Il y a un an, dans ces mêmes pages, je vous crachais ma haine au visage. C’était le 3 août 2020. Le jour d’avant. Avant ce meurtre que vous avez commis de vos propres mains. Je crachais cette haine, parce que avant même que vous fassiez exploser Beyrouth et nos âmes en mille morceaux, le sort des Libanais était devenu un enfer. Quand je relis ces lignes et ces mots écrits au début du mois d’août de l’année dernière, je suis consternée. Parce que les raisons qui m’avaient poussée à hurler ma haine, ma colère et mon désespoir sont aujourd’hui les mêmes et bien pires encore.
Si l’année dernière ma haine était déjà incommensurable, aujourd’hui, elle n’a plus de limites. Et cette haine-là, je ne l’ai jamais éprouvée pour rien ni personne. Je n’aurais jamais pensé que je puisse vomir quelqu’un de la sorte. Que je puisse souhaiter à quiconque d’atroces souffrances. Que ça soit devenu mon plus grand fantasme. Un fantasme que l’on est des centaines de milliers à partager.
Je vous maudis de tout mon être. Je vous maudis parce que vous nous avez tout pris et que vous en voulez plus encore. Je vous maudis parce qu’à la veille du funeste anniversaire de ce crime contre l’humanité, vous avez fait en sorte qu’il reste impuni. Parce que vous faites tout ce qui est en votre pouvoir pour obstruer l’enquête et le travail de la justice pour protéger des suspects. Pour vous protéger. Je vous maudis parce que les familles des victimes ont le cœur qui saigne une deuxième fois et que vous leur riez au nez. Vous vous riez de toute une population qui vit le martyre. Vous nous torturez à petit feu, nous ôtant tout souffle de vie. Et tandis que le pays arrive à sa fin, que les médicaments sont devenus une denrée rare, que le mazout est saisi en attendant l’augmentation de son prix, que les gens sont plongés dans le noir, la chaleur et la faim, que les hôpitaux crient à la catastrophe, que des enfants meurent faute de soins, vous continuez à danser sur nos tombes.
Vous êtes des assassins, des monstres sans nom. Vous êtes ignobles, méprisables, sordides. Vous êtes le pire de la race humaine. Un concentré de tous les tyrans que l’histoire a connus. Vous avez eu recours à la répression, à la torture, à la propagande, au meurtre, au vol, au trafic, au blanchiment d’argent pour conserver le pouvoir.
Vous êtes une équipe démoniaque, formée de chefs de guerre, de politiciens, de banquiers, de malfaiteurs, de leurs familles et de leur entourage. Vous êtes des infanticides, des tueurs en série, des psychopathes. Et vous commettez ce qu’on ne peut plus qu’appeler le génocide libanais. Vous êtes en train d’assassiner votre propre peuple. Après l’avoir dépouillé, violé, poussé à l’exil, à la mendicité, vous l’enterrez vivant. Vous êtes dépourvus d’empathie et de conscience. Vous êtes l’incarnation même de l’amoralité et du mal. Vous êtes pires que des vautours parce que vous ne vous contentez même plus des carcasses. Vous êtes les preneurs d’otages de toute une nation, glorifiés par vos derniers partisans endoctrinés par vos mensonges.
Vous nous avez plongés dans les ténèbres. Au sens propre comme au sens figuré. Plongés dans le désespoir, la terreur et la résignation. Et vous avez tout détruit. Nos vies, nos rêves, nos avenirs. Vous avez brisé le cœur de centaines de milliers de mères et de pères, de centaines de milliers d’enfants, de frères et de sœurs. Et pendant que nous agonisons dans une mort lente et douloureuse, vous continuez à vivre comme si de rien n’était. Parce que pour vous, rien n’est… Rien n’est plus important que votre petite personne et votre petit monde.
Dans quelques jours, nous allons commémorer la plus grande tragédie qu’ait connue le Liban. Une tragédie due à votre incompétence, à votre goût prononcé pour la corruption et la luxure, à votre négligence et votre criminalité. Mais à 18h07, nos cœurs battront à l’unisson. Et je souhaite qu’à cet instant-là, le fantasme de tout un peuple se réalise enfin.
Chroniqueuse, Médéa Azouri anime depuis plus d’un an avec Mouin Jaber « Sarde After Dinner », un podcast où ils discutent librement et sans censure d’un large éventail de sujets, avec des invités de tous horizons. Tous les dimanches à 20h00, heure de Beyrouth.
Épisode 46 avec Nadine Labaki
https://youtu.be/cC2c51WQDjU
commentaires (20)
RELECTURE CE MATIN DU DIMANCHE 8 AOUT 2021, J'AI TENU A TROUVER PLUS DE MOTS QUI DECRIRAIENT CES CRAPULES , J;AI DENICHE SUR LE WEB Liste de 187 défauts humains ! Comment en parler avec ...https://www.questionsdemploi.fr › 2012/11 › liste-de-187. OUF ! CA M'A PERMIS QUELQUE PEU UNE SORTE DE DEFOULEMENT .
Gaby SIOUFI
10 h 08, le 08 août 2021