Shea évoque avec Aoun la frontière maritime et le conflit en Ukraine

L'ambassadrice des États-Unis au Liban, Dorothy Shea, s'est entretenue mercredi au palais de Baabda avec le président libanais, Michel Aoun, avec qui elle a abordé les derniers développements de l'invasion militaire russe en Ukraine ainsi que la question épineuse du tracé de la frontière maritime avec Israël. 

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), le chef de l'Etat a évoqué avec la diplomate US "les derniers développements internationaux et les conséquences de la guerre russo-ukrainienne, ainsi que les étapes franchies au niveau du dossier du tracé de la frontière maritime méridionale".

Ces derniers mois, le président Aoun, allié du Hezbollah, avait repris en main le dossier des négociations avec Israël autour du tracé de la frontière maritime en vue d'exploiter les hydrocarbures offshore. Ce dossier se trouvait initialement entre les mains du président du Parlement, Nabih Berry, allié chiite du Hezbollah et rival de M. Aoun. Mais lundi, le Hezbollah, qui entretenait jusque-là le flou au sujet des négociations, a envoyé un message sans équivoque pour dire qu’il reste en définitive le maître du jeu. Le chef du groupe parlementaire du parti chiite Mohammad Raad a annoncé sans ambages que le Liban ne renoncera pas à une seule goutte d’eau à laquelle il a droit. Et qu’à défaut, le gaz restera enfoui là où il se trouve.

Le président Aoun avait revu les prétentions du Liban à la baisse au niveau du tracé de la frontière, revenant sur une surenchère qu’il avait lui-même alimentée pendant plusieurs mois. Il revendique dorénavant uniquement la ligne 23, une réclamation officielle du Liban depuis 2011 qui lui permet de revendiquer 860 km2 de la zone disputée avec l’État hébreu. Les négociations, sous les auspices de Washington et des Nations unies, sont interrompues depuis décembre 2020 quand le président avait opté pour des demandes maximalistes : la ligne 29 qui lui octroierait 1 430 km2 supplémentaires. Toutefois, il avait refusé, par la suite, de signer l’amendement du décret 6433 auprès des Nations unies, condition sine qua non pour officialiser cette requête.

Avant de recevoir Dorothy Shea, le président Aoun a écrit sur son compte Twitter personnel : "Cela me désole qu'une partie des Libanais, qu'il s'agisse de responsables ou de journalistes, ignorent la Constitution et s'abaissent à des déclarations blessantes envers la présidence". Sans jamais préciser la cible de ses critiques, il a poursuivi en rappelant que "c'est le président qui mène les négociations sur les accords internationaux et les adopte conjointement avec le chef du gouvernement, puis le Conseil des ministres, et enfin le Parlement selon l'article 52 de la Constitution". Des propos qui pourraient constituer une réponse implicite aux critiques adressées à la présidence sur le plan des négociations sur la frontière maritime.

Par ailleurs, lors d'un entretien téléphonique, M. Aoun a examiné avec avec la sous-secrétaire d’État américaine pour les Affaires politiques, Victoria Nuland, les relations bilatérales entre le Liban et les États-Unis et les moyens de les renforcer dans tous les domaines. La discussion a également porté sur les négociations avec le Fonds monétaire international, la visite d'une délégation du Trésor américain à Beyrouth, ainsi que sur le dossier de la frontière maritime. Les préparatifs en cours pour les élections législatives libanaises et les développements entre la Russie et l'Ukraine ont aussi été abordés.

Le chef de l'État a également reçu la coordinatrice spéciale adjointe des Nations unies pour le Liban, Najat Rochdi, qui lui a présenté le "cadre stratégique de l'ONU pour les années 2022-2026" ainsi que les différentes aides prévues pour le Liban, en grave crise économique depuis 2019.