Coup de cœur : Gabriel Sara, passeur d’humanité
« Madame, est-ce que ça vous intéresserait que je vous emmène dans les tranchées du cancer ? » Cette question, posée à la réalisatrice Emmanuelle Bercot, propulsera le Dr Gabriel Sara dans une grande aventure cinématographique, puis sur les marches mythiques du Palais des festivals de Cannes. De son Vivant, présenté hors compétition au festival de Cannes 2021, allait traduire la pensée philosophique de l’hématologue et oncologue libanais (également directeur de l’unité de chimiothérapie à l’hôpital Mount Sinaï), installé à New York et qui joue son propre rôle dans le film d’Emmanuelle Bercot, auprès de Catherine Deneuve et Benoît Magimel.
Coup de soleil : Le temple qui défie les ténèbres
Le vendredi 9 juillet à 20h45, l’acropole de Baalbeck irradiait d’espoir, de culture et de jeunesse à travers #ShineOnLebanon, une initiative visant à braquer les projecteurs sur la nouvelle scène musicale libanaise dans un parcours à travers les temples romains de la Békaa. Les projections in situ en présence d’un public restreint étaient simultanément diffusées sur les chaînes télévisées locales et panarabes ainsi que sur les réseaux YouTube et Facebook. « J’espère que chaque Libanais se sent fier de découvrir de jeunes artistes aussi créatifs et des lieux aussi magnifiques », déclarait pour l’occasion Nayla de Freige, présidente du festival qui défie les ténèbres.
Coup de projecteur : Aïda Sabra, pyromane des planches
Après avoir reçu le prix de la meilleure actrice pour le court-métrage al-Najma du jeune réalisateur Gilbert Karam, au festival « Les Regards de l’Icart » en France, voilà que l’actrice libanaise prouve son incroyable talent au théâtre de la Colline à Paris en jouant le rôle-titre du nouveau spectacle de Wajdi Mouawad, Mère, troisième volet du cycle que le dramaturge consacre à sa famille. Bouleversante, authentique, Sabra brûle les planches et conquiert le public et la critique français qui découvrent une « fabuleuse mère en guerre ». « Elle a une puissance émotive inépuisable », a déclaré pour sa part Mouawad.
Coup dans le mille : Beirut 607, l’apocalypse libanaise
Quinze courts-métrages conçus par quinze réalisateurs autour de la double explosion du 4 août 2020, visibles sur la plateforme Shahed, sont entrés en compétition aux International Emmy Awards dans la catégorie « Short Form Series ». Produite par The Big Picture Studios en collaboration avec la boîte Imagic et financée par le groupe MBC (et Shahed), Beirut 6:07 est la première série conçue au Liban à atteindre cette récompense. Chacun des quinze réalisateurs qui ont participé (pro bono) à Beirut 6:07, dont Caroline Labaki, Ingrid Bawab, Lucien Bourjeily, Alain Sauma et Karl Hadifé, y ont raconté des histoires de tout un chacun ayant vécu l’apocalypse libanaise.
Sans coup férir : Kassem Istambouli, les planches du salut
La jeunesse et le mouvement culturel au Liban sont au cœur du projet de l’Association Tiro pour les arts et du Réseau arabe de la culture et des arts (ACAN), qui travaille à la réouverture des plateformes culturelles libres et indépendantes au Liban. Kassem Istambouli, le fondateur de ce théâtre qui vient de remporter l’Intercultural Achievement Award (IAA) à Vienne pour l’année 2021, espère faire avancer le pays par la résistance culturelle. Il a rencontré le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, lors de son passage au Liban, pour lui faire part de son rêve de reconstruction. À bon entendeur…
Coup dur : Ali Eyal, (trop ?) complexe
La question de l’art ne peut se poser indépendamment de la question de l’œuvre, surtout quand elle affirme devoir s’affranchir de sa nécessité. Mais lorsqu’une œuvre laisse perplexe, qu’elle nécessite la confrontation avec l’artiste pour accéder à son mental créatif et en décrypter le sens, lorsque nous sommes face à l’incompréhension totale, où réside le plaisir ? Sur la scène artistique libanaise, Ashkal Alwan revendique l’art conceptuel et Ali Eyal dans sa dernière intervention s’y conformait parfaitement. Mais encore fallait-il pouvoir se laisser glisser dans cette expérience et en ressortir indemne.
Coup de foudre : Marc Chalhoub, la magie du noir et blanc
Lorsque, pour fuir le confinement imposé, caméra à l’épaule, il arpentait les routes enneigées sous une chape de brouillard et face aux bourrasques de vent, l’idée d’être un jour confronté au regard du public ne l’effleurait même pas. C’était une expérience et une thérapie personnelles, une manière d’honorer la nature. Que ses superbes photos en noir et blanc se retrouvent sur les cimaises de la galerie Jacques Ouaiss en décembre 2021, Marc Chalhoub le doit d’abord à l’œil du galeriste qui a vu en lui un artiste accompli, ensuite à son très grand talent qui a séduit un public enchanté de voir une nouvelle facette de ce producteur, réalisateur et scénariste.
