Alors que ces derniers jours les proches du président de la République Michel Aoun s'efforçaient de distiller un climat d'optimisme quant à une possible formation du gouvernement cette semaine, un échange corsé d'accusations de blocage entre le chef de l'État et le Premier ministre désigné Nagib Mikati semble avoir mis un terme à cette dynamique, du moins pour le moment. Entre-temps, le Liban continue de s'enfoncer dans la pire crise socio-économique de son histoire contemporaine et reste sans gouvernement depuis plus d'un an.
"Alors que le Premier ministre désigné perçoit le processus de formation du gouvernement conformément aux règles constitutionnelles en vigueur, et aux exigences de la phase difficile que traverse le pays, certains semblent insister à transformer les tractations en un bazar politique et médiatique, ouvert à tous les mensonges et fuites, dans une claire tentative de se laver les mains du blocage, et d'en imputer la responsabilité à d'autres protagonistes", a déploré le bureau du Premier ministre désigné Nagib Mikati, dans un communiqué publié jeudi en fin de journée.
Ces accusations interviennent une semaine après le dernier entretien entre le président de la République et le Premier ministre désigné, alors que le processus semble dans l'impasse.
Depuis la nomination de M. Mikati à la présidence du Conseil le 26 juillet dernier, un bras de fer opposant les deux camps entrave toujours la mise en place du cabinet. Cette querelle porte notamment sur l'attribution de quelques portefeuilles jugés juteux, et qui pourraient jouer un rôle crucial dans la prochaine phase. Il y a aussi le fameux tiers de blocage, à savoir la démission d'un tiers des membres du cabinet qui entraînerait la chute de celui-ci. A un peu plus d'un an de l'expiration du mandat Aoun, la présidence et son camp sont accusés par leurs détracteurs de vouloir détenir ce tiers de blocage, même si la présidence dément cette éventualité. Le chef du gouvernement désigné, appuyé par ce qu'il est convenu d'appeler le club des anciens Premiers ministres, s'opposent fermement au tiers de blocage.
En dépit des obstacles qui restent à franchir, les milieux de Baabda se sont employés depuis plusieurs jours à distiller un climat d'optimisme quant à une probable mise en place du cabinet dans les tous prochains jours. S'exprimant mercredi devant une délégation de sénateurs américains en visite éclair à Beyrouth, Michel Aoun avait même espéré que le gouvernement sera formé cette semaine. Jeudi, des sources proches de la présidence citées par l'agence locale al-Markaziya ont indiqué que Baabda attend les réponses du Premier ministre désigné au sujet de (l'attribution du ministère de) l’Économie qui jouera un rôle essentiel dans les négociations" prévues avec le Fonds monétaire international". De même source, on assure que le président Aoun a aplani tous les obstacles, et répondu à toutes les questions du Premier ministre désigné.
C'est donc pour répondre à ces déclarations que Nagib Mikati semble avoir publié son communiqué, dans lequel il a assuré qu'il "poursuivra la formation du gouvernement, conformément aux règles qu'il avait définies depuis sa nomination à la présidence du Conseil, tout en faisant preuve d'ouverture envers le président de la République et en se concertant avec lui". Le bureau de M. Mikati affirme que ce dernier "aspire à une coopération constructive, loin des conditions et contre-conditions, désormais connues par tout le monde". Une allusion à peine voilée à l'insistance de Michel Aoun pour avoir son mot à dire au sujet des ministrables chrétiens". Sur ce point, le président Aoun est vivement critiqué par les anciens Premiers ministres, mais aussi par M. Mikati lui-même. Dans une interview accordée vendredi dernier à la chaîne saoudienne al-Hadath, le milliardaire sunnite avait accusé le chef de l'État d'empiéter sur ses prérogatives.
Le bureau de presse du Premier ministre désigné souligne enfin que M. Mikati "ne s'est engagé auprès de personne sur quoi que ce soit, avant la mise en place finale du gouvernement".
Réplique rapide de Baabda
La contre-attaque de Baabda n'a pas tardé. Quelques minutes après la publication du communiqué de M. Mikati, le bureau de presse de la présidence a fermement critiqué, mais sans le nommer, Nagib Mikati et le club des ex-Premiers ministres, se défendant une fois de plus de bloquer le processus gouvernemental.
Dans un communiqué marqué par un ton et des termes assez fort, la présidence a démenti, toute volonté de la part du chef de l’État de détenir le tiers de blocage qu'il qualifie de "tiers de garantie", "que ce soit de façon directe ou indirecte", rappelant que les circonstances difficiles que traverse le pays devraient pousser "tout le monde à faire preuve de responsabilité, et prendre l'initiative de sauver le pays". Appelant à "mettre un terme au jeu du plus futé, la présidence a redouté une volonté d'entraver la formation du gouvernement et la mise en place des réformes ainsi que la lutte contre la corruption (...)". Baabda a enfin appelé à "ne plus accuser le président de la République du blocage" dans la formation du cabinet.
En soirée, des sources proches du président Aoun ont affirmé à la chaîne Al-Manar que le communiqué du palais de Baabda ne visait pas Nagib Mikati.
Le Liban est sans gouvernement effectif depuis la démission de celui de Hassane Diab en août 2020, six jours après la double explosion meurtrière au port de Beyrouth. Après l'échec de Moustapha Adib et Saad Hariri - qui s'est récusé en juillet dernier au bout de neuf mois de tractations - Nagib Mikati a pris la relève. Au vu du blocage dans lequel se noie le processus, le directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim déploie actuellement ses bons offices entre les protagonistes.
Dans un commentaire précédent que L’OLJ a censuré suite à la visite des américains au palais variolé, j’ai indiqué que l’homme qui l’occupe n’était pas un homme de paroles et qu’il est loin de ce qu’on appelle un homme d’honneur. Sa parole ressemble à des mots inscrits sur le sable et ce ne sont pas les vents et les vagues qui manquent en ce moment dans le pays. Ils ont été vite effacés. Et dire qu’on continue à l’appeler Fakhamto en le laissant profiter du faste jusqu’à l’indécence alors que le peuple n’a plus de pain. A qui la faute?
12 h 03, le 03 septembre 2021