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Économie - Monnaie

Dollars de la circulaire n° 161 : les banques se lancent en ordre dispersé

Les conditions d’applications fixées par la Banque du Liban sont vagues et lacunaires.

Dollars de la circulaire n° 161 : les banques se lancent en ordre dispersé

Photo João Sousa

Il y a une grosse semaine, la Banque du Liban (BDL) prenait encore les Libanais à contre-pied en annonçant son intention de fournir des liquidités en dollars aux banques.

Une décision prise dans le sillage du relèvement du taux de retrait des dollars bancaires, ou lollars, les devises soumises aux restrictions bancaires illégalement mises en place depuis 2019, qui avait été suivie par une nouvelle phase d’inflation du taux dollar/livre sur le marché des changes. Deux jours après son annonce, la BDL publiait une circulaire (n° 161) détaillant certains contours du nouveau dispositif qui doit expirer à la fin de l’année, soit une durée de vie de deux semaines ou 11 jours ouvrés maximum.

En bref : les dollars donnés par la BDL serviront à honorer des demandes de retraits que les clients feront à partir de leurs comptes en livres et au taux affiché la veille par la plate-forme Sayrafa (22 200 livres mardi soir), qui est largement supérieur à la parité officielle de 1 507,5 livres ou du taux de 8 000 livres en vigueur pour les retraits en livres via la circulaire n° 151, mais inférieur à celui du marché noir (près de 27 000 livres).

Concrètement : quelqu’un qui a un million de livres sur son compte au 22 décembre pourra retirer près de 45 dollars en espèces le jour même, s’il entre dans les clous fixés par le texte et sa banque. Si un client préfère malgré tout effectuer son retrait en livres, il devra en formuler la demande par écrit. Ce cas de figure ne risque pas cependant de se produire souvent vu que le client réalisera une plus-value équivalente à la différence entre le taux de Sayrafa et celui du marché des changes en retirant ses livres en dollars à la banque avant de les convertir au bureau de change. Dans l’exemple donné plus haut, ce client obtiendra donc 1,215 million de livres, gagnant alors 215 000 livres, soit une hausse de 21,5 %.

La quantité de dollars que chaque banque pourra recevoir de la BDL dépendra de leur quota mensuel de liquidités en livres qu’elle peut habituellement retirer de ses comptes courants à la banque centrale ou du solde restant à la date de la publication de la circulaire.

Libertés dans la mise en œuvre

Inédit, le dispositif n’en reste pas moins flou, les conditions d’applications fixées par la BDL étant assez vagues et lacunaires. Dans le sillage de la publication de la circulaire, rares étaient d’ailleurs les banques, contactées par notre publication jumelle L’Orient Today, capables d’en expliquer tous les rouages avec précision ou d’éclaircir toutes les zones d’ombre laissées par la banque centrale.

La situation semble avoir évolué depuis. Alors que tout semblait indiquer que la mesure ne serait pas mise en œuvre par une majorité d’établissements avant janvier (ce qui laissait supposer que la durée de vie du texte soit prolongée), plusieurs banques – dont des grandes – ont confirmé hier à L’Orient-Le Jour avoir commencé à l’appliquer ou être en mesure de le faire dès aujourd’hui. Seule certitude : la BDL a laissé toute la latitude aux banques de fixer une importante partie des modalités d’application, ce qui devrait générer d’importantes différences de traitement d’un établissement à l’autre. Les informations qui suivent ont été recueillies auprès de sources appartenant à six établissements qui ont préféré s’exprimer sous couvert d’anonymat.

Les déposants bénéficiaires

Première variable d’ajustement : les banques semblent a priori libres de choisir quels déposants pourront bénéficier de la mesure. Seul consensus clair : les établissements n’ouvriront la possibilité de retirer des dollars depuis leurs comptes en livres qu’aux seuls particuliers. Un choix qui pourrait avoir été dicté par la crainte de voir les entreprises aspirer la quasi-totalité des liquidités débloquées par la BDL via la circulaire, compte tenu de l’importance de leurs besoins en devises dans le cadre de leurs activités. Cet argument a été soumis par une source au sein de Bankmed contactée par L’Orient Today la semaine dernière.

Au-delà de cette distinction, certaines banques ont décidé d’ouvrir le mécanisme à tous les particuliers, des fonctionnaires aux acteurs du secteur privé, tandis que d’autres ne l’ouvriront qu’à la première des deux catégories. Un choix qui pourrait avoir été encouragé par une partie de la classe politique à quelques mois des élections législatives et, surtout, un mois après l’annonce par le gouvernement de Nagib Mikati d’une aide « équivalente à deux demi-salaires supplémentaires allant de 1,5 à 3 millions de livres pour les mois de novembre et décembre » devant être versée « avant les fêtes ». Enfin, certaines banques ont affirmé avoir ouvert le dispositif à tous les déposants, tout en reconnaissant que cela pourrait être modifié lorsque la BDL aura répondu aux demandes de clarification qu’elles ont envoyées.

