Rechercher
Rechercher

Culture - En librairie

« Lettre à mon père » de Corinne Boulad : l’écho d’une musique profonde

Carnet de bord truffé de références pêchées dans tout ce qu’une enfant de son siècle peut capter, le livre de Corinne Boulad, relativement court, porte la marque séduisante du premier jet.

« Lettre à mon père » de Corinne Boulad : l’écho d’une musique profonde

Corinne Boulad : « Face à l’éveil d’un peuple, ils ne peuvent rien. » Photo DR

Décidément, la « thaoura » d’octobre 2019, dont l’explosion du 4 août 2020 et la crise économique en cours ont décuplé le retentissement, n’a pas fini d’inspirer des ouvrages. Lettre à mon père de Corinne Boulad en fait partie*.

L’auteure, une Franco-Libanaise, est née en France. Elle atterrit au Liban en 2013, grâce à une carrière dans l’humanitaire. Et comprend assez vite que c’est là son chez-elle, et décide de rester. Elle fait donc le chemin inverse de son père. Elle se « repayse ».

Son livre est un compte-rendu du soulèvement d’octobre 2019. L’auteure ressent le besoin de témoigner aussi bien de l’euphorie des premiers moments que du désespoir de son affaissement. En s’adressant à son père, qui a quitté le pays 45 ans plus tôt pour, selon ses dires, « envisager l’avenir », elle espère lui donner un autre regard sur le monde et sur des blessures jamais cicatrisées. À travers l’évocation de leurs trajectoires croisées, elle revisite l’histoire du Liban qu’elle aime et tente de redonner du sens au chaos. « C’est à la naissance d’une nation que l’on est en train d’assister. Et face à l’éveil d’un peuple, ils ne peuvent rien », écrit-elle à la dernière page.

Le réalisme, on l’a dit, commande que l’on défende la « thaoura » contre les faux espoirs qu’il peut engendrer dans la ferveur du premier élan.

Il n’y a pas d’exemple dans l’histoire d’une révolution qui ait atteint la totalité de ses objectifs. Il faut donc protéger la « révolution » de l’utopie, des objectifs inaccessibles. L’homme n’est pas perfectible comme une plante. Privé de sa liberté, c’est un automate, et son éducation n’est qu’un dressage. Il faut donc mettre pied à terre, écouter, dialoguer, fédérer.

Lire aussi

Les micro-stories de Raja Farah dans un livre

Carnet de bord truffé de références pêchées dans tout ce qu’une enfant de son siècle peut capter, le livre de Corinne Boulad, relativement court, porte la marque séduisante du premier jet, ce qui en constitue la force et la faiblesse. La faiblesse, en raison d’un torrent d’idées parfois bien faites, parfois toutes faites, charriées par un fleuve sans rives. La force parce que, comme dans une improvisation de guitare, quand les phrases viennent toutes seules et s’enchaînent par vagues, une musique profondément humaine peut y être entendue.

Des dizaines d’exergues qui jalonnent le livre, celui de Nagib Mahfouz est le plus touchant car il reflète la quête profonde du cœur : «  Home is not where you are born. Home is where all your attempts to escape cease. » Là où, enfin, on dépose le sac à dos et l’on dit : « J’y suis. C’est ici. »

*Éditions Oser dire.

Décidément, la « thaoura » d’octobre 2019, dont l’explosion du 4 août 2020 et la crise économique en cours ont décuplé le retentissement, n’a pas fini d’inspirer des ouvrages. Lettre à mon père de Corinne Boulad en fait partie*.L’auteure, une Franco-Libanaise, est née en France. Elle atterrit au Liban en 2013, grâce à une carrière dans l’humanitaire....

commentaires (1)

Bravo Corinne quel émouvant parcours!

SALEH KAYALI Zeina

00 h 43, le 20 décembre 2021

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Bravo Corinne quel émouvant parcours!

    SALEH KAYALI Zeina

    00 h 43, le 20 décembre 2021

Retour en haut