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Moyen-Orient - Diplomatie

Israël et Abou Dhabi s’installent dans leur union

C’est la première fois qu’une visite officielle d’un ministre israélien aux Émirats arabes unis a lieu.

Israël et Abou Dhabi s’installent dans leur union

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Yaïr Lapid, serre la main du ministre des Affaires étrangères des Émirats arabes unis, cheikh Abdallah ben Zayed al-Nahyane, lors de leur réunion à Abou Dhabi, aux Émirats arabes unis, le 29 juin 2021. Photo Reuters

Une visite historique pour ancrer une réalité diplomatique de plus en plus concrète. Yaïr Lapid, chef de la diplomatie israélienne, est devenu hier le premier des ministres de l’État hébreu à se rendre officiellement aux Émirats arabes unis pour y rencontrer son homologue émirati, Abdallah ben Zayed al-Nahyane, et inaugurer une ambassade à Abou Dhabi et un consulat à Dubaï.

La symbolique est puissante et souligne la volonté de deux protagonistes – unis par leur hostilité commune vis-à-vis de Téhéran – de bâtir, dans le sillage des accords de normalisation signés en septembre 2020, des relations décomplexées, loin de la froideur qui caractérise les liens israélo-égyptiens ou israélo-jordaniens depuis les traités de paix de 1979 et de 1994. Ce voyage inédit s’inscrit dans un double contexte, marqué d’abord par les négociations entre les États-Unis et l’Iran pour réactiver, au grand dam d’Israël, le deal sur le nucléaire de 2015 ; ensuite par le déclenchement d’un soulèvement palestinien mettant les EAU dans l’embarras.

Pour la nouvelle coalition israélienne au pouvoir – née d’une alliance contre nature visant à rompre avec les années Netanyahu –, il s’agit désormais de mettre à profit son entregent pour affirmer le caractère institutionnel et transpartisan de la politique nationale envers le Golfe. De se réapproprier, en somme, des accords que l’ancien Premier ministre avait érigés au rang de succès personnels à travers lesquels garantir son avenir à la tête du pays. M. Netanyahu avait programmé et reporté à plusieurs reprises une visite à Abou Dhabi du fait de la pandémie liée au coronavirus. Son voyage avait finalement été annulé avant les élections du 23 mars en raison d’un contentieux avec la Jordanie. Preuve de sa gestion très personnelle du processus de normalisation, Haaretz souligne qu’il aurait interdit aux membres de son gouvernement de se rendre aux EAU avant qu’il n’y effectue lui-même une visite officielle.

État à État

En neuf mois, tout est allé très vite. De la normalisation en septembre 2020 à la chute politique de Benjamin Netanyahu en juin 2021, la collaboration entre Abou Dhabi et Israël s’est accrue à un rythme sans précédent. Selon le ministère israélien des Affaires étrangères, plus de 200 000 touristes se sont rendus aux EAU durant cette période. Sur le front commercial, le quotidien israélien Haaretz estime que les échanges bilatéraux auraient déjà dépassé les 354 millions de dollars. La société d’investissement émiratie Mubadala a conclu un accord de principe avec la société israélienne Delek pour lui racheter sa part de 22 %, pour 1,1 milliard de dollars, dans le gisement de gaz naturel de Tamar. Si les deux pays entretenaient une coopération dans le domaine de la défense et de la cybersécurité depuis des années, celle-ci s’est accélérée ces derniers mois. Israël a levé ses objections à l’achat d’armes de pointe, ouvrant ainsi la voie aux Émirats pour l’acquisition de chasseurs F-35 de Washington.

« Pour le nouveau gouvernement israélien, il est important d’essayer de prendre le contrôle du processus diplomatique avec les pays arabes du Golfe, car Benjamin Netanyahu a essayé de s’en attribuer le mérite et l’unique responsabilité », rappelle Hussein Ibish, chercheur à l’Arab Gulf States Institutes à Washington. « Il essaie donc de revendiquer ce contrôle de manière proactive – et le contrôle du processus diplomatique avec les Émirats arabes unis en particulier –, nouvel interlocuteur et partenaire potentiel le plus important d’Israël », poursuit-il.

Une démarche sensiblement similaire à celle d’Abou Dhabi, celui-ci cherchant à prouver que le processus de normalisation qu’il a entamé avec l’État hébreu n’est ni le signe d’une adhésion à la politique menée par Benjamin Netanyahu envers les Palestiniens ni le fruit d’un blanc-seing accordé aux mesures et discours annexionnistes israéliens. Il faut, en définitive, souligner l’approche d’État à État, indépendamment de l’idéologie des partis aux commandes. En outre, si le nouveau chef de gouvernement israélien, Naftali Bennett, a pu fonder sa renommée sur une rhétorique nationaliste radicalement antipalestinienne sur la défense des colonies juives et sur son opposition frontale à la création d’un État palestinien, la coalition dont il tient aujourd’hui les rênes rassemble des formations considérées – dans le cadre israélien – comme libérales ou centristes, sans compter le parti arabe et islamiste Raam de Mansour Abbas.

