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Économie - Étude

Seuls 13,6 % des Libanais sont « dollarisés », rapporte Konrad-Adenauer-Stiftung

Selon un sondage publié en début de mois, 52,2 % des Libanais âgés entre 21 et 30 ans songent sérieusement à quitter le pays.

Seuls 13,6 % des Libanais sont « dollarisés », rapporte Konrad-Adenauer-Stiftung

Selon les résultats du sondage, 39,3 % des Libanais envisagent aujourd’hui d’émigrer. Photo J.R.B.

Depuis des décennies, le Liban souffre d’un manque cruel de données et de chiffres, pourtant supposés être la matière première indispensable à l’élaboration des politiques économique et sociale. Plus de deux ans après le début de la crise, alors que le gouvernement a récemment repris les discussions avec le Fonds monétaire international (lire par ailleurs) et qu’il a envoyé cette semaine le projet de budget de 2022 au Parlement pour adoption, cette absence se fait davantage ressentir.

Pour se faire une idée de la réalité du terrain, le Liban a normalement et en grande partie recours aux statistiques recensées par des organisations internationales, à l’instar de la Banque mondiale, des Nations unies ou d’autres institutions étrangères. C’est une nouvelle fois le cas avec ce récent sondage, commandé par la fondation allemande Konrad-Adenauer-Stiftung (KAS, qui possède un siège à Beyrouth) et réalisé par la société Statistics Lebanon.

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L’objectif de ce sondage, disponible sur le site de la KAS, est d’apporter un peu plus de clarté sur la situation économique et sociale du Liban en étudiant la façon dont les citoyens « perçoivent et agissent face à la situation économique, sociale et politique ». Publié en début de mois, ce sondage a été réalisé sur une période s’étalant entre les 10 et 15 décembre 2021 auprès d’un échantillon représentatif de 1 200 Libanaises et Libanais de plus de 21 ans, équitablement répartis par genre et selon la densité de la population par région.

Pessimisme, immigration

Parmi ses principaux constats, l’enquête met en évidence le fait que les citoyens ont une vision très pessimiste quant à une éventuelle amélioration de la situation économique libanaise lors des deux prochaines années. Selon les résultats, 81,6 % des participants interrogés estiment que cette situation se dégradera encore plus lors de cette période à venir, alors que seulement 10,2 % d’entre eux s’attendent à une amélioration. Pour ce qui est du reste, 6,3 % prévoient que la situation restera identique à la situation actuelle et 1,9 % ont préféré ne pas donner de réponse.

Ces proportions se répètent presque à l’identique lorsqu’il s’agit des attentes des Libanais en ce qui concerne l’évolution de la situation financière du ménage (73 % sont pessimistes, alors que 10,1 % sont optimistes) ; des opportunités de travail (80,3 % contre 10,8 %) ou encore de la réputation internationale du Liban (80,8 % contre 9,9 %) d’ici à 2023. Par conséquent, 39,3 % des Libanais envisagent aujourd’hui d’émigrer, avec plus du tiers (39,1 %) d’entre eux déjà activement à la recherche d’alternatives à l’étranger (recherche d’emploi, envoi de CV, demande d’immigration…).

Les auteurs de ce rapport notent d’ailleurs que, « sans surprise », c’est dans la catégorie des personnes âgées entre 21 et 30 ans que se retrouve le plus haut pourcentage de Libanais considérant quitter le pays, puisque 52,2 % ont indiqué vouloir émigrer. Parmi ceux voulant s’expatrier, 34,8 % optent pour le Canada, en tête de liste des pays vers lesquels les Libanais veulent émigrer.

Dollars frais

Autre indicateur retenu dans ce sondage : la part des personnes ayant accès à des dollars « frais » (en référence aux devises pouvant être retirées des banques, au contraire de celles qui y sont bloquées depuis octobre 2019). Ici aussi, les résultats affichés sont alarmants : seuls 13,6 % des Libanais ont accès à des dollars frais, dont la moitié grâce à leurs salaires, qu’ils soient partiellement ou intégralement versés en devises. Cependant, ce sondage n’avance pas plus d’indications en ce qui concerne le volume de ces montants en devises, ou le fait qu’ils soient inférieurs, équivalant ou supérieurs à ceux d’avant la crise.

Reste à noter que ce sondage a été réalisé juste avant que la Banque du Liban n’annonce mi-décembre la mise en place de la circulaire principale n° 161 permettant aux bancarisés d’échanger leurs livres libanaises en banque contre des dollars au taux affiché par la plateforme Sayrafa. Par conséquent, les auteurs du rapport indiquent que la part de la population libanaise ayant accès à ces dollars a « sans doute » augmenté depuis.

