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Culture - Biennale d’art de Venise

Danielle Arbid et Ayman Baalbaki exposeront leur « monde à l’image de l’homme » à la Sérénissime

Après avoir révélé, il y a une dizaine de jours, le choix final des deux artistes qui représenteront officiellement le Liban à la 59e grand-messe de l’art contemporain qui s’ouvre à Venise le 23 avril prochain, Nada Ghandour, curatrice et présidente de la Lebanese Visual Art Association (LVAA), a dévoilé hier le thème spécifique au pavillon libanais et en a présenté les grandes lignes.

Danielle Arbid et Ayman Baalbaki exposeront leur « monde à l’image de l’homme » à la Sérénissime

Nada Ghandour et le ministre de la culture Mohammad Mortada annonçant la participation libanaise à la 59e biennale d’art de Venise. Photo Michel Sayegh

C’est au cours d’une conférence de presse tenue au musée Sursock, en présence du ministre de la Culture Mohammad Mortada, qu’a été officiellement annoncée hier la participation du Liban à la 59e édition de la biennale d’art de Venise.

Après avoir été reportée d’un an en raison de la crise sanitaire, la manifestation majeure du monde de l’art contemporain est de retour à Venise. Elle se tiendra du 23 avril au 27 novembre 2022, comme de coutume, dans divers lieux de la Sérénissime. Et en dépit de la situation catastrophique que traverse le pays du Cèdre – et grâce au soutien financier de nombreux mécènes de la diaspora –, le pavillon libanais y figurera, en bonne place, au sein du fameux bâtiment de l’Arsenal.

En effet, c’est dans l’une des salles de cet ancien chantier naval du XIIe siècle classé monument historique que seront installées les œuvres croisées du peintre et plasticien Ayman Baalbaki et de la cinéaste Danielle Arbid, développées autour de la thématique « Le monde à l’image de l’homme », fixée par la conservatrice du patrimoine et commissaire du pavillon libanais Nada Ghandour.

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« Cette proposition artistique est en lien étroit avec le contexte libanais tout en faisant totalement écho à des problématiques mondiales », a affirmé au cours de la conférence de presse la curatrice et présidente de la Lebanese Visual Art Association (LVAA), l’association à but non lucratif organisatrice du pavillon national sous l’égide du ministère libanais de la Culture. Elle a également signalé que le choix du comité scientifique de la LVAA (voir cadre ci-joint) s’est porté sur ces deux artistes phares de la scène libanaise pour « leur capacité à révéler dans leurs œuvres l’âme de l’art contemporain libanais et à s’adresser tant au monde arabe qu’au monde occidental ». En effet, Ayman Baalbacki, qui témoigne dans sa peinture impétueuse et à fort impact émotionnel des problématiques conflictuelles moyen-orientales, a déjà une certaine notoriété à l’étranger. Et Danielle Arbid, qui vit en France depuis l’âge de 17 ans, y est aujourd’hui (re)connue pour sa revendication à travers sa caméra d’une certaine forme de liberté. Son travail alterne fictions, documentaires à la première personne et essais vidéo à la croisée des genres et des territoires, ceux du Liban ou de la France. Elle à, notamment signé Dans les champs de Bataille, Beyrouth Hotel ou encore dernièrement Une passion simple (adapté du roman d’Annie Erneaux).

Photo Philippe Lebruman

Beyrouth, ville monde

Décrivant l’exposition « Le monde à l’image de l’homme » du pavillon libanais comme « un voyage symbolique dans le monde contemporain où la fiction et le virtuel inspirent et nourrissent plus que jamais notre quotidien », Ghandour a présenté le « dialogue » entre la vidéo intitulée Allô Chérie de la cinéaste et vidéaste libanaise et l’installation monumentale baptisée Janus Gate du peintre et plasticien, comme « une mise en espace de l’action perpétuelle de l’imaginaire humain sur la réalité du monde. Celle de Beyrouth, notamment, cette ville monde où s’incarne ce thème qui n’a pas de frontière. Et qui tisse entre ces deux artistes, aux œuvres si lointaines et pourtant si proches, un vrai échange politique et esthétique », a-t-elle indiqué en substance. La scénographie du pavillon libanais devant répondre au projet curatorial, et plus précisément « à la notion de dialogue inhérente à l’esprit de ce projet », elle a été confiée à l’architecte libano-française de renom Aline Asmar d’Amman, dont le bureau d’architecture Culture in Architecture a signé, entre autres, la rénovation de l’hôtel Crillon à Paris et le décor du restaurant Le Jules Verne de la tour Eiffel.