Pour mémoire

Les nouveaux amis arabes d'Israël dans l'embarras

« Ce que les EAU essaient de faire, c’est de consolider les relations avec les principales institutions nationales en Israël, y compris le gouvernement, l’administration à tous les niveaux, la bureaucratie, l’armée, les services de renseignements, les grandes entreprises, en particulier dans le secteur de la défense, des centre de technologie, et de sciences et des institutions universitaires, commente Hussein Ibish. Les détails de la politique intérieure d’Israël sont relativement sans importance, à l’exception de certains changements dramatiques, tels que l’annexion de masse. »

Lobbying

Ces objectifs avaient, certes, semblé être mis à l’épreuve à l’orée de la séquence qui s’est ouverte en mai dernier dans les territoires palestiniens et à l’intérieur des frontières israéliennes, mais si Abou Dhabi n’avait pas hésité à critiquer Israël concernant l’expulsion forcée des Palestiniens du quartier de Cheikh Jarrah à Jérusalem-Est et la prise d’assaut de l’enceinte de la mosquée al-Aqsa, il s’était fait très discret au cours des onze jours de bombardements intenses auxquels l’État hébreu a livré l’enclave de Gaza malgré ses 256 victimes. À Gaza, la présence du Hamas – proche du Qatar et issu de l’idéologie des Frères musulmans que combattent les EAU – comme faction dominante a permis à Abou Dhabi de mettre en avant un discours déplorant la violence, sans réel engagement diplomatique.

La visite diplomatique de Yaïr Lapid aux Émirats survient alors que la nouvelle administration en place affirme vouloir réparer les liens tendus entre l’État hébreu et le Parti démocrate aux États-Unis, après la lune de miel Netanyahu-Trump et la douche froide pour le premier lorsque le second est sorti perdant du scrutin présidentiel en novembre 2020. Dans cet esprit, M. Lapid s’est entretenu dimanche dernier à Rome avec le secrétaire d’État américain, Antony Blinken. Israël comme Abou Dhabi et Riyad se sont opposés au plan d’action conjoint (l’accord sur le nucléaire avec l’Iran) lors de sa signature en 2015, et ont tous appuyé le retrait unilatéral de Donald Trump en 2018 et la mise en œuvre d’une politique de la pression maximale contre la République islamique. « Le plan d’action conjoint aura lieu. La question est désormais de savoir si les États-Unis et les pays de la région vont réagir aux autres dossiers liés à l’Iran, à savoir les missiles, les interventions dans la région », souligne Bader al-Saif, professeur à l’Université du Koweït et chercheur non résident au centre Carnegie. « Le gouvernement de Netanyahu n’a jamais reconnu le deal avec l’Iran et n’a jamais voulu clarifier sa position auprès des Américains. MM. Bennett et Lapid veulent au contraire engager le dialogue avec Washington. Et c’est l’une des grandes raisons pour laquelle ils vont rencontrer les Émiriens, unifier ensemble leurs positions et faire du lobbying pour leur point de vue. »

Une visite historique pour ancrer une réalité diplomatique de plus en plus concrète. Yaïr Lapid, chef de la diplomatie israélienne, est devenu hier le premier des ministres de l’État hébreu à se rendre officiellement aux Émirats arabes unis pour y rencontrer son homologue émirati, Abdallah ben Zayed al-Nahyane, et inaugurer une ambassade à Abou Dhabi et un consulat à Dubaï. La...

commentaires (2)

Entretemps, nous recevons au Liban la visite de Ismael Hanniyeh chef du groupe Hamas considere comme terroriste par la plupart des pays du monde. Et qui le recoit? Hezbollah, Michel Aoun t Nabih Berri! Bravo ya chabeb

IMB a SPO

19 h 35, le 30 juin 2021

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Commentaires (2)

  • Entretemps, nous recevons au Liban la visite de Ismael Hanniyeh chef du groupe Hamas considere comme terroriste par la plupart des pays du monde. Et qui le recoit? Hezbollah, Michel Aoun t Nabih Berri! Bravo ya chabeb

    IMB a SPO

    19 h 35, le 30 juin 2021

  • Bravo 3abelna...Honk Kong ou Hanoi..l'axe de la lose et ses collabo ont choisi la pire.option .bientot les Soudanais qui onr eux choisi la paix diront pauvre petiits Libanais

    Liban Libre

    00 h 44, le 30 juin 2021

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