La plupart des banques contactées par L’Orient Today avaient en outre fait part de leurs inquiétudes concernant la capacité de leurs réseaux d’agences – réduit comme peau de chagrin depuis le début de la crise – à accueillir tous les bénéficiaires potentiels du dispositif. Le service client de la SGBL a par exemple indiqué que la banque allait limiter ce risque en invitant les déposants travaillant dans le secteur privé à retirer leurs dollars aux guichets, tandis que les fonctionnaires pourront le faire directement à travers les distributeurs automatiques de billets.

La fixation des plafonds

S’agissant des plafonds, la mesure ne sera pas non plus appliquée de façon uniforme. Deux grands cas de figure se dessinent : celui des clients qui n’ont pas encore entamé ou atteint leurs plafonds de retrait en livres et ceux qui au contraire l’ont fait.

Dans le premier cas, la plupart des banques ont prévu de laisser les clients retirer l’équivalent en dollars au taux de Sayrafa du plafond de retrait en livres dont ils bénéficient habituellement. D’autres prévoient d’augmenter les plafonds de certains bénéficiaires seulement (a priori là aussi au bénéfice des fonctionnaires selon les informations recueillies). Enfin, quelques banques n’ont pas encore pris de décision à ce sujet.

Si certaines banques ont décidé d’appliquer les mêmes règles aux déposants qui ont entamé ou atteint leurs plafonds, d’autres ont tout simplement pris le parti d’exclure du dispositif les clients qui ont déjà retiré toutes les livres autorisées de leur compte au cours du mois de décembre.

La semaine dernière, une source à la banque BEMO s’était interrogée sur la possibilité de mettre en place un mécanisme rétroactif permettant à un client de reconstituer son plafond en livres en réapprovisionnant son compte à hauteur des montants retirés pendant le mois pour bénéficier pleinement du dispositif de la circulaire n° 161. Une option qui ne semble pas pour l’instant être envisagée par beaucoup de banques.

Enfin, le fait que les clients ne disposent que d’une fenêtre de quelques jours pour bénéficier du dispositif inquiète certains établissements qui ont peur d’être pris d’assaut.

Il y a une grosse semaine, la Banque du Liban (BDL) prenait encore les Libanais à contre-pied en annonçant son intention de fournir des liquidités en dollars aux banques.Une décision prise dans le sillage du relèvement du taux de retrait des dollars bancaires, ou lollars, les devises soumises aux restrictions bancaires illégalement mises en place depuis 2019, qui avait été suivie par une...

commentaires (4)

Intelligente ingénierie pour maintenir le taux du $ et empêcher le dérapage à la hausse. La bdl tente de rentrer au marché via la plateforme sayrafa . Cette mesure a prouvé son efficacité, ce qui a poussé la bdl à proroger la circulaire jusqu’à fin janvier 2022.

Skaff Soumaya

22 h 00, le 23 décembre 2021

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Commentaires (4)

  • Intelligente ingénierie pour maintenir le taux du $ et empêcher le dérapage à la hausse. La bdl tente de rentrer au marché via la plateforme sayrafa . Cette mesure a prouvé son efficacité, ce qui a poussé la bdl à proroger la circulaire jusqu’à fin janvier 2022.

    Skaff Soumaya

    22 h 00, le 23 décembre 2021

  • Ubuesque, et de plus en plus, ce pays...

    Georges MELKI

    12 h 11, le 23 décembre 2021

  • Une maskhara de plus digne de notre cher gouverneur de la BdL présumé innocent de toutes les charges qui pèsent contre lui dans divers pays européens. A son prochain voyage, qu’il contrôle bien les dizaines de milliers d’Euros qu’il aura dans ses valises pour ne pas se faire à nouveau pincer par les douanes françaises car en cas de récidive c’est le pénal immédiatement pour les citoyens français

    Lecteur excédé par la censure

    11 h 31, le 23 décembre 2021

  • C,EST ALI BABA ET SES QUARANTE VOLEURS ( CHEZ NOUS ILS SONT BEAUCOUP TROP PLUS NOMBREUX ) QUI DEVALISENT DE MOULT MANIERES MAFIEUSES LE PEUPLE LIBANAIS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 46, le 22 décembre 2021

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