Le vice-Premier ministre libanais, Saadé Chami, qui avait estimé dimanche que "l'État et la Banque du Liban (BDL) sont en faillite", alors que le pays traverse la pire crise économique de son histoire moderne et que le gouvernement peine à légiférer sur le contrôle des capitaux et à garantir les avoirs des déposants, bloqués illégalement dans les banques depuis 2019, a affirmé lundi soir que ses propos ont été tronqués.
"L'État est en faillite, tout comme la Banque du Liban, et il y a des pertes", a affirmé M. Chami lors d'un entretien télévisé dimanche sur la chaîne al-Jadeed. "La répartition des pertes sera imputée aux acteurs concernés, à savoir l'État, la BDL, les banques et les citoyens", a-t-il poursuivi.
Toutefois, après le tollé provoqué par ces déclarations, le numéro deux du gouvernement a affirmé que ses propos ont été tronqués. "Mes propos ont été tronqués, et la vidéo qui a été diffusée constitue une partie de ma réponse à une question concernant la participation de l'Etat et de la BDL pour faire face aux pertes du secteur bancaire", a affirmé M. Chami à la chaîne OTV. "Dans ma réponse, j'ai dit que l'Etat est incapable de participer de manière significative pour combler le fossé, ce qui équivaut à dire que nous n'avons pas de liquidité", a-t-il souligné.
Saadé Chami tient un rôle-clé pour tenter de sortir le Liban de la crise économique, ayant été chargé de conduire la délégation chargée de négocier avec le Fonds monétaire international (FMI) le déblocage d’un "fonds de sauvetage". Pur technocrate, il a fait l’essentiel de sa carrière au FMI, où il a occupé pendant près de 20 ans des postes-clés et dirigé le Centre de soutien technique au Moyen-Orient.
Démenti de la BDL
Commentant lundi en fin de journée les propos du numéro deux du gouvernement, le Premier ministre Nagib Mikati a également estimé que les déclarations de M. Chami "ont été tronquées". "Il voulait parler des liquidités et non de la solvabilité" de l'Etat, a souligné M. Mikati, dans des propos à la presse à l'issue d'un entretien avec le leader druze Walid Joumblatt à Clemenceau.
Pour sa part, le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, a publié un communiqué en début de soirée dans lequel il souligne que "ce qui se dit sur la faillite de la BDL est faux". "Malgré les pertes qui ont touché le secteur financier libanais, et qui sont en cours de traitement dans le cadre d'un plan de relance préparé par le gouvernement actuel en coopération avec le Fonds monétaire international, la BDL continue d'exercer son rôle en vertu de l'article 70 du Code de la monnaie et continuera de le faire", conclut le patron de la banque centrale. Selon cet article, le rôle primordial de la BDL est de sauvegarder la monnaie nationale pour garantir de manière permanente, entre autres, le développement socio-économique.
Contrôle des capitaux
Revenant sur le projet de loi contesté de contrôle des capitaux, M. Chami a en outre fait valoir que "les députés ont le droit de s'opposer au projet, étant donné les temps dans lequel il a été soumis (...) mais nous voulions le terminer rapidement". Malgré les divergences entre certains ministres, "il n'est pas nécessaire que tous soient d'accord pour soumettre le projet de loi au Parlement", a-t-il dit.
Lundi dernier, les députés Ibrahim Kanaan, président de la commission parlementaire des Finances et du Budget, et Georges Adwan, président de la commission de l'Administration et de la Justice, avaient déploré le fait que les députés n'aient pas bénéficié d'un délai de 48 heures pour examiner le projet. Le vice-Premier ministre avait toutefois annoncé mercredi dernier, à l'issue d'une réunion du Conseil des ministres, que celui-ci avait avalisé le projet de loi controversé sur le contrôle des capitaux. Bien que légèrement modifié, le projet n'a pas été approuvé à l'unanimité, sachant l'opposition des ministres des deux formations chiites, le Hezbollah et Amal.
En 2020, le Liban a fait défaut sur la portion de dette en devises qui pèse plus de 37% du total de la valeur nominale de la dette (la valeur réelle de cette dernière, qui tient compte de la dépréciation de la livre sur le marché parallèle et le prix que valent actuellement les eurobonds libanais est bien inférieure). Une première dans l’histoire du pays qui, jusque-là, avait une réputation de bon payeur, même s’il se trouvait sur la troisième marche du podium en termes de ratio dette/PIB derrière le Japon et la Grèce il y a deux ans.
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18 h 57, le 05 avril 2022