Compte tenu de l’accès restreint à ces devises, considérées en quelque sorte comme le moyen permettant aux résidents de faire face à l’inflation galopante causée en grande partie par l’effondrement de la livre, le sondage souligne que la crise économique compromet la sécurité alimentaire des Libanais. En effet, et selon ses résultats, 31,6 % des Libanais ont été obligés de réduire le nombre de repas par jour depuis le début de la crise, alors que 40,3 % de la population a réduit la quantité de nourriture consommée quotidiennement. Dans ce même registre, l’étude estime aussi que plus du trois quarts des Libanais ont dû adapter leurs habitudes de consommation à la situation du pays lors de cette période : 76,8 % d’entre eux se sont dirigés vers des produits alimentaires de diverses catégories moins coûteux, alors que 82,7 % ont opté pour des marques moins chères du même type de produit.

Réduire les dépenses

Outre sa conséquence sur la sécurité alimentaire, la crise a aussi eu un impact considérable sur la santé des Libanais. Faute d’argent, 34,1 % des gens ne peuvent plus consulter un médecin s’ils sont malades, 31,4 % n’ont pas accès aux médicaments qui leur sont nécessaires et 29,5 % ne sont pas en mesure d’aller à l’hôpital, étant incapables de payer la facture.

Autre méthode adoptée pour diminuer les dépenses ménagères : réduire les déplacements. Selon les résultats dégagés, 74,5 % des Libanais ont réduit leurs déplacements depuis le début de la crise, tandis que 59,4 % d’entre eux ont opté pour des moyens de transport moins onéreux. Résultat, les embouteillages et les bouchons sont depuis plusieurs mois beaucoup moins communs sur les routes, surtout depuis la dernière modification apportée en septembre au mécanisme de subvention mis en place pour l’importation de carburants et suite auquel le prix de l’essence a très vite explosé. Contactée par L’Orient-Le Jour en janvier 2022, une source au sein de l’Association des sociétés importatrices d’hydrocarbures au Liban (APIC) rapportait une baisse de la consommation d’essence, estimée entre 40 et 50 % depuis septembre.

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Finalement, et toujours dans ce même objectif de réduire les dépenses, le sondage permet d’identifier que 46,2 % des Libanais ont dû réduire la capacité de leurs abonnements (de 10 à 5 ampères par exemple) auprès des propriétaires de générateur de quartier qui leur fournissent du courant, compte tenu de l’incapacité de l’établissement public Électricité du Liban de couvrir l’intégralité de la demande. Encore plus radical, 21,5 % des personnes interrogées ont assuré avoir complètement suspendu leur abonnement, étant incapables d’en supporter la facture.


Depuis des décennies, le Liban souffre d’un manque cruel de données et de chiffres, pourtant supposés être la matière première indispensable à l’élaboration des politiques économique et sociale. Plus de deux ans après le début de la crise, alors que le gouvernement a récemment repris les discussions avec le Fonds monétaire international (lire par ailleurs) et qu’il a envoyé...

commentaires (3)

QUID DES CITOYENS DONT L'AIDE PROVENANT DE L'ETRANGER LEUR PARVIENT HORS CIRCUITS BANCAIRES OU WESTERN UNION & AUTRES ?

Gaby SIOUFI

10 h 41, le 15 février 2022

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Commentaires (3)

  • QUID DES CITOYENS DONT L'AIDE PROVENANT DE L'ETRANGER LEUR PARVIENT HORS CIRCUITS BANCAIRES OU WESTERN UNION & AUTRES ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 41, le 15 février 2022

  • ET LA CAUSE : LA TRINITE DIABOLIQUE DU MAL DE BELZEBUTH LE BARBU ET SON ACOLYTE BERRIOTE ET DE SES DEUX LIEUTENANTS INFERNAUX LES DEUX BELIERS BISCORNUS DE LA BERGERIE DE RAI EN SUS DE L,HEBETE FRANGIOTE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 04, le 14 février 2022

  • Cet institut de sondage " la fondation allemande Konrad-Adenauer-Stiftung" a oublié de publier le fait que 100% des Libanais imputent tous ces malheurs à la classe politique dans son intégralité,,. Là encore on pourrait soupçonner une intervention ou pression l'occulte de la part de cette "crasse politique" .... Désolé lapsus révélateur.

    C…

    06 h 48, le 14 février 2022

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