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Société - Sécurité

Au Liban, la criminalité connaît une hausse spectaculaire depuis le début de la crise

Cambriolages, vols de voitures et meurtres affichent une forte hausse ces deux dernières années, selon les statistiques d’International Information.

Au Liban, la criminalité connaît une hausse spectaculaire depuis le début de la crise

Nathaniel Hayes affirme avoir été agressé alors qu’il était sur le point d’entrer dans l’enceinte de l’aéroport de Beyrouth. Photo tirée du compte TikTok de Nathaniel Hayes

Il y a une semaine, Nathaniel Hayes, un influenceur américain bien connu sur TikTok, a été agressé au Liban alors qu’il se trouvait à l’entrée de l’Aéroport international de Beyrouth. Dans une vidéo diffusée sur son compte, le jeune homme déclare que son agresseur lui a dérobé ses appareils électroniques, dont un ordinateur portable, une tablette, des chargeurs et son second téléphone, ainsi que son passeport et sa carte de vaccination Covid-19. « J’étais littéralement sur le point de monter dans un avion pour quitter le pays, mais apparemment je ne peux plus partir », raconte Nathaniel Hayes dans la vidéo tournée directement sur les lieux de l’incident. Depuis, l’Américain a pu obtenir un passeport d’urgence auprès de l’ambassade des États-Unis et quitter le Liban.

Pour mémoire

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Au cours des deux derniers mois, les craintes de voir une augmentation des cas de meurtre et de vol au Liban se sont accentuées. Les statistiques d’International Information, une société régionale indépendante de recherche et de conseil basée à Beyrouth, confirment que depuis début 2021, les vols de voitures ont augmenté de 212 %, les cambriolages de 266 % et les meurtres de 101 %, en comparaison aux dix premiers mois de 2019, soit avant que la crise économique ne s’aggrave.

Deux ans plus tard, l’effondrement économique du pays se poursuit. La livre libanaise continue de dégringoler, avec un nouveau plus bas de 25 000 livres libanaises pour un dollar, atteint le 25 novembre. En parallèle, les subventions de la Banque du Liban ont été partiellement ou totalement supprimées sur la plupart des produits essentiels, notamment les médicaments et le carburant, faisant flamber leurs prix. Mardi, le prix officiel des 20 litres d’essence 95 et 98 octane a augmenté de 3 600 et 4 000 LL, atteignant respectivement 316 600 et 327 000 LL. Et il y a une semaine, le ministère de l’Économie a publié un communiqué fixant les nouveaux prix et poids du pain. Les grands paquets sont désormais fixés à 8 000 LL, soit une hausse de 2,81 % du prix au gramme depuis le 18 novembre et de 478,31 % depuis avant la crise.


Dans ce contexte, l’armée libanaise signale qu’en octobre elle a arrêté 486 personnes pour divers crimes et délits, dont le vol, la contrebande, la possession d’arme et la conduite de voiture et de moto sans papiers.

Des voleurs déguisés en agents de sécurité
Un matin de la mi-octobre, Ziad Tabbara était garé en bord de route dans une zone proche de l’ancienne route de l’aéroport de Beyrouth, attendant que l’itinéraire qu’il avait entré dans Google Maps s’affiche. Un homme masqué s’approche alors de lui en prétendant être un membre des services de renseignements « habillé en civil », se souvient-il. « Quand je lui ai demandé de me montrer sa carte d’identification, il a pointé une arme vers moi et m’a demandé de l’argent. Je me suis exécuté et nous en sommes restés là », confie Ziad Tabbara à L’Orient Today.

Cette mésaventure est loin d’être isolée. Plusieurs vols et braquages auraient été commis par des hommes portant des uniformes des forces de sécurité. Début novembre, le ministre de l’Intérieur Bassam Maoulaoui a d’ailleurs reçu une délégation de l’Union des familles de Beyrouth, un groupe comprenant des familles sunnites de Beyrouth, qui lui a fait part de ses préoccupations concernant la hausse des vols dans la capitale et le fait que les malfaiteurs se fassent passer pour des membres des forces de sécurité pour tromper la vigilance des citoyens et exécuter leurs crimes.

Mohammad, qui habite à Ras el-Nabeh, explique à L’Orient Today que son appartement a été cambriolé à la fin du mois dernier, lorsqu’un groupe prétendant appartenir aux « forces de sécurité » a demandé au concierge de l’immeuble d’ouvrir les portes et de les conduire chez lui pour vérifier s’il est en possession de drogue et d’armes, sans présenter aucun mandat de perquisition. « Alors que le concierge les escortait à l’étage, j’ai entendu des coups forts à la porte et des voix nous demandant d’ouvrir, vers 22 heures, explique-t-il. J’ai regardé dans le judas et quand j’ai vu les uniformes, j’ai tout de suite ouvert la porte même si je savais que je n’avais rien fait d’illégal. » Mohammad raconte que les voleurs les ont ensuite enfermés dans une pièce sans téléphone et ont placé un membre « de leur gang avec eux pour les surveiller. Quand nous sommes sortis de la pièce, nous avons constaté que tous les bijoux de ma femme avaient été volés, que les biens les plus précieux de la maison et l’argent de la famille avaient disparu ».