Coup de fierté : Hala Wardé, une Libanaise à Venise
« Pourquoi ne pas penser les lieux en fonction de leur potentiel comme des vides plutôt que comme des solides ? Comment lutter contre la peur du vide en architecture ? Comment imaginer les formes génératrices de lieux de silence et de contemplation ? » Voilà le fil d’Ariane suivi par l’architecte franco-libanaise Hala Wardé pour réaliser, en collaboration avec Etel Adnan et Fouad Khoury, le pavillon libanais de la 17e exposition internationale d’architecture à la Biennale de Venise intitulé Un toit pour le silence, basé sur les formes cryptiques de seize oliviers millénaires au Liban.
Respirer un grand coup : Alaa Minawi et son souffle de vie
The Breath we Held, la performance visuelle et sonore de Alaa Minawi, avec Ahmad Amer et Vladimir Kurumilian, soutenue par le Heinrich Böll Stiftung (Beyrouth) et présentée en octobre 2021 au Monnot. Quoi de plus juste d’ailleurs que de partager avec tous ce souffle de vie qui nous a été retiré le 4 août 2020. Pour Minawi, ce spectacle n’est pas une démarche thérapeutique, « mais nous devons tous expirer ce souffle que nous avons retenu durant beaucoup trop longtemps ». Des histoires à partager, une blessure à panser où le mot n’a pas sa place et où le son et les dessins sur grand écran deviennent le langage collectif qui relie tout un peuple.
Coup de maître : Georgia O’Keeffe, moderne et cosmique
Parler de peinture abstraite en ce qui concerne Georgia O’Keeffe (1887-1986) est un contresens. Son art est simplement cosmique, moderne et d’une séduction hors normes. « Je sais que je ne peux pas peindre une fleur, le soleil sous le désert non plus, mais je peux, grâce à la couleur, vous faire part de mon expérience du moment », disait Georgia O’Keeffe. Considérée outre-Atlantique comme une figure majeure de l’art américain, elle acquiert très tôt son statut d’icône, mais restera longtemps absente de la scène française. Au centre Pompidou en septembre 2021, elle fait enfin l’objet d’une superbe rétrospective.
Coup de poing : Dia Mrad, capteur de beauté
Il a présenté, en juin 2021 à Arthaus, une série de tableaux photographiques coup de poing d’une saisissante beauté, immortalisant les silos de Beyrouth après le cataclysme du 4 août 2020. Des images qui transcendent – et subliment même – l’explosion maléfique en captant le symbolisme puissant de cet édifice défait vomissant le blé de ses entrailles. Comme une allégorie de la meurtrissure de la capitale libanaise, cette ville blessée que ce très talentueux photographe d’architecture (découvert par L’OLJ) ne cesse de « portraiturer » sous toutes ses coutures, dans des œuvres magnifiquement sous-tendues d’une charge émotionnelle intense…
Coup de chapeau : Annie Vartivarian, transcender la douleur…
Elle a transcendé par l’art la douleur de la perte de sa fille Gaïa Fodoulian, 29 ans, victime de l’infâme explosion au port de Beyrouth. Annie Vartivarian a mis toute sa force, sa foi, son énergie au service de la poursuite des projets de la jeune designer et galeriste. Avec un courage et une dignité qui forcent le respect, Annie Vartivarian a repris le flambeau avec AD Leb, une plateforme d’exposition et de soutien dédiée aux artistes et designers libanais, et en mettant sur pied en l’espace de quelques mois deux événements de qualité : le premier au sein de l’immeuble Tabbal et le second à découvrir jusqu’au 9 janvier 2022 à Deir el-Qalaa.
Coup de pinceau : Ghada Zoghbi, peintre des renoncements
Ses peintures de chantiers de construction abandonnés ont captivé les visiteurs de la galerie Janine Rubeiz. S’il ne fallait découvrir qu’un(e) seul(e) artiste au cours de l’année écoulée, ce serait Ghada Zoghbi. Pour son indéniable maîtrise du pinceau, pour l’intensité dramatique de ses atmosphères nimbées de mystère, pour sa représentation expressionniste de l’impact des êtres humains sur leurs espaces environnants et vice versa. Mais aussi pour son esthétique de la désolation, de l’abandon et des renoncements qui résonne si fortement avec la situation actuelle du pays du Cèdre…
Coup de main : Exil Collective, un club des cinq prometteur
Contribuer à maintenir la production design au Liban, en s’orientant vers la production de pièces à la fois accessibles aux amateurs de design locaux et compétitives à l’export. Tout en offrant des opportunités de conception-fabrication-commercialisation aux jeunes designers libanais. Voilà l’objectif de Design Collective, une initiative lancée au mois d’octobre par Tatiana Akl, Youssef Bassil, Antoine Guekjian, Rania Abillama et Joe Geagea, et dont la première collection présentée en novembre dans le cadre de la Dubai Design Week leur a valu les AD Awards dans la catégorie « Emerging Talent ». Prometteurs !
