Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a affirmé jeudi soir qu'il était prêt à comparaître devant la justice pour témoigner dans le cadre de l'enquête sur les affrontements meurtriers de la semaine dernière à Tayouné, dans le sud de Beyrouth, mais à condition que la justice entende d'abord Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah.
Le leader chrétien réagissait aux informations faisant état de sa convocation par le tribunal militaire qui souhaite entendre son témoignage sur les violences du 14 octobre. Ce défi lancé par M. Geagea tant au secrétaire général du parti de Dieu qu'au tribunal militaire, lors d'une interview sur la chaîne MTV, intervient une semaine exactement après les combats de Tayouné, qui ont opposé des combattants du Hezbollah et du mouvement Amal à d'autres positionnés dans des quartiers chrétiens adjacents. Le tandem chiite a accusé les FL d'être derrière cette "embuscade" qui a fait sept morts (des partisans du tandem et une civile) et 32 autres blessés. Des accusations rejetées par les FL, quoique timidement. Dans cet entretien avec le présentateur-vedette Marcel Ghanem, le leader maronite a également répondu presque point part point au discours incendiaire du chef du parti chiite qui s'en est longuement pris lundi aux FL et à leur chef, les accusant de vouloir "lancer une guerre civile" et d'être "la plus grande menace pour l'existence des chrétiens au Liban".
"Le commissaire du Hezbollah près le tribunal militaire"
Selon une source judiciaire à l'AFP, "le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire, Fadi Akiki, a chargé les services de renseignement de l'armée de convoquer M. Geagea et de recueillir sa déposition, sur la base des informations livrées par des membres des FL arrêtés" après les affrontements. La source judiciaire a précisé que 26 personnes avaient été arrêtées, pour la plupart des membres des FL. L'armée est en charge de l'enquête sur ces violences dont les circonstances restent confuses. Lors de son interview, M. Geagea a dit ne pas être au courant de cette convocation. Il a toutefois a affirmé que "s'il est vrai que le commissaire du Hezbollah près le tribunal militaire (en allusion à M. Akiki, ndlr) demande à entendre mon témoignage, je suis prêt à le faire, à une condition : que Hassan Nasrallah le fasse avant moi". Il a estimé que le juge devrait en effet commencer par interroger "la partie" qui était "clairement impliquée" dans les affrontements, "c'est-à-dire les miliciens du parti chiite, et non ceux dont on n'a pas de preuve de l'implication". Samir Geagea a en outre affirmé n'avoir aucun problème que la cour de Justice soit saisie de l'affaire de Tayouné "tant que l'enquête n'est pas manipulée". Il a dans ce cadre indiqué avoir des informations provenant du ministère de la Défense, selon lesquelles des partisans du tandem chiite ont été arrêtés dans le cadre de l'enquête, et non uniquement des proches des FL.
Le leader chrétien s'exprimait de Meerab, devant une fresque montrant les ruines du port de Beyrouth, des portraits de plusieurs responsables du 14 Mars assassinés, depuis l'attentat en 2005 qui a coûté la vie à l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, et les mots "Tombés dans la même embuscade". Une pique à peine voilée au Hezbollah. Pour le parti chiite, les combats de Tayouné ont commencé par une "embuscade" tendue aux manifestants du Hezbollah et du mouvement Amal, qui se rendaient devant le palais de Justice afin de protester contre la "politisation" selon eux de l'enquête menée par le juge d'instruction près la cour de Justice, Tarek Bitar, sur la double explosion au port de Beyrouth. Le tandem chiite dénonce des décisions jugées "arbitraires" du magistrat et ses "ambitions politiques". Malgré les pressions politiques, Tarek Bitar veut poursuivre plusieurs responsables dans le cadre de son enquête. Des recours ont été déposés contre lui par les députés poursuivis, mais ils ont jusqu'à présent été tous rejetés. Cette affaire a provoqué la paralysie du gouvernement de Nagib Mikati, les ministres chiites réclamant que le magistrat soit remplacé.
"Incident funeste"
Pour Samir Geagea, les combats de Tayouné étaient "un incident funeste qui a fait de nombreuses victimes, à Aïn el-Remmané autant que dans la banlieue sud", a-t-il déclaré. Il a ajouté que les Libanais en "ont assez du Hezbollah" et que c'est pour cette raison que les habitants de Aïn el-Remmané avaient réagi lorsque les manifestants du Hezbollah sont entrés dans leur quartier. "Ce qu'il s'est passé à Tayouné n'est pas une embuscade ni une histoire de franc-tireur", s'est défendu Samir Geagea, ajoutant que le Hezbollah "voulait mener un nouveau 7 mai pour mettre un terme à l'enquête" de Tarek Bitar. "Les quatre premiers blessés étaient des habitants de Aïn el-Remmané, après l'entrée des manifestants chiites dans ce quartier" et la vandalisation de voitures et de façades de bâtiments, a-t-il poursuivi, insistant sur le fait qu'il ne savait pas "qui a tiré en premier". "Ce ne sont pas les FL qui ont incité les habitants de Aïn el-Remmané à prendre les armes, mais les messages provocateurs envoyés la veille sur les réseaux sociaux", a-t-il insisté. Il a par ailleurs estimé que l'armée avait "fait de son mieux" pour se déployer sur les lieux, mais que le nombre important de ruelles sur le chemin de la manifestation rendait cette mission difficile, et que l'endroit où les manifestants sont entrés dans le quartier de Aïn el-Remmané n'était pas un "point chaud" habituel.