Dans l’ensemble, les statistiques d’International Information montrent que les vols ont augmenté de 266 % depuis le début de la crise économique, 1 314 délits ayant été enregistrés entre janvier et octobre 2019, contre 4 894 de janvier à octobre de cette année. Entre septembre et octobre 2021, 92 vols supplémentaires ont été recensés.

Vols de voitures : en hausse de 212 %

En moyenne, 3,6 voitures ont été volées chaque jour depuis novembre 2019. Au cours des dix premiers mois de cette année, le nombre de voitures volées a atteint 1 097 contre 351 voitures au cours de la même période il y a deux ans, selon les statistiques d’International Information collectées auprès de la Direction générale des Forces de sécurité intérieure (FSI). Les FSI n’ont pas répondu à la demande de statistiques de L’Orient Today. Un gang qui a kidnappé et braqué des chauffeurs de camionnette a été arrêté par les FSI mercredi dernier. Celles-ci ont également signalé avoir arrêté un gang qui a volé des dizaines de motos à Nabatiyé, au sud du Liban. Il y a près de dix jours, dans le quartier de Sabtiyé dans le Metn, cinq habitants se sont fait dérober leurs véhicules. « J’avais garé ma voiture devant le bâtiment comme je le fais toujours, mais le lendemain, elle n’y était plus », raconte une de ces victimes, qui a refusé de divulguer son nom pour des « raisons de sécurité ». « J’ai déposé une plainte auprès de la police qui fait tout ce qu’elle peut pour la récupérer », ajoute-t-il. À ces vols s’ajoute un autre problème. Toutes les personnes qui ont été victimes d’un vol de voiture ne sont pas indemnisées par une assurance, même si elles en ont contracté une. Selon un courtier d’assurances de Securite, seuls les contrats tous risques couvrent les vols de véhicules. Il note que les assurés ne disposant pas d’une police de ce type ne peuvent pas être indemnisés en cas de vol.

Sur les réseaux sociaux, comme par exemple Facebook, des annonces de gens à la recherche de leurs « véhicules dérobés » circulent également. Jamil Itani, de Beyrouth, a écrit sur sa page le 17 novembre que « sa voiture, son portefeuille et ses papiers officiels ont été volés au cours d’un incident », appelant « celui qui verrait » son automobile à contacter le commissariat le plus proche.

Meurtres : en hausse de 101 % par rapport à 2019

En janvier dernier, Issam Khamis, un père de trois enfants, se rendait au supermarché sur sa moto lorsqu’un voleur sur un deux-roues a tenté de voler le sac qu’il portait en bandoulière. La victime est tombée, se cognant la tête sur le bitume, avant de décéder plus tard à l’hôpital. En mai, Gaith el-Masri est décédé d’une blessure par balle à la station-service de sa famille au Akkar à la suite d’un différend concernant le diesel, sur fond de pénurie de carburant dans le pays.

Si le nombre d’homicides a légèrement diminué, de 1,1 % au cours des dix premiers mois de 2021 par rapport à la même période en 2020, on recense 90 décès de plus – soit une hausse de 101 % – par rapport à 2019, selon International Information.

Alors que la criminalité a incontestablement augmenté, des pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni ont déconseillé à leurs ressortissants de se rendre au Liban. « Évitez les voyages au Liban en raison de la criminalité, du terrorisme, des conflits armés, des troubles civils, des enlèvements et de la capacité limitée de l’ambassade de Beyrouth à fournir un soutien aux citoyens des États-Unis. Certaines régions présentent un risque accru », écrit ainsi le Bureau des affaires consulaires du département d’État américain.

(Cet article a été originellement publié dans « L’Orient Today », le 30 novembre 2021).

Il y a une semaine, Nathaniel Hayes, un influenceur américain bien connu sur TikTok, a été agressé au Liban alors qu’il se trouvait à l’entrée de l’Aéroport international de Beyrouth. Dans une vidéo diffusée sur son compte, le jeune homme déclare que son agresseur lui a dérobé ses appareils électroniques, dont un ordinateur portable, une tablette, des chargeurs et son second...

commentaires (4)

Presque tous les jours, on se rend compte qu'il y a des tués qu'on retrouve dans les maisons ou ailleurs. Crimes ou suicides ? Des informations sans lendemain, malheureusement.

Esber

16 h 59, le 03 décembre 2021

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Commentaires (4)

  • Presque tous les jours, on se rend compte qu'il y a des tués qu'on retrouve dans les maisons ou ailleurs. Crimes ou suicides ? Des informations sans lendemain, malheureusement.

    Esber

    16 h 59, le 03 décembre 2021

  • c'aurait ete tellement plus interressant- beaucoup plus - si les auteurs/es de cet article y ajoutaient des details tels que : -les regions libanaises les plus visees OU -les marques des voitures les plus prisees

    Gaby SIOUFI

    09 h 23, le 03 décembre 2021

  • inévitable!

    Yves Prevost

    06 h 53, le 03 décembre 2021

  • Mon Dieu ou le Liban est arrivé ???

    Eleni Caridopoulou

    00 h 44, le 03 décembre 2021

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