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Économie - Transparence

L’étau international se resserre autour du secteur bancaire libanais

L’étau international se resserre autour du secteur bancaire libanais

Le risque que le Liban se retrouve sur la liste « noire » du Groupe d’action financière en juillet prochain compromettrait les chances du pays d’obtenir une assistance financière de la part du Fonds monétaire international (FMI). Photo d’illustration Bigstock

Récemment placés sur liste « grise » par le Groupe d’action financière (GAFI), les Émirats arabes unis font dorénavant partie des États sous surveillance renforcée par cet organisme intergouvernemental de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Un choc pour la réputation financière de ce pays qui fera toutefois pâle figure face au risque encouru par le Liban de se retrouver sur liste « noire » en juillet prochain si l’évaluation lancée par cet organisme en janvier dernier révèle des manquements trop importants au sein du secteur financier libanais en matière de conformité aux standards internationaux.

Une issue qui pourrait même, a minima, compromettre les chances du pays d’obtenir une assistance financière de la part du Fonds monétaire international (FMI), selon une source au fait du dossier contactée par L’Orient-Le Jour. Pour rappel, le Liban avait été retiré de cette liste noire en 2001 suite à l’adoption d’une législation conforme en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Dans ce contexte, la Commission spéciale d’investigation (CSI) – une instance justement créée par cette législation et dont les compétences ont été élargies en 2015 – a publié un communiqué hier, faisant suite à une réunion tenue jeudi dernier, juste après les départs du Trésor américain et du FMI en visite au même moment au Liban. L’entité présidée par le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, y rappelle aux banques libanaises le b.a.-ba des normes en vigueur dans la lutte contre la corruption et les prévient d’une circulaire prochaine de la BDL qui les obligera « à identifier et notifier les opérations suspectées d’être liées à la corruption dans le secteur public ».

La CSI demande également aux établissements bancaires de former leur personnel aux règles en vigueur en matière de conformité bancaire et de mettre à jour les données KYC (Know Your Customer), un processus de vérification de l’identité d’une clientèle, de leurs clients dits PEP, soit « politiquement exposés ».

Suspicions

Dans son communiqué, la CSI a aussi réitéré sa demande aux banques de la notifier en cas de suspicion sur la transparence de certaines opérations ou profils. Une manière de leur offrir à nouveau l’occasion de tout simplement ne pas s’y plier, a sous-entendu la source contactée.

Le 24 juin 2021, en effet, le procureur général près la Cour de cassation, Ghassane Oueidate, avait adressé, via la CSI, une demande similaire à l’Association des banques au Liban (ABL). Une exigence alors restée lettre morte, l’ABL estimant que cette demande de partage d’informations dépassait le cadre des obligations imposées par la loi 44/2015 qui prévaut, selon l’association, sur la loi n° 189/2020. Selon la source précitée, la CSI peut uniquement se baser sur le cadre de la loi n° 44/2015, les rouages de la n° 189/2020 entrant, eux, dans le champ de compétence des institutions judiciaires.

Parmi les procédures qu’elle institue, la loi n° 44/2015 ne permet en effet pas à la CSI de lever automatiquement le secret bancaire tant qu’une banque considère « qu’il n’y a pas, au préalable, d’éléments de preuve suffisants pour suspecter un compte ou une transaction », expliquait alors dans nos colonnes Karim Daher, président de l’Association libanaise pour les droits et l’information des déposants (Aldic) et avocat fiscaliste.

Rapatriement des fonds

La CSI réclame également aux banques la liste des noms des PEP, en remettant sur la table certaines dispositions de la circulaire n° 154 publiée fin août 2020. Dans le texte, la commission somme ainsi « toutes les banques opérant au Liban » de lui fournir, au plus tard avant la fin de ce mois, « les noms des personnes refusant de se conformer à la circulaire n° 154 », y inclus celles possédant des « dépôts en espèces effectués entre juillet 2017 et décembre 2020 ». Une période correspondant à celle de crise au Liban, rendue visible pour la population au début des restrictions bancaires à la fin de l’été 2019.