Le Hezbollah "dans une impasse"
Répondant par la suite à différents points du discours de Hassan Nasrallah, M. Geagea a estimé que les déclarations du leader chiite étaient "un cadeau empoisonné et étaient bourrées de fautes et de rumeurs". Marcel Ghanem avait juste avant demandé au chef maronite s'il considérait comme un "cadeau" le fait que le discours du leader chiite ait renforcé sa popularité, notamment auprès des communautés chrétienne et sunnite.
Le Hezbollah est "dans une grande impasse", a ajouté le leader maronite, soulignant que le parti chiite "ne veut pas qu'une enquête soit menée sur la double explosion au port de Beyrouth". Il a argumenté ce point en affirmant que le parti chiite avait refusé d'entrée de jeu une enquête internationale avant de s'opposer à Fadi Sawan (le premier juge en charge de l’enquête), puis à Tarek Bitar. Il a en outre souligné qu'après la catastrophe du 4 août, il ne pensait pas que le parti chiite était impliqué dans le stockage du nitrate d'ammonium dans le port de Beyrouth. "Ils ont des entrepôts dans tout le Liban, ils pouvaient le stocker en Syrie", a-t-il ajouté. "Mais l'insistance du Hezbollah à torpiller l'enquête prouve qu'il y est impliqué", a-t-il poursuivi.
M. Geagea a encore affirmé "ne pas savoir sur quoi travaille" le juge Bitar, appelant à attendre la publication de l'acte d'accusation avant de se prononcer sur une éventuelle politisation de l'instruction. "Plusieurs responsables du Hezbollah et du mouvement Amal ont affirmé que si aucune solution n'était trouvée concernant Tarek Bitar, ils auraient recours à d'autres moyens, et c'est ce qu'il s'est passé le 14 octobre", a-t-il affirmé.
Répondant à la déclaration du chef du parti chiite qui avait indiqué que les FL peuvent compter sur 15.000 combattants, mais que le Hezbollah en dispose de 100.000, Samir Geagea a déclaré que son parti "n'a aucun combattant. Nous avons entre 30 et 35.000 partisans". Il s'est interrogé sur les moyens que devrait déployer le Hezbollah s'il dispose effectivement de 100.000 combattants. "Cela coûterait entre 50 et 100 millions de dollars par mois. C'aurait été mieux que ces fonds soient dépensés pour le développement du Sud et de la Békaa", régions à forte dominante chiite, a-t-il ironisé. "Pourquoi ces combattants ne s'opposent-ils pas aux violations israéliennes ?", a-t-il insisté.
Et en réponse aux déclarations du chef du Hezbollah selon lesquels les FL sont "la plus grande menace pour les chrétiens", Samir Geagea a rétorqué que son parti est "une garantie pour tous les Libanais et les chrétiens". Et de lancer : "Le projet du Hezbollah est celui qui contrecarre le plus les projets des chrétiens du Liban, qui, eux, visent à protéger l'existence de l'Etat". Le projet du parti chiite est un projet "destructeur pour le Liban et ce que nous vivons aujourd'hui est le début de l'application de leurs plans", a-t-il poursuivi, soulignant toutefois qu'il faut s'y opposer "par la politique et non d'une manière militaire". "Nous ne voulons pas la guerre mais nous ne laisserons personne nous imposer sa volonté par la force", a-t-il insisté.
Le leader maronite n'a pas manqué de lancer une pique au parti rival sur la scène chrétienne, le Courant patriotique libre (fondé par le président Michel Aoun et dirigé par Gebran Bassil). "C'est l'accord de Mar Mikhaël (conclu en 2006 entre le CPL et le Hezbollah, ndlr) qui a mené aux affrontements de Tayouné, parce qu'il a donné une protection libanaise au Hezbollah", a encore lancé Samir Geagea. "Sans cet accord, le Hezbollah n'aurait pris aucun risque et n'aurait pas essayé d'imposer son avis sur tous les sujets, à tous les Libanais, et le CPL est donc dans un sens responsable de ce qu'il s'est passé" à Tayouné.
Le simple fait que HN a prétendu qu’il avait 100.000 combattants prêts à attaquer les FL aurait dû faire bouger la justice civile car c’est un appel à la guerre civile et aussi faire bouger la justice militaire carpe sa déclaration veut dire qu’il ne tient pas compte de l’armée nationale. En clair, le coupable est certainement HN et son triptyque, il peut se le mettre la où je le pense car ni l’armée ni les sunnites ni les Druzes ni les chrétiens ni une partie des chiites ne veulent de lui et de son organisation terroriste
20 h 37, le 22 octobre 2021