La conception qu’elle a proposée en écho aux œuvres de Danielle Arbid et d’Ayman Baalbaki « prendra la forme d’une coquille elliptique. Une forme géométrique enveloppante qui invite les œuvres à dialoguer sans artifice, en vis-à-vis, comme dans une conversation innée et naturelle », a également révélé la commissaire de l’exposition.

S’agissant des projets à proprement parler, et en l’absence des deux artistes lors de la conférence de presse (l’une se trouvant à Paris et l’autre ayant été cas contact), c’est à travers des projections d’extraits vidéo qu’ils ont fourni quelques détails de leurs démarches créatives.

Ayman Baalbaki. © Thierry van Biesen

La « Famille libanaise » de Danielle Arbid…

Danielle Arbid affirme dans ce sens que « la vidéo qui sera projetée au pavillon libanais de la biennale fait partie de la série Ma Famille libanaise. Ce court-métrage de 20 minutes répond par ses prises de vue à l’installation d’Ayman. Dans cette œuvre – réalisée notamment au moyen d’une puce d’espionnage insérée dans un téléphone portable –, mon personnage, qui est ma mère, est à l’image du Liban : elle l’incarne avec sa mentalité fataliste, son goût du risque, son exubérance. Elle est prise dans une course effrénée d’argent, en voiture à travers Beyrouth. Sa lutte quotidienne est indissociable de la violence qui prévaut aujourd’hui au Liban et qui fut aussi celle vécue dans d’autres pays, en Europe ou ailleurs ».

Un détail de l’installation que présentera Ayman Baalbaki à la biennale d’art de Venise en mai prochain. Photo DR

... et « La Porte de Janus » d’Ayman Baalbaki

De son côté, Ayman Baalbaki signale que son point de départ a été la ville de Beyrouth qu’il perçoit comme une cité riche d’« espaces autres » au sens où l’entendait Michel Foucault. « Sur le modèle du mot “libanisation”, qui désigne la fragmentation d’un pays, j’ai voulu exprimer la “beyrouthisation” qui qualifie des lieux perturbés par la présence de barricades et de frontières, et évoque autrement dit le démembrement urbain d’une ville et sa fragmentation en îlots séparés. J’ai pensé alors à Janus, le dieu romain, généralement représenté avec deux têtes, qui regarde à la fois vers l’intérieur et vers l’extérieur, vers le passé et le futur. Et j’ai construit le Janus Gate, une installation tridimensionnelle où deux espaces coexistent : un extérieur fantasmé et radieux, et un intérieur qui ressemble à l’image cliché de tous les bidonvilles du monde. »

À Venise, les œuvres élaborées par l’artiste plasticien vivant à Beyrouth et la cinéaste et vidéaste installée à Paris mettront donc en scène « les contradictions et les difficultés du pays du Cèdre à travers leurs symptômes », explique encore la commissaire de l’exposition. Poursuivant : « La course effrénée en quête d’argent est indissociable de la violence qui fait rage aujourd’hui au Liban. La spéculation immobilière, qui promet du rêve, cache la ruine et trompe sur la marchandise. L’angoisse face à l’implosion économique et politique du Liban s’expose de plus en plus. Avec leurs propres moyens, et marchant sur le fil de l’éternel retour, Ayman Baalbaki et Danielle Arbid mettent à vif à travers leurs créations, qui seront présentées à la 59e biennale de Venise, la chair du Liban dans son chaos et dans sa beauté. »

Il convient enfin de signaler ici que dans une première sélection, c’était Mouna Rebeiz qui devait partager avec Ayman Baalbaki l’espace du pavillon libanais. Interrogée par L’Orient-Le Jour sur les raisons de la mise à l’écart de la peintre issue de la diaspora, Nada Ghandour a indiqué que « le retrait de sa participation est simplement dû à un manque d’espace disponible au sein du pavillon libanais. Le projet de Mouna Rebeiz s’est avéré gigantesque et ses proportions ont dépassé le cadre de l’espace qui nous était dévolu dans l’Arsenal ».