De surcroît, les banques devront également lui remettre « les listes des noms des clients qualifiés de PEP » qui se sont conformés à cette circulaire et ont ainsi rapatrié au moins 30 % de leurs fonds dans un compte bloqué pendant 5 ans. Une requête qui vise également les membres des conseils d’administration des banques et les grands actionnaires, tandis que les autres déposants, ayant transféré plus de 500 000 dollars à l’étranger entre le 1er juillet 2017 et le 27 août 2020, n’y sont pas obligatoirement soumis.

Le choix de la période pose toutefois question. « En passant au peigne fin les dépôts en espèces effectués entre juillet 2017 et fin décembre 2020, quid de ceux effectués après cette date butoir ? » s’interroge la source contactée. De même, s’il n’y a pas de date limite fixée pour le rapatriement des fonds de l’étranger par les catégories de déposants énumérés dans le texte, la fourchette du 1er juillet 2017 au 27 août 2020, lors de la parution de cette circulaire n° 154, n’a jamais été étendue.

Récemment placés sur liste « grise » par le Groupe d’action financière (GAFI), les Émirats arabes unis font dorénavant partie des États sous surveillance renforcée par cet organisme intergouvernemental de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Un choc pour la réputation financière de ce pays qui fera toutefois pâle figure face au risque...

commentaires (4)

Dommage que L’Europe ne puisse pas geler les fonds des politiciens libanais à l’étranger comme elle le fait pour les russes ! L’inégalité des rapports envers les prédateurs mafieux est injuste et infondée. La solution à nos économies aurait pu être résolue rapidement.

Wow

16 h 05, le 10 mars 2022

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Commentaires (4)

  • Dommage que L’Europe ne puisse pas geler les fonds des politiciens libanais à l’étranger comme elle le fait pour les russes ! L’inégalité des rapports envers les prédateurs mafieux est injuste et infondée. La solution à nos économies aurait pu être résolue rapidement.

    Wow

    16 h 05, le 10 mars 2022

  • disent ils : "les autres déposants, ayant transféré plus de 500 000 dollars à l’étranger entre le 1er juillet 2017 et le 27 août 2020, n’y sont pas obligatoirement soumis"" ?? mais c'est quoi ca ? ou est la logique ? ou est la justice ? ou est le ridicule qui n'arrivera jamais a les tuer ces mecs ?

    Gaby SIOUFI

    15 h 16, le 10 mars 2022

  • " L'ETAT EST PLEINEMENT RESPONSABLE" admet officiellement le VP du Conseil des ministres, mais "il a des moyens limites pour assumer les pertes". Ceci est un AVEU, on ne peut plus clair, de responsabilite juridique! Passons alors a la 2eme etape: l'Etat a des representants au niveau de l'Executif et du Legislatif qui ont pris, depuis des dizaines d'annees et jusqu'a aujourd'hui, les decisions catastrophiques en tout genre qui ont ruine le pays. Ce sont eux et leurs nombreux complices a tous les niveaux qu'il faut aller chercher en toute vitesse pour le remboursement des dettes de cet Etat-voyou. Leurs biens devraient etre immediatenent geles par la communaute internationale comme cela a ete fait avec succes et a la vitesse de la lumiere pour les oligarques russes. Appel a l'ordre des avocats et aux ordres des medecins et des ingenieurs, aujourd'hui mobilises pour la bonne cause, pour travailler en ce sens!

    Citoyen volé

    13 h 14, le 10 mars 2022

  • on en revient a la meme equation : justice meme super efficace = ZERO tant que ses decisions restent inappliquees. que dire alors d'une mafia multi directionnelle qui, elle fait la pluie et le beau temps ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 29, le 10 mars 2022

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