Le chef de l’État ne lâche pas prise. Alors que l’on assistait à ce qui semblait être le sprint final en matière de formation du gouvernement, Michel Aoun a sorti une arme autrement redoutable dans son bras de fer avec le Premier ministre Nagib Mikati : le dégommage du gouverneur de la banque centrale, Riad Salamé, un engagement que le président cherche à extirper au Premier ministre désigné dans le cadre du marchandage en vue de la naissance du cabinet.
L’avis de recherche émis par la procureure du Mont-Liban Ghada Aoun contre M. Salamé il y a deux jours est sans aucun doute la nouvelle épée de Damoclès brandie par Baabda pour faire plier M. Mikati.
Bien que les touches finales qui, en principe et comme annoncé, restaient à mettre pour que ce nouveau gouvernement puisse voir le jour se soient avérées être une fausse alerte – plusieurs obstacles restent à ce jour non résolus –, Michel Aoun a tout de même joué de sa carte maîtresse alors que s’accentuaient les pressions internationales. On apprenait entre autres que la France, qui continue de pousser, quoique plus discrètement, en vue d’une solution, a augmenté les pressions il y a quelques jours. Le président, qui poursuit ses batailles politiques comme si de rien n’était, semble donc s’en remettre à la justice pour parvenir à ses fins. C’est ainsi que Ghada Aoun, connue pour ses attaches aounistes, s’est à nouveau manifestée face au gouverneur de la BDL.
Ghada Aoun avait engagé, le 7 avril dernier, des poursuites contre Riad Salamé dans l’affaire des transferts bancaires à l’étranger et pour des faits relevant du blanchiment d’argent. La procureure avait considéré que ces transferts étaient « responsables de l’effondrement de la livre libanaise ».
Retour à la case départ
Dès le début, Michel Aoun souhaitait en découdre avec Riad Salamé et en a quasiment fait son cheval de bataille pendant des années. Il a ainsi œuvré sans discontinuité, surtout depuis l’effondrement financier, à le limoger. Sauf qu’il avait besoin pour cela de l’aide du Premier ministre désigné, seule une décision prise en Conseil des ministres pouvant le démettre de ses fonctions.
Le président avait auparavant tenté le jeu en vain, avec Saad Hariri, un proche du gouverneur, avant de recommencer avec Nagib Mikati. Ce dernier, qui fait partie du club sunnite des anciens chefs de gouvernement, n’a pas plié à ce jour et ne le fera probablement pas. Les États-Unis ne semblent pas prêts non plus à jeter en pâture M. Salamé, qui a bien collaboré avec eux sur tous les dossiers délicats de blanchiment d’argent et autres, à moins que des preuves sérieuses de corruption et de malversations soient avancées à son encontre, comme le souligne une source à Washington.
La procédure judiciaire ressuscitée contre le gouverneur est une manœuvre présumée d’autant plus efficace aux yeux de Baabda qu’on pense qu’elle serait gagnante pour le président, M. Salamé étant devenu extrêmement impopulaire auprès de nombreux Libanais depuis le début de la crise financière. Elle lui serait surtout utile comme moyen de pression pour négocier, en position de force, ses quotes-parts et les équilibres au sein du futur cabinet.
La énième visite du Premier ministre désigné hier à Baabda en est la démonstration. Mine renfrognée, Nagib Mikati, qui a présenté au chef de l’État une mouture complète inspirée des précédents pourparlers, est sorti les mains vides, n’ayant pu arracher plus de compromis que lors de sa dernière visite, ou de l’avant-dernière. Au contraire, le nombre d’obstacles aurait même augmenté, à en croire des sources concordantes.
Selon notre correspondante à Baabda Hoda Chédid, les points en suspens seraient au nombre de cinq : la vice-présidence du gouvernement qui, selon des informations obtenues par la MTV, pourrait être confiée à un membre du Parti social national syrien, Wadih Chami.
Les portefeuilles de l’Intérieur et de la Justice, qui obstruent le processus depuis le début des pourparlers, voire même du temps où Saad Hariri avait tenté sa chance, persistent. Les Affaires sociales et l’Économie posent également problème. De nouvelles divergences autour du nom du ministre des Télécoms seraient également apparues, sachant notamment que ce sont les Marada qui briguent ce portefeuille. Une situation qui n’est pas pour plaire au chef de l’État, à couteaux tirés avec le chef de cette formation chrétienne.
Bref, c’est un sentiment de quasi-retour à la case départ que laisse l’entretien entre MM. Mikati et Aoun. D’autant que la distribution des quotes-parts entre les différentes parties politiques pourrait même être remise en cause si le Premier ministre et le président ne parvenaient pas à s’entendre sur les noms. Plus grave encore, assure un analyste politique proche du 14 Mars, la question des deux ministres chrétiens que le chef de l’État insiste à désigner lui-même. Ce qui signifie un retour à la question du tiers de blocage qui a fait torpiller tous les efforts menés neuf mois durant par Saad Hariri.
Lors de leur tête-à-tête, de nouvelles suggestions de ministrables auraient été avancées de part et d’autre pour rapprocher les points de vue, assurent les sources proches de Baabda qui reste prudent et tente de ne pas donner l’impression d’être le fossoyeur du gouvernement.
commentaires (20)
où est ce cabinet de personnes qui ont les connaissances necessaires pour relever notre pays. on recommence: ce parti =ce ministère etc... monsieur le président et votre entourage je signe et persiste . Arretez de nous prendre pour des idiots. Vous ne faites rien pour ce pays. il ne s'agit que de mots creux et de basses revanches. nous citoyens faisons de notre mieux pour travailler aider autour de nous . vous vendez de l'air et voulez juste gagner du temps . En attendant la population se meurt. Arretez vos revanches stupides et mettez vous au travail et pas à la distribution de ministères comme "cadeaux" si peu mérités aux uns et aux autres. naila kettaneh kunigk
Naila Kettaneh-kunigk
09 h 52, le 04 septembre 2021