Des dizaines de déposants en colère se sont rassemblés mercredi matin dans le centre-ville de Beyrouth près du siège du Parlement, pour protester contre un projet de loi sur le contrôle des capitaux que les députés ont examiné en commissions. Ce projet a été avalisé fin mars par le Conseil des ministres avec de légères modifications, alors que le pays poursuit son effondrement économique depuis 2019, les banques imposant des restrictions illégales à leurs clients depuis trois ans.
Des dizaines de personnes se sont ainsi rassemblées dans la rue Weygand. Arrivé sur les lieux pour se rendre à la Chambre, le député des Forces libanaises et président de la commission parlementaire de l'Administration et de la Justice, Georges Adwan, a été chahuté, une fois : "Vous êtes des voleurs ! Honte à vous !", ont hurlé des manifestants à son adresse. Muni d'un mégaphone, l'un des citoyens a tenté d'appeler au calme. M. Adwan a ensuite pu se rendre au Parlement, l'armée bloquant l'accès des manifestants à l'une des rues menant à la place de l'Étoile, où siègent les commissions du Parlement.
"Peine de mort pour les déposants"
Le collectif "Le cri des déposants" a appelé à cette mobilisation en dénonçant une "peine de mort pour les déposants". Dans un communiqué, le groupe a mis en garde mardi "contre toute tentative des partis politiques de contourner les droits des déposants". "Certains de ces partis prétendent défendre notre cause alors qu'en coulisses ils pactisent avec ceux qui nous privent de nos droits. Des députés de ces partis votent sur des lois contraires à nos intérêts alors que leurs chefs politiques affirment publiquement nous soutenir", ont encore dénoncé ces déposants. Les manifestants ont enfin prévenu qu'ils pourraient recourir à des mesures d'escalade si leurs demandes ne sont pas prises en compte.
La réunion des commissions parlementaires a été levée mercredi en cours d'après-midi, sans que les députés n'approuvent le projet de loi modifié, en raison de divisons autour de cette question. Une nouvelle réunion se tiendra mercredi prochain pour poursuivre l'étude tu texte.
Lundi, le chef de l'Association des déposants au Liban Hassan Moghniyé avait mis en garde la classe politique contre l'approbation de la dernière version du projet de loi sur le contrôle des capitaux, dénonçant une législation qui donne une "carte blanche aux banques et à la Banque Du Liban (BDL)". M. Moghniyé avait jugé que la mouture de cette loi "ne devrait pas être approuvée sans répartir les pertes, unifier le taux de change et restructurer les banques", appelant les professionnels du secteur à annoncer une grève pour la semaine prochaine.
Le projet de loi sur le contrôle des capitaux vise à légaliser et à normaliser les restrictions bancaires ad hoc mises en place au début de la crise financière libanaise, en 2019. Il figure parmi les conditions exigées par le Fonds monétaire international (FMI) pour appliquer l'accord préliminaire conclu avec le Liban la semaine dernière. Celui-ci prévoit une aide de 3 milliards dollars sur quatre ans, à condition que les autorités libanaises avalisent un certain nombre de mesures voulues par le FMI.
En attendant, le Liban continue de s'enfoncer dans une crise économique sans précédent, depuis bientôt trois ans. Plus de 80% de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté et les déposants peinent à retirer les devises nécessaires à leurs besoins dans les banques, en raison des restrictions imposées.
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Une dizaine ou même des milliers de personnes ne changeront rien au cours des choses. Il faut que les millions de libanais qui se sont fait voler leur argent et humilier de la sorte forment un cortège jusqu’au palais présidentiel pour demander à leur chef d’état, ce figurant, des comptes qui attend toujours les décisions des autres quand il s’agit de régler les problèmes des citoyens et se met en quatre pour tout bloquer lorsqu’il s’agit de ses intérêts personnels ou ceux de ses proches et alliés vendus. Ça n’est pas aux banques qu’il faut s’en prendre en premier, mais au régime pourri qui a permis qu’une telle catastrophe puisse arriver à cause de leur cupidité et leur manque de patriotisme. Et ils se présentent aux élections gonflés, comme ils sont comme si de rien n’était.
Sissi zayyat
17 h 58, le 13 avril 2022