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Monde - Récompense

Le Nobel de la paix à deux journalistes champions de la liberté de l’information

La Philippine Maria Ressa et le Russe Dmitri Mouratov recevront leur prix le 10 décembre dans la capitale norvégienne.

Le Nobel de la paix à deux journalistes champions de la liberté de l’information

Les journalistes indépendants Maria Ressa des Philippines et Dmitri Muratov de Russie reçoivent le prix Nobel de la paix. dessin de Patrick Chappatte

Le prix Nobel de la paix a récompensé hier deux journalistes d’investigation, la Philippine Maria Ressa et le Russe Dmitri Mouratov, consécration d’une liberté de la presse menacée de toutes parts.

« Le journalisme libre, indépendant et factuel sert à protéger contre les abus de pouvoir, les mensonges et la propagande de guerre », a déclaré la présidente du comité Nobel norvégien, Berit Reiss-Andersen.

Âgée de 58 ans, Maria Ressa a cofondé la plateforme numérique de journalisme d’investigation Rappler, en 2012, un média qui a braqué les projecteurs sur les violences accompagnant la campagne antidrogue initiée par le président philippin Rodrigo Duterte. « Le nombre de morts est si élevé que la campagne ressemble à une guerre menée contre la population elle-même », a fait valoir le comité Nobel. Également de nationalité américaine, Mme Ressa a été condamnée en juin pour diffamation mais laissée en liberté sous caution dans une affaire où elle risque jusqu’à six ans de prison. « Un monde sans faits signifie un monde sans vérité et sans confiance », a dit l’ancienne journaliste de CNN sur Rappler, une plateforme qui, selon le comité Nobel, « a aussi documenté comment les réseaux sociaux sont utilisés pour propager des fausses informations, harceler les opposants et manipuler le débat public ». Maria Ressa est la première femme couronnée par un Nobel cette saison, après des lauréats 100 % masculins en sciences et en littérature. L’économie clôt le millésime lundi.

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D’un an son aîné, Dmitri Mouratov est, lui, un des cofondateurs et rédacteur en chef du journal Novaïa Gazeta, une des rares voix encore indépendantes en Russie. Le média a vu le jour en 1993 avec l’aide de l’ancien dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev qui y avait placé une partie de l’argent reçu quand il avait lui-même remporté le Nobel trois ans plus tôt. Novaïa Gazeta a, comme l’a souligné le comité, mis en lumière « la corruption, les violences policières, les arrestations illégales, la fraude électorale et les “fermes de trolls” » et l’a payé au prix fort : six de ses journalistes ont perdu la vie, dont Anna Politkovskaïa, tuée il y a 15 ans quasiment jour pour jour. Dmitri Mouratov leur a dédié son prix : « Ce n’est pas mon mérite personnel. C’est celui de Novaïa Gazeta. C’est celui de ceux qui sont morts en défendant le droit des gens à la liberté d’expression. » M. Mouratov a aussi affirmé qu’il aurait remis cette distinction à Alexeï Navalny, bête noire de Vladimir Poutine. Il a promis de reverser une partie de la somme accompagnant le Nobel pour soutenir les « médias indépendants et autonomes » de Russie. Le Kremlin, lui, a salué le « courage » et le « talent » du journaliste.

Menaces grandissantes

« Bien sûr nous condamnons la situation dans ces deux pays en particulier, mais je tiens à souligner que nous condamnons aussi la situation dans tous les pays où l’activité des journalistes est restreinte et où la liberté d’expression est sous pression », a déclaré Mme Reiss-Andersen. Dans un monde où, comme le veut l’adage, « la première victime de la guerre, c’est la vérité », il s’agit du premier Nobel de la paix, en 120 ans d’histoire, à récompenser la liberté d’information en tant que telle, une « des préconditions essentielles pour la démocratie », selon le comité Nobel.

Selon le dernier classement de Reporters sans frontières (RSF), la situation de la liberté de la presse est problématique, difficile, voire très grave dans près de trois quarts (73 %) des 180 pays évalués. Un funeste compteur tenu par l’association montre que 24 journalistes professionnels ont été tués depuis le début de l’année et 350 autres sont encore emprisonnés. Ce prix est « un appel à l’action », a réagi le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire. Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), autre favori, a rendu hommage à deux reporters « incroyables (...) à un moment où la presse fait face à des menaces grandissantes partout dans le monde ».

Dernier lauréat russe (1990) du prix de la paix après Andreï Sakharov en 1975, Mikhaïl Gorbatchev a salué « une très bonne nouvelle » pour la presse du monde entier.

Du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, tué dans le consulat de son pays à Istanbul, au journal prodémocratie Apple Daily, contraint de fermer cette année à Hong Kong, les tentatives de musellement foisonnent.

« Infodémie »

Si l’information est systématiquement prise pour cible dans les régimes autoritaires et sur les champs de bataille, le débat public dans les pays en paix est aussi parasité par les « infox ». À l’occasion de la pandémie de Covid, l’Organisation mondiale de la santé s’est inquiétée dès le début 2020 de l’« infodémie ». « Sans liberté d’expression ni liberté de la presse », a conclu Mme Reiss-Andersen, « il sera difficile de réussir à promouvoir la fraternité entre les nations, le désarmement et un monde meilleur », comme le souhaitait Alfred Nobel (1863-1896), le fondateur du prix, dans son testament. Le Nobel de la paix, qui consiste en un diplôme, une médaille d’or et un chèque de 10 millions de couronnes (près de 980 000 euros), est traditionnellement remis le 10 décembre dans la capitale norvégienne.

Une inconnue demeure toutefois: la situation sanitaire. L’Institut Nobel doit décider à la mi-octobre si la cérémonie, réduite l’an dernier essentiellement à un format numérique à cause du Covid, est maintenue dans sa forme habituelle avec la présence, physique, du lauréat.

Le prix Nobel de la paix a récompensé hier deux journalistes d’investigation, la Philippine Maria Ressa et le Russe Dmitri Mouratov, consécration d’une liberté de la presse menacée de toutes parts.« Le journalisme libre, indépendant et factuel sert à protéger contre les abus de pouvoir, les mensonges et la propagande de guerre », a déclaré la présidente du...

commentaires (3)

Génial Chapatte, vraiment. Un sacré observateur.

Shou fi

10 h 45, le 09 octobre 2021

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Commentaires (3)

  • Génial Chapatte, vraiment. Un sacré observateur.

    Shou fi

    10 h 45, le 09 octobre 2021

  • Génial Chapatte, vraiment. Un sacré observateur.

    Shou fi

    10 h 44, le 09 octobre 2021

  • A L,OLJ LA RECOMPENSE DE LA LIBERTE DE L,INFORMATIOM, CAD LA LIBERTE D,EXPRESSION, C,EST LA CENSURE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 08, le 09 octobre 2021

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