Coup de blues : Adèle et ses pépites poignantes
En octobre, à peine 24 heures après son lancement, le Easy on me d’Adèle devenait la chanson la plus streamée de l’histoire de la musique. C’est donc sans surprise que l’album intitulé 30 a cassé tous les records de ventes, confirmant le statut de légende vivante d’Adèle. Mais ce qui rend son 30 si marquant, c’est qu’il est le miroir de la diva à la voix miraculeuse : à la fois universel, peuplé de tubes addictifs et infiniment intime. En racontant, avec des sonorités entre soul et jazz, les tourments de son divorce, sa maternité et sa notoriété anxiogène, bref, sa vie, Adèle continue de créer des pépites poignantes.
Coup de grâce : Etel Adnan, adieu l’amie
« Le jour où je ne serai plus là, l’univers aura perdu une amie. » C’est en puisant dans ces mots prononcés par Etel Adnan qu’on pourrait peut-être décrire son grand départ. Oui, le jour où cette poétesse et peintre libano-américaine est partie, ce sont ses grands paysages, caressés par des soleils aux allures de lunes en plein jour, ce sont ses poèmes, aussi vastes et chatoyants que les montagnes qu’elle a longtemps racontées, qui ont en effet perdu leur meilleure amie. Mais Etel restera, partout où elle est passée, un peu comme sur les cimaises du musée Guggenheim à New York qui lui consacre sa plus belle rétrospective.
Coup du destin : Virgil Abloh, décès tragique
Le 29 novembre, le créateur Virgil Abloh, qui a fondé la marque Off-White puis dirigé les collections hommes de Louis Vuitton (depuis 2018), est décédé à 41 ans d’un cancer qu’il combattait pudiquement. Ce n’est pas que la mode qui a perdu ce jour-là l’une de ses figures les plus marquantes, mais plutôt toute une époque que Abloh a comprise et cartographiée via le langage des vêtements, de l’architecture et de la musique. D’abord pris sous l’aile de Kanye West, puis adulé par la génération Z, Virgil Abloh aura réussi le pari de raconter toute une jeunesse en jonglant entre les codes de la rue et ceux du luxe.
Coup de glam : Cynthia Merhej, renaissance d’un label
Si Cynthia Merhej avait été découverte en tant qu’illustratrice, notamment dans le cadre de la deuxième édition du prix « Génération Orient de L’Orient-Le Jour », la mode est venue la rattraper, car celle-ci lui coulait presque dans la veine, elle qui appartient à une famille de femmes couturières. Très vite, son label Renaissance Renaissance, qu’elle fonde en 2016, aimante tous les regards, si bien que la Libanaise se retrouve en demi-finales du prix LVMH 2021. Elle devient surtout la première femme arabe à atteindre cette récompense qui est sans aucun doute la plus prestigieuse de la mode.
Coup de plume : Mohammad Mbougar, le talent ambitieux
Le roman de Mohammad Mbougar, La plus secrète mémoire des hommes, n’était pas le favori du Goncourt 2021, et pourtant il l’a eu ! Cette complexe mise en abyme aborde « le mal de la littérature » en puisant dans l’histoire d’un autre roman, Le labyrinthe de l’inhumain, d’un certain T. C. Elimane (surnommé « le Rimbaud nègre »), qui avait fait de ce dernier une figure du Paris littéraire d’avant-guerre, avant que des inculpations de plagiat mènent à la destruction du livre et à la disparition d’Elimane. C’est sans doute l’ambition impressionnante de Mbougar, doublée d’une écriture où se mélangent plusieurs genres littéraires, qui lui a valu ce prix si convoité.
Coup de lumière : Une nuée d’étoiles libanaises à l’IMA
Le Liban en crise brillait d’une autre lumière à Paris. L’exposition Lumières du Liban à l’IMA présentait, en septembre 2021, une série de toiles puisées de la collection Claude et France Lemand, et retraçait l’histoire de l’art libanais de 1950 à nos jours, en mettant en parallèle les œuvres de cette période avec des unes de L’Orient-Le Jour, histoire de remettre ces créations dans leur contexte sociopolitique et ainsi de raconter un pays par le prisme de l’art. À l’occasion de cet événement, le jeune architecte Carl Gergès a été invité à en concevoir l’espace ainsi qu’à réaménager la Salle des donateurs de l’IMA.
Coup frenchy : Clara Luciani a bien la french touch
Dans le paysage musical francophone, s’il y a un nom qui n’a pas quitté les lèvres (et les tympans), c’est bien celui de Clara Luciani. Découverte avec son dégoupillant tube La Grenade, son second album Cœur, aux accents pop et rétro-funk, n’a fait que confirmer le rôle crucial de cette chanteuse sur la scène musicale française : redonner à la variété française ses lettres de noblesse. C’est que Clara Luciani prouve surtout, à travers ses « friandises addictives », qu’on peut être à la fois une chanteuse populaire et créer une musique chic qui nous réconcilie justement avec la variété de l’Hexagone.
Excellente présentation et sujets Intéressants et bien choisi . Merci à l’équipe et à l’Orient le Jour . Et merci pour Ghada Zoghbi je suis heureuse que vous ayez apprécié son travail Bonne année à tous heureuse que vous avez des
00 h 38, le 29 décembre 2021