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Lifestyle - Beyrouth Insight

Heritage and Roots : Charles al-Hayeck, raconteur d’Histoire

Il a enseigné l’Histoire pendant 18 ans et continue à le faire, autrement. Le discours ancré dans le passé mais aussi dans le présent, il cherche à « démocratiser le savoir » à travers sa page « Heritage and Roots ». Le professeur est un rêveur. Pourquoi pas ? 

Heritage and Roots : Charles al-Hayeck, raconteur d’Histoire

Charles al-Hayeck, passionné d’Histoire et d’histoires. Photo DR

Charles al-Hayeck a une tête un peu sortie du passé, une drôle de longue pipe au bec, un regard curieux sur tout et un sourire apaisé. Un peu professeur Tournesol de l’Histoire du Liban, ce presque quadragénaire est un homme apparemment heureux. Heureux dans son métier, heureux dans cette passion qui l’a vu grandir et qui le fait grandir depuis sa jeunesse. Heureux aussi de transmettre à sa manière ludique les détails qui font notre histoire et celle du Moyen-Orient, autant d’histoires à partager avec le plus grand nombre, « même les plus paresseux, même les plus réticents ». À peine libéré de ses fonctions d’enseignant et de directeur adjoint du cycle secondaire au Collège Saint-Joseph de Antoura, – il a présenté sa démission en mai dernier –, il a choisi de se retirer pour « enfin » se lancer dans son doctorat, et se consacrer entièrement à Heritage and Roots.

Cette plateforme, plus que juste donner des informations, revisite les idées reçues, celles ancrées, imprimées dans nos poussiéreux livres d’histoire depuis des décennies pour essentiellement, dit-il, « justifier le système et l’élite à la tête du pays ». Chez Charles al-Hayeck point d’agressivité ni de colère, mais un discours léger, agréable à entendre et chargé d’informations qu’il partage sur les réseaux sociaux et Youtube. Photos, révélations, voyages dans la région, balades, vidéos filmées dans son bureau ou en extérieur, tous les moyens sont bons et beaux pour ce « cours » revisité qui peut durer une heure et plus. Son but n’est pas, comme il l’assure, de changer notre histoire, mais de la dépoussiérer, la rectifier et « la diffuser au plus grand nombre. Il s’agit de remettre en question le récit national. Moi, je vulgarise et j’ajoute quelques éléments dans ce nouveau média qui devient, du coup, académique ».

Illustration de Olivia Flouty tirée du compte instagram heritage_and_roots.

Racines et patrimoine

Heritage and Roots. L’héritage d’abord : « Je tiens cette passion de ma famille très diversifiée, une partie venant de Sicile, l’autre d’Alexandrie, d’Alep et de Damas, qui a toujours été intéressée par le patrimoine. De mes parents aussi, tous deux professeurs, qui nous ont toujours embarqués, même pendant la guerre, dans des road-trips et des randonnées à travers le Liban », confie-t-il. « Petit à petit, j’ai pris cette décision et à 12, 13 ans, je savais déjà que je ne voulais faire que ça. Mes parents m’ont nourri avec des lectures et des voyages. L’évolution organique de cette passion est devenue un trait qui me définit parfaitement. » Et Roots (Racines, NDLR), pour cet ancrage dans le sol de son pays, sa nature, ses lieux mythiques, ses villages, ses rues et leur noms étranges, plantés en lui depuis l’enfance. La suite est logique… Durant sa longue carrière d’enseignant qui a démarré à l’aube de ses 20 ans, et au contact des manuels scolaires et des élèves, Charles al-Hayek sent l’importance de rectifier le tir, de parler avec un langage simple de ces notions souvent statiques et mal expliquées, de transmettre ces connaissances à travers une plateforme accessible car « nous faisons partie d’un groupe bien plus large que ces lignes d’appartenance identitaire héritées par la guerre. » Heritage and Roots voit organiquement le jour en mars 2020.

Charles al-Hayeck, passionné d’histoire et d’histoires. Photo DR

Comment tout a commencé

Il y a un peu plus d’un an, et en plein confinement, cet amoureux du grand air, professeur en congé forcé pour cause de pandémie, tombe en panne en pleine nature, à Bourj el-Fidar, lors d’une ballade à vélo. En attendant une voiture de dépannage, il regarde autour de lui, s’imprègne de ce qu’il voit, de ce qu’il sent, s’interroge sur le nom de ce bourg comme tant d’autres au Liban. « J’aime cette région, faisons une vidéo », pense-t-il. Le gens ont aimé, emportés par ce sentiment de dépaysement qu’il leur offre, alors qu’ils sont enfermés chez eux. « Pourquoi ne pas les divertir avec quelque chose de sérieux, d’intéressant. De l’histoire, notre histoire, mais avec une approche personnelle, de l’humour et de la décontraction. » Et ça marche… Pour preuve les 32 300 abonnés acquis en un an, public fidèle accroché à ses mots et à ses récits dans lesquels il déconstruit les mythes. « La majorité n’a plus la curiosité ou les moyens de lire pour s’informer… »

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Qu’il vous parle de Fakhreddine, de la rue de Damas, de la légende d’Ugarit, de Deir el-Qamar, de l’imam al-Ouzaï, du mur phénicien, du conflit ottoman au Mont-Liban, du tremblement de terre à Beyrouth en 551 avant J-C ou encore de l’histoire des maamouls et autres baklavas, l’historien n’omet aucun détail savoureux ni dans la « mise en scène » de ses vidéos ni dans les informations transmises à la suite d’un long et minutieux travail d’historien. « Il y a un grand besoin au Liban pour un savoir accessible. Je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant de personnes qui apprécieraient cette vision un peu critique du récit national. » Charles al-Hayeck, ou comment revisiter notre passé, le débarrasser de ces erreurs pour construire, justement, un nouveau récit national. Un nouveau présent et, peut-être, le début d’une promesse de lendemains rafraîchis.

Charles al-Hayeck a une tête un peu sortie du passé, une drôle de longue pipe au bec, un regard curieux sur tout et un sourire apaisé. Un peu professeur Tournesol de l’Histoire du Liban, ce presque quadragénaire est un homme apparemment heureux. Heureux dans son métier, heureux dans cette passion qui l’a vu grandir et qui le fait grandir depuis sa jeunesse. Heureux aussi de transmettre...

commentaires (2)

Le vrai, l'authentique, l'intelligent, le cultive, le charmant Libanais comme on 'nen trouve plus qu'une poignee.

Zampano

18 h 49, le 15 juillet 2021

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Commentaires (2)

  • Le vrai, l'authentique, l'intelligent, le cultive, le charmant Libanais comme on 'nen trouve plus qu'une poignee.

    Zampano

    18 h 49, le 15 juillet 2021

  • BRAVO!

    Marie Claude

    08 h 49, le 15 juillet 2021

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