme. Mais il reste que quelque chose me manque dès que j’atterris en France et qui serait, disons, une forme d’immédiateté dans la relation, de bienveillance a priori, qui rend le quotidien au Liban plus reposant, plus inspirant aussi, pour la Française que je suis.

Que manque-t-il au Liban pour qu’il devienne une destination de rêve ?

Il lui manque d’inspirer à sa jeunesse et à ses forces vives la confiance suffisante pour y rester, pour y construire leur vie et pour participer, précisément, à développer ses immenses potentialités.

Y a-t-il une part de vous qui est libanaise aujourd’hui, et si oui, laquelle ?

Certainement. Ne serait-ce que parce que ma fille Diane s’y est implantée et que j’y compte des amitiés jusqu’ici non démenties. Et puis, je serai toujours redevable à ce pays d’avoir accueilli ma pièce de théâtre et à ses talents de toute nature de faire de ce rêve une réalité.

De son séjour au Liban comme consule générale en 2013-2017, Cécile Longé a développé de très fortes amitiés et conservé un attachement très fort pour ce pays. Les crises économique et sociale que traverse le Liban depuis 2019, ponctuées par la double explosion du 4 août 2020, lui a donné l’envie de contribuer, à la mesure de ses moyens mais avec conviction, à maintenir vivace...

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