Allocutions de circonstance

La conférence s’est déroulée en présence du ministre de la Culture Mohammad Mortada, qui a déclaré à cette occasion : « “L’art est un pas de la nature vers l’infini”, disait le poète Gibran Khalil Gibran. Et dans cet infini immense et merveilleux, là où les paroles s’envolent, l’art demeure. Aujourd’hui, le pavillon libanais à la biennale Arte 2022 peut commencer à prendre forme et à se dévoiler. Avec cette urgente nécessité de sortir de ses crises, qui pousse à renforcer une scène artistique foisonnante, dans l’expression de ses traumatismes et de ses accomplissements, la présence du Liban à Venise répond à cet appel. »

« Au-delà d’une création artistique, cette exposition à Venise propose à tous les Libanais, au Liban ou ailleurs dans le monde, un espace d’échange symbolique sur leur histoire et celle de leur pays et la société d’aujourd’hui », a affirmé pour sa part Nada Ghandour. Et d’ajouter : « L’ambition de ce projet est de faire rayonner la scène artistique libanaise au niveau international et d’envoyer un signal fort aux artistes de ce pays qui traverse les moments les plus difficiles de son histoire. La préservation de ce secteur artistique est devenue d’une importance primordiale, surtout avec les retombées économiques que cela implique. »

Beyrouth toujours présente dans les images de Danielle Arbid. Photo DR

Le LVVA et les membres du comité scientifique

La Lebanese Visual Art Association – LVAA est une association à but non lucratif initiée par Nada Ghandour (docteure en histoire de l’art, experte en art moderne et contemporain et conservatrice du patrimoine dans la spécialité « Musée ») dans l’objectif de l’organisation du pavillon libanais à la biennale Arte 2022.

À cet effet, un comité scientifique, instance de réflexion, d’échanges et de discussions avec les artistes et l’architecte-scénographe, a été spécialement formé pour cet événement. Avec pour rôle d’éclairer, de proposer et de conseiller, ce comité est composé de Jean-François Charnier, conservateur général du patrimoine, directeur scientifique à l’Afalula ; Louma Salamé, directrice générale de la Fondation Boghossian – villa Empain à Bruxelles ; Annabelle Ténèze, conservatrice en chef du patrimoine et directrice des Abattoirs, Musée – Frac Occitanie Toulouse.

C’est au cours d’une conférence de presse tenue au musée Sursock, en présence du ministre de la Culture Mohammad Mortada, qu’a été officiellement annoncée hier la participation du Liban à la 59e édition de la biennale d’art de Venise. Après avoir été reportée d’un an en raison de la crise sanitaire, la manifestation majeure du monde de l’art contemporain est de retour à...

commentaires (1)

DES ARTISTES LIBANAIS, DES VRAIS, IL Y EN A UN PEU PARTOUT DANS LE MONDE. IL A FALLUT PRENDRE UN FAUX POUR REPRÉSENTÉ LE PAYS ! IL NE REPRÉSENTE QUE LUI MÊME .

Gebran Eid

13 h 10, le 18 février 2022

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Commentaires (1)

  • DES ARTISTES LIBANAIS, DES VRAIS, IL Y EN A UN PEU PARTOUT DANS LE MONDE. IL A FALLUT PRENDRE UN FAUX POUR REPRÉSENTÉ LE PAYS ! IL NE REPRÉSENTE QUE LUI MÊME .

    Gebran Eid

    13 h 10, le 18 février